Sébastien Delferière, notre invité foot du samedi: il évoque l’arbitrage vidéo en Belgique

Sébastien Delferière évoque avec nous son avenir et celui de l’arbitrage belge... et de l’arbitrage vidéo. Sébastien, tout d’abord, comment allez-vous ? Pas mal… En fait, c’est le 1er septembre, en arbitrant le match de Coupe du monde Kazakhstan-Monténégro, que je me suis occasionné une petite déchirure à la cuisse. Je reprends tout doucement et j’espère faire mon retour début octobre. Mais je dois d’abord passer mes tests physiques car j’ai été dispensé de ceux de juillet pour cause de Supercoupe, et je n’ai pu participer à ceux de la semaine dernière, vu ma blessure. Mais j’ai quand même passé, et réussi, l’examen théorique. Il y aura donc une session rien que pour moi. Je précise quand même que j’avais réussi les tests, plus durs, de l’UEFA, le 20 août, et que j’étais désigné pour le Marseille-Konyaspor de ce jeudi, avant de me blesser. Cinq arbitres avaient échoué, ou ne s’étaient pas présentés, fin juillet ; Frank Geldhof, blessé, a encore été recalé la semaine dernière et ne peut se représenter avant janvier ; Serge Gumienny a pris sa retraite, c’est embêtant… Oui et non. On a déjà connu pareille situation mais c’était moins médiatisé. La retraite de Serge, c’est une perte. Il n’était pas l’arbitre le plus apprécié, question de style peut-être, mais on pouvait toujours compter sur lui. Un arbitre, c’est comme un journaliste : un footballeur raté ? Je ne vois pas ça comme ça. Je n’étais pas un mauvais libero et cette position m’a sans doute donné la vision du jeu, ce qui me sert encore. Disons que j’ai fait le bon choix mais il eût été sans doute différent si j’avais eu le talent pour devenir pro. Toujours est-il que, poussé par mon père (NDLR : David Delferière, qui arbitra jusqu’en D2, fit la ligne en D1 et est l’un des vice-présidents de l’Union belge), je me suis lancé dans l’arbitrage à 16 ans, lors d’un match de minimes entre Chapelle et la Louvière, tout en continuant à jouer avec le Stade Brainois. C’était le 14 septembre 1997. J’ai donc fêté mes 20 ans d’arbitrage jeudi mais, évidemment, sans excès. J’ai juste repensé à ce premier match… Vous avez tout de suite impressionné, le sifflet à la bouche ? Pas vraiment car à 18 ans je pesais 105 kilos, pour 1,79 m, et on m’a dit que si je ne réagissais pas, je ne serais plus désigné… 105 kilos, vous ? A cause d’une vie estudiantine bien remplie… J’étais un guindailleur ! Comment avez-vous fondu ? En faisant attention, j’ai d’abord perdu 15 kilos en 6 semaines, en étant suivi par une diététicienne. Et j’ai poursuivi : j’avais 90 kilos quand je suis arrivé en P1 en 2002 à l’âge de 21 ans, 80 un an plus tard pour mon arrivée en promotion et enfin 75, depuis quelques années maintenant, toujours pour 1,79 m. Mais je me surveille constamment. A 16 ans, vous rêviez d’arriver en D1 ? Oui, en D1… provinciale, pour avoir enfin deux assistants ! Et voir, ensuite, quel pourrait être mon plafond. En janvier 2009, vous arrivez dans la vraie D1, à 28 ans. Le fait d’être un « fils de » a été un avantage ou un inconvénient ? Malgré les jalousies, un avantage. Papa n’a rien fait pour me favoriser mais j’ai bénéficié de ses conseils judicieux, de ses analyses critiques… Cela m’a aidé à me hisser en D1, où j’ai débarqué en janvier 2009, lors d’un Lokeren-Zulte Waregem. Le plafond dont vous parlez, c’est la Coupe du monde 2022, étant entendu que la présélection est faite pour 2018, et que l’Euro 2020 viendra peut-être trop tôt ? Pour moi, la Coupe du monde 2022 n’est pas un objectif. Je travaille toujours pour m’améliorer. Si je vais jusque-là, ça me fera plaisir, bien sûr. Si pas, j’y serai quand même, pour soutenir les Diables. Comment expliquer l’absence des Belges dans les grands tournois depuis Franck De Bleeckere, en 2006, 2008 et 2010 ? C’est une question de niveau, ou un manque de poids de la Belgique à l’UEFA et à la Fifa ? Actuellement, je suis dans le groupe 1, juste en dessous du groupe élites dont sont issus tous les présélectionnés pour le prochain Mondial. Pour monter de catégorie, il faut un peu de tout. D’abord, bien prester. Ensuite, un peu de chance. Et des relais en haut lieu… Il n’y a pas de Belge dans la commission de l’UEFA, où l’on avait jadis Alex Ponnet. Cela joue, pas par favoritisme, mais parce que ces membres voient davantage les arbitres de leur propre pays. Ensuite, il faut bien reconnaître que les arbitres des grands championnats ont de grands matchs chaque semaine, ce qui n’est pas notre cas, avec tout le respect que j’ai pour la Jupiler Pro League. Mais c’est vrai qu’il y a un membre hollandais dans la commission et que les Pays-Bas ont plusieurs arbitres dans le groupe Elites... Si on n’a pas de stade, et donc pas d’Euro 2020, la Belgique va être grillée pour longtemps, non ? Pas au niveau arbitrage, où notre image est plutôt positive. Grâce notamment à la présence de Franck De Bleeckere dans notre Referee Department, tandis que Werner Helsen est en même temps notre préparateur physique et celui de l’UEFA. Mais vous avez déjà 36 ans. Il va être temps de monter dans la plus haute catégorie… Je ferai un point sur ma carrière à 40 ans. J’écouterai mon corps, en espérant ne pas être rattrapé par mes guindailles d’autrefois… L’arbitrage vidéo a plutôt mal démarré, chez nous. Et on ne sait plus trop qui décide de quoi. Sur le même genre de phases, dans un match bénéficiant du VAR (Video Assistant Referee), l’arbitre posté dans le bus, devant ses écrans, intervient… ou pas ! Il y a eu aussi des problèmes récemment en Italie, où tous les matchs ont le VAR, avec d’autres moyens qu’en Belgique, et avec en même temps les arbitres derrière les buts. Zéro erreur, quel que soit le système, ça n’existe pas. Concernant le VAR, il faut d’abord rappeler que l’arbitre ne peut pas demander l’assistance. C’est l’arbitre du bus qui peut soit le conforter dans sa décision, soit lui conseiller de regarder les images car il pense que la décision est erronée. Mais uniquement sur quatre types de phases (penalty, but, carte rouge ou carte donnée au mauvais joueur) et pas pour des phases « grises » sur lesquelles 6 analystes, dans une émission TV, voteraient à 3 voix contre 3… A la fin, c’est toujours l’arbitre du terrain qui décide. Il doit aussi savoir dire aux joueurs d’attendre. Quel est votre expérience en la matière ? Uniquement la Supercoupe, où l’arbitre vidéo a pu contrôler que le but de Hanni était valable. En revanche, j’en ai été privé pour Gand-Anderlecht car il y avait un problème technique. Les arbitres officiant dans le bus ne sont pas tous des « flèches ». Mais, à 80 euros par match au lieu de 1.900 pour vous, les candidats ne doivent pas se bousculer ! Aux Pays-Bas ou en Italie, ce sont des arbitres en exercice, et bien payés, qui vont dans le bus. Je sais que, chez nous, des arbitres actifs vont poser leur candidature. Sincèrement, je suis prêt à aller parfois dans le bus, même pour 80 euros, si ça peut faire avancer le projet. Vraiment, ça ne me dérangerait pas car toute la corporation doit s’investir. Concernant Yves Marchand, il a été un de mes formateurs et il était excellent. Maintenant, ces arbitres vidéo n’ont pas bénéficié des même formations que nous, mais cela se met en place. Et je ne sais pas exactement de quelles images ils disposent dans le bus. Vous êtes, depuis cette saison, l’un des huit arbitres semi-pros, avec donc un salaire brut de 2.400 euros, plus 1.900 par match, plus votre mi-temps comme responsable financier du département technique de l’aile francophone (ACFF) de l’Union belge. C’est plutôt confortable… Cela nous permet de nous entraîner collectivement trois fois par semaine, plus le vendredi en solo, et de bien préparer les matchs aussi, notamment l’aspect tactique sur vidéo, car nos déplacements sont différents selon qu’une équipe presse haut, joue la zone, etc. J’ai également la chance d’avoir toujours les deux mêmes excellents assistants : Yves Denève et Stijn Hutsebaut. Financièrement, les montants sont appréciables mais la blessure est toujours possible, la carrière est limitée dans le temps, et ce sont des contrats de deux ans renouvelables… ou pas et nous restons très loin des salaires des joueurs. Ce qui est normal car ce sont eux qui attirent les foules et peuvent rapporter énormément à leur club, sportivement et financièrement. Comment, avec votre petit gabarit, maîtrisez-vous des castards de 1,95 m parfois terriblement surexcités ? En restant toujours calme. Ce qui ne m’empêche pas de pouvoir pousser une gueulante, comme l’an dernier sur Vanaken, qui contestait une faute évidente contre Anderlecht. On devrait vous équiper d’un micro pour entendre les insultes… Ce n’est jamais trop grave, sinon on sortirait la carte rouge. Le mieux, ce serait de nous mettre une caméra sur le front, pour que les gens se rendent compte de notre angle de vision.

