Le shopping vocal, nouveau terrain de bataille entre les géants de la distribution

Le monde de la grande distribution et celui de l’internet n’en finissent plus de se rapprocher aux Etats-Unis. En juin dernier, Amazon, leader mondial de l’e-commerce, signait une entrée fracassante dans le monde des supermarchés en rachetant pour 13,7 milliards de dollars (11,5 milliards d’euros) l’enseigne américaine Whole Foods. Voici maintenant la réponse d’un autre numéro un mondial, celui de la distribution physique : Walmart. Il a annoncé une alliance avec Google. Objectif des deux protagonistes : contrer Amazon. L’alliance avec Google permet à Walmart d’accéder à la technologie du « voice shopping » (shopping vocal). A partir de septembre, les centaines de milliers de produits de Walmart rejoindront Google Express, sorte de centre commercial virtuel qui regroupe les produits de nombreux distributeurs américains (Costco, Wallgreens, Target…). Les produits Walmart pourront alors être commandés via l’assistant vocal de Google. Les Américains pourront donc se faire livrer à domicile leurs courses simplement en parlant à leur smartphone, leur tablette ou à l’enceinte intelligente Google Home. Achats enregistrés Pour rendre cette expérience intuitive et rapide, Walmart pourra compter sur une fonctionnalité de Google Express qui enregistre les préférences des utilisateurs en termes de marques, de formats… lors de chaque achat. Lorsque le consommateur passera commande, il pourra se contenter de quelques mots comme « OK Google. Commande de dentifrice ». Google Express se chargera de sélectionner celui que le consommateur achète habituellement. En scellant cette alliance, les deux groupes s’attaquent en réalité frontalement au géant Amazon pour des raisons qui leur sont propres. Commençons par Walmart. Il est confronté depuis plusieurs années à la dynamique conquérante du site de commerce en ligne, qui le menace maintenant sur le terrain même des magasins physiques après le rachat de Whole Foods. Lors de ses derniers résultats trimestriels, Walmart a, une nouvelle fois, inquiété les analystes au sujet de son retard face à Amazon, malgré des chiffres supérieurs aux attentes et une progression de 60 % de ses ventes en ligne. Selon le cabinet spécialisé Internet Retailer, Amazon joue toujours un rôle écrasant dans les ventes en ligne aux Etats-Unis au deuxième trimestre, avec une part de marché de 38 %. Selon ces mêmes estimations, le site a contribué, à lui seul, pour moitié à la croissance du commerce internet américain sur cette période. Bientôt une guerre Cette alliance permet à Walmart d’offrir le voice shopping à ses clients tout comme le fait déjà Amazon avec son enceinte intelligente Echo et son assistant vocal Alexa. « Tout le monde est d’accord pour dire que la voix sera importante dans le shopping de demain, explique Gino Van Ossel, professeur à la Vlerick business school. La pénétration de ces assistants vocaux est encore très limitée mais on sait que dans 5 ou 10 ans, il y aura une guerre entre eux pour la domination du marché ». Walmart veut logiquement éviter qu’Alexa n’emporte celle-ci car cela voudrait dire que les achats e-commerce lui échapperaient. Google, lui aussi, s’inquiète de la concurrence d’Amazon qui lui prend des parts de marché dans la recherche. En décembre 2016, 50 % des recherches faites aux Etats-Unis concernant des produits ont eu lieu sur Amazon. La popularité croissante des enceintes intelligentes – marché dominé par Amazon – ne fait qu’accélérer ce phénomène. « Si on s’adresse à ces enceintes pour faire des recherches, on n’a plus besoin d’aller sur Google, explique Gino Van Ossel. Le business model de Google basé sur les revenus publicitaires n’est par ailleurs pas adapté à ces enceintes puisque la pub sur internet est visuelle, pas auditive, fait-il remarquer. Google a donc décidé de concurrencer Amazon sur son propre terrain en se lançant lui aussi dans le commerce de biens. Puisqu’il ne dispose pas des infrastructures de son concurrent (entrepôts…), il le fait en s’associant avec des distributeurs qui viennent vendre leurs produits à travers sa plateforme Google Express. Ce front anti-Amazon vient de prendre une ampleur nouvelle avec l’arrivée de Walmart.

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