Le sens du compromis «à la belge» en échange d’un siège au Conseil de sécurité

B âtir le consensus, agir pour la paix »… et rafler un siège grâce au sens du compromis à la belge. Le slogan de campagne choisi pour défendre la candidature de la Belgique, pour la période 2019-2020, au Conseil de sécurité de l’ONU, illustre raisonnablement les ambitions du pays. Ce ne serait pas la première fois que la Belgique siège à la table des membres non permanents. Avec cinq mandats à son actif, le pays n’a néanmoins plus occupé de siège depuis 2008. Lancée à l’automne 2015 à Bruxelles par le ministre des Affaires étrangères Didier Reynders, la campagne s’accélère, l’élection se tenant en juin 2018. Deux adversaires font face à la Belgique : l’Allemagne, qui a déjà siégé cinq fois, et Israël, qui tente sa chance pour la première fois. Trois candidats pour deux sièges disponibles dans le groupe des Etats occidentaux. Depuis Bruxelles, Bénédicte Frankinet, envoyée spéciale pour la candidature de la Belgique, fait valoir l’expérience belge au sein des Nations unies et veut convaincre un maximum de pays d’opter pour le royaume. En mettant en avant, donc, le compromis à la belge : « Nous soulignons notre expertise en matière de conciliation, basée sur notre expérience nationale. En diplomatie, autant onusienne qu’européenne, c’est une qualité recherchée », avance l’envoyée spéciale qui affirme également que la Belgique est « un membre très actif des Nations unies en général ». Faire entendre sa voix par « la diplomatie de couloir » Concrètement, un siège au Conseil de sécurité est synonyme de participation à la gouvernance du monde dans un des domaines les plus importants des relations internationales : le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Ce siège permettrait à la Belgique de pousser un cran plus loin la coopération avec d’autres Etats membres idéologiquement proches, tout en faisant entendre sa voix dans le cadre de ce qu’on appelle la « diplomatie de couloir », précise Eric David, professeur émérite de droit international à l’ULB : « Lors de discussions informelles à la cafétéria des Nations unies ou à l’occasion de cocktails divers, un membre non permanent du Conseil de sécurité est souvent sollicité par d’autres membres des Nations unies pour que le Conseil agisse dans tel ou tel sens . » Quelles sont les chances de la Belgique de l’emporter face à l’Allemagne et Israël ? La Belgique a déjà été élue à cinq reprises comme membre non permanent à raison d’un mandat presque tous les dix ans, rappelle Eric David. Il est raisonnable de penser qu’elle pourrait rempiler pour la période 2019-2020. La concurrence avec l’Allemagne, malgré son poids politique et économique plus important, n’apparaît pas insurmontable puisqu’il y a traditionnellement place pour deux Etats occidentaux au Conseil de sécurité. Reste Israël, petit nouveau dans le jeu diplomatique. « Il serait curieux, voire stupéfiant, que l’Assemblée générale des Nations Unies préfère à la Belgique un Etat qui, depuis 50 ans, désobéit systématiquement à la centaine de décisions du Conseil de sécurité lui demandant de se retirer des territoires palestiniens occupés », estime Eric David. Reste à savoir si Israël parviendra à surfer sur la vague Trump. Peu probable pour l’expert, qui préfère d’expérience, ne fermer aucune porte : « Il est vrai que l’Arabie saoudite a bien