La cour d’appel de Bruxelles libère un Soudanais: «Il n’y a pas eu de vérification des risques»
Le Premier ministre Charles Michel réaffirmait mardi que tout retour devait faire « l’objet d’un examen de conformité à l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme ».

La controverse soudanaise connaît un nouveau bouleversement. Dans un arrêt rendu jeudi, la cour d’appel de Bruxelles confirme la libération d’un Soudanais détenu au centre de Vottem. Le problème : il apparaît aux yeux de la cour que le secrétaire d’Etat n’a entrepris aucune démarche pour vérifier qu’un renvoi ne risquait pas d’exposer le rapatrié à un traitement inhumain ou dégradant (le fameux article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme). Et ce alors même que l’intéressé avait « fait état du danger que représent[ait] pour lui un retour au Soudan ».
« Vu les informations connues notoirement quant à la situation particulièrement alarmante au Soudan, le secrétaire d’Etat ne pouvait envisager un éloignement de X sans être assuré qu’il ne serait pas renvoyé vers un pays où il encourrait un risque réel d’être soumis à des traitements contraires à l’article 3 CEDH, juge l’arrêt. Il ne ressort d’aucun des éléments du dossier administratif qu’il aurait procédé à une vérification préalable à la prise de l’acte attaqué, ni même qu’X aurait disposé d’une possibilité effective de faire valoir son point de vue. »
Pour la cour, le secrétaire d’Etat qui avait connaissance d’une « situation générale au Soudan qui demeure préoccupante en raison des violations persistantes des droits de l’homme » aurait dû « à tout le moins entendre le ressortissant soudanais et ce nonobstant le fait qu’il n’a pas demandé l’asile en Belgique, ni le bénéfice d’une protection subsidiaire ».
Quelle « analyse du risque » évoquée par le Premier ministre ?
Mardi, le Premier ministre affirmait encore dans un long communiqué publié sur Facebook que « l’Office des étrangers est chargé de réaliser une analyse du risque éventuel de violation de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) interdisant les traitements inhumains et dégradants ». Insistant : « Tout retour doit faire l’objet d’un examen de conformité à l’article 3 de la CEDH, cela a été confirmé par le Directeur général de l’Office des étrangers. » C’est le cœur du dossier sur le rapatriement des Soudanais : déterminer si l’Office, qui est « chargé » de l’analyse des risques prend suffisamment de précautions. Or la cour d’appel pointe que l’analyse est… inexistante.
Dans l’entourage du Premier, on prend acte de la décision de justice « qui va à l’encontre d’autres arrêts » en faveur de l’administration et on rappelle que le CGRA a reçu un mandat large pour enquêter sur les rapatriements soudanais, en ce compris le traitement de l’article 3 par l’administration. « On verra en fonction des résultats de l’enquête s’il y a des leçons à tirer. »
Le cabinet de Theo Francken a souligné qu’il n’y avait pas d’uniformité dans l’interprétation des juges et qu’il se pourvoyait dès lors en cassation. Le Soudanais reste donc pour l’heure en centre.
> Un simple questionnaire pour analyser les risques : les explications sur Le Soir+
Pour poster un commentaire, merci de vous identifier.
Vous n’avez pas de compte ? Créez-le gratuitement ci-dessous :
S'identifier Créer un compteQuelques règles de bonne conduite avant de réagir16 Commentaires