Carrefour Belgique attend le plan stratégique du groupe

Carrefour n’est pas au mieux de sa forme. Le groupe, présent en France et en Europe mais aussi en Amérique latine et en Asie, s’est choisi à l’été dernier un nouveau « capitaine », Alexandre Bompard. Connu pour avoir restructuré Canal + dans les années 2000, puis la Fnac (qu’il a mariée à Darty il y a un peu plus de deux ans), celui-ci a dévoilé son plan stratégique le 23 janvier aux Français. Mais l’inquiétude grandit parmi les travailleurs du groupe, notamment en Belgique, où la rumeur évoque une possible restructuration. Ce ne serait pas la première. En 2010, Carrefour Belgique avait supprimé près de 1.700 emplois, fermé 14 hypermarchés et franchisé de nombreux supermarchés – une opération qui consiste à transférer la gestion à des exploitants indépendants, avec à la clef un gain en termes de coût (notamment salarial, puisque les travailleurs des magasins franchisés relèvent d’une commission paritaire différente, offrant des conditions de travail et de rémunération mois favorables). Cette restructuration officialisait l’échec du groupe français à redresser la barre de sa filiale belge. Carrefour est arrivé dans notre pays un peu par hasard. Lors de son mariage avec son concurrent hexagonal Promodès en 1998, le groupe découvre dans la dot une participation de 27,5 % dans GB, la division hyper et supermarchés du groupe belge GIB. GB est alors en perte de vitesse depuis une dizaine d’années, malgré une grosse restructuration (déjà !) en 1993. Deux ans plus tard, confiant dans son expertise, Carrefour rachète les 72,5 % restants. Mais les ventes ne redécollent pas ; et une première restructuration sous pavillon français intervient en 2007. Un marché difficile « Carrefour Belgique se poste mieux qu’il y a dix ans, tempère Gino Van Ossel, professeur à la Vlerick School et spécialiste de la distribution. Mais le marché est difficile, la concurrence sur les prix est rude, notamment de la part des hard-discounters Aldi et Lidl. Delhaize ne se porte pas mieux. Et si Colruyt continue à grignoter des parts de marché, sa marge est également sous pression. » [scald=12442375:sdl_editor_representation] Gino Van Ossel relativise également la stagnation du chiffre d’affaires de Carrefour en Belgique. « Le chiffre d’affaires ne correspond pas aux ventes sous l’enseigne. Les franchisés achètent auprès du franchiseur avec une remise ; et quand leur proportion augmente, l’impact est moindre sur le chiffre d’affaires du franchiseur, mais les coûts sont également moindres pour celui-ci. Ce n’est donc pas nécessairement négatif », explique-t-il. [scald=12442374:sdl_editor_representation] L’extension de la franchise reste d’ailleurs d’actualité. En Belgique, Carrefour exploite encore en direct un peu moins de 50 supermarchés (on parle dans ce cas de magasins « intégrés »). La cession d’une partie d’entre eux à des franchisés est une possibilité dans le cadre d’une restructuration – en Belgique, comme dans d’autres pays où le groupe français est présent. La sous-traitance de certains services centraux, comme les achats, auprès de partenaires extérieurs ou de la filiale française pourrait également être envisagée, ce qui toucherait alors les travailleurs du siège d’Evere. Le point faible « Le véritable point faible, ce sont les hypermarchés. Certains perdent de l’argent. Mais ce n’est pas propre à la Belgique. L’hypermarché, révolutionnaire en son temps parce qu’il offrait “tout sous le même toit”, a dû faire face au développement des chaînes spécialisées, comme Décathlon ou MediaMarkt, poursuit Gino Van Ossel. « Carrefour a également raté le coche de l’e-commerce », ajoute-t-il. Le groupe français tente d’ailleurs de rattraper son retard : ce vendredi, il a ainsi annoncé avoir racheté à Conforama sa part de 17 % dans le site de vente en ligne Showroomprivé. « Le concept d’hypermarché est certainement à réinventer. Sous-traiter certains rayons est une option. Dans les Makro, par exemple, c’est MediaMarkt qui vend les produits électroniques. Transformer le magasin peut également être bénéfique », explique le professeur de la Vlerick School, citant le succès de l’opération pour l’hyper Carrefour de Zemst. La direction de carrefour Belgique, pour sa part, ne faisait « aucun commentaire sur des rumeurs et des spéculations ». De toute façon, le signal viendra du grand patron français, qui, dit-on, a recentralisé la prise de décision à Paris. Et, côté syndical, Myriam Delmée, vice-président du Setca, en charge de la distribution, préfère attendre que le groupe dévoile ses batteries. Non sans cacher une inquiétude certaine.

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