Votre compte

Sébastien Delferière, notre invité foot du samedi: il évoque l’arbitrage vidéo en Belgique

Découvrez la suite, 1€ pour 1 mois (sans engagement)

Avec cette offre, profitez de :

Le fil info

0 Commentaire

Aussi en Division 1A

Alejandro Millan a fait ses adieux à l’Union Saint-Gilloise

Voici le maillot élu le plus emblématique des 50 dernières années dans le championnat belge (photo)

Deniz Undav, joueur de l’année: «Une bonne fin de saison qui aurait pu être un tout petit peu meilleure»

Deniz Undav élu Footballeur Pro de l’année, Felice Mazzù plébiscité chez les entraîneurs

Entretien Tony Bloom, propriétaire de l’Union: «Si l’USG peut gagner le titre? On veut surtout être compétitif»

Allez au-delà de l'actualité

À la Une

Vers un permis à points en Belgique? «C’est à l’étude», selon Georges Gilkinet

Roland-Garros: suivez le 1er tour de David Goffin face à Lehecka en direct

Entretien Garry Kasparov: «Une victoire finale de l’Ukraine pourrait représenter un coup mortel pour Poutine»

Incarcéré pour viols sur mineures, l’un des PDG les plus riches de France démissionne

Une infectiologue rassure: «Avec la variole du singe, nous ne sommes pas dans une situation comme avec le covid»

Il y a trop de seniors en bonne santé dans les homes belges

« Nos collaborateurs sont des empereurs, les clients sont rois »

6 Belges sur 10 sont de plus en plus sensibles à la politique climatique de leur emploi

« Nous donnons de la valeur aux idées et encourageons à les transformer en projets concrets »

Les sections du site

Les services

Groupe Rossel