Le forcing belge pour siéger au Conseil de sécurité de l’ONU

Depuis New York Le gouvernement belge débarque en rangs serrés, cette semaine à New York, pour la semaine ministérielle de l’Assemblée générale annuelle des Nations unies. Le Premier ministre, deux vice-Premiers et un secrétaire d’Etat effectuent le voyage : Charles Michel, Didier Reynders (Affaires étrangères), Alexander De Croo (Coopération au développement, Agenda numérique) et Theo Francken (Asile et Migration). Le Premier ministre arrive le dernier, ce lundi. L’atterrissage du chef du gouvernement a été retardé de quelques heures, « en raison de son emploi du temps en Belgique », selon son cabinet. Charles Michel zappera donc le « clou » de la première journée de cette longue semaine : un « événement de haut niveau », sur la « réforme de l’ONU » mis à l’agenda sans crier gare par le New-Yorkais le plus en vue cette année : le président des Etats-Unis Donald Trump, chantre isolationniste de l’« America First », qui effectue ses premiers pas à la tribune des Nations unies. Le Wavrien se rattrapera mardi soir, lors de la traditionnelle réception des chefs d’Etats des pays de l’ONU offerte par le couple présidentiel – ce ne sera pas à la Trump Tower, dit-on, pourtant voisine immédiate du siège des Nations unies. A cette imposante délégation ministérielle fondant sur le « Palais de verre » de l’ONU s’ajoute une brochette de conseillers diplomatiques et en communication – c’est important. «Un speed dating» diplomatique C’est que la Belgique joue son va-tout, cette année, dans les travées de l’AG, grand-messe du multilatéralisme (du moins, est-ce le but…), dans le temple mondial de la diplomatie. L’Assemblée générale, 72e du nom, offre la dernière occasion de marquer des points avant le vote, prévu au mois de mai prochain, pour décrocher un siège au Conseil de Sécurité, l’organe suprême de l’ONU, pour les années 2019-2020. L’Assemblée générale n’est pas la seule occasion de guigner des soutiens, mais c’est assurément « the place to be », un salon du « speed dating » diplomatique… La compétition est serrée : la Belgique fait face à deux solides concurrents, l’Allemagne et Israël. Trois pays sont donc en lice pour les deux sièges de membres non permanents alloués au « bloc occidental »… Ce n’est pas (seulement) pour la gloriole que le pays brigue ce poste, pour la sixième fois de son histoire. Cette expérience, expose au Soir Didier Reynders, apporte « une plus-value extraordinaire » à « l’expertise » d’un petit pays comme le nôtre, « reconnue dans le monde », « qui nous permet d’être écoutés en beaucoup d’endroits ». L’objectif à New York, où l’été indien contraste avec l’ultra-violence des ouragans récents qui ont balayé l’Amérique, c’est « de rencontrer l’ensemble des pays pour leur démontrer que nous sommes les meilleurs », résume, pince-sans-rire, une source diplomatique. Le programme belge Tous les prétextes seront bons. Du discours du Premier ministre – la planète devra attendre vendredi pour en prendre connaissance, trois jours après l’entame officielle de la longue litanie des prises de parole à la tribune, pays après pays – à quantité de rencontres bilatérales, participation à la myriade de « side events », « high level conference » ou autres opérations de charme. Prenez ce lundi. Alexander De Croo prend brièvement la parole en soirée au « Global Citizen Live ! », un show dans une salle de concert de la New York University dans Greenwich Village. Au programme : une performance de Paul Simon. Et l’Ecossaise Annie Lennox (Eurythmics), saluée pour son activisme humanitaire, recevra le George Harrison Award, du nom de feu le guitariste des Beatles, pilier d’un concert pour le Bangladesh en 1971. Didier Reynders, de son côté, entame son marathon de « dizaines » de bilatérales avec le Maroc et le Bhoutan, participe à une réunion des ministres des Affaires étrangères de la Francophonie, puis à une conférence sur les abus sexuels et prend la parole au lancement d’une « Alliance mondiale pour mettre fin au commerce des biens utilisés pour la torture et la peine capitale » – ce qui ne manque pas de piquant, aux Etats-Unis, qui pratiquent toujours ce châtiment infamant. Charles Michel, lui, est annoncé à la « Petite Abeille », un restaurant belge, l’une de ces success story dont raffole l’Amérique, qui popularise le moules-frites et les gaufres de Liège à Manhattan. Le Premier ministre viendra y vanter une « Belgique autrement phénoménale » : un cocktail afterwork pour quelques centaines d’invités et une campagne d’image de marque, à l’humour décalé typiquement belge, histoire de redorer le blason du pays après les attentats bruxellois du 22 mars 2016 – lesquels virent un certain candidat Trump qualifier la capitale de « trou à rats ». [scald=7671827:sdl_editor_representation] Theo Francken, lui, se concentre ce lundi sur ses accords « retours » (de réfugiés déboutés du droit d’asile) avec l’Irak. Toute cette agitation, donc, avec le Conseil de sécurité en ligne de mire. La Belgique s’y prépare. Il faudra renforcer la présence diplomatique à New York, multiplier les envoyés spéciaux. Paralysé par les veto russes sur l’atroce guerre en Syrie, où le régime puissamment secouru par Moscou s’est confronté à une pléthore de groupes rebelles plus ou moins parrainés de l’extérieur, le saint des saints onusien vient de s’illustrer par l’adoption d’une batterie de résolutions, unanimes cette fois, pour sanctionner la Corée du Nord, déterminée à se doter de l’arme atomique. Un sursaut sans lendemain ? « Non, estime le chef de la diplomatie belge. Car nous vivons dans un monde de conflits et c’est un Conseil de… sécurité. Son rôle est de plus en plus important. Et je crois que cela va malheureusement durer. »

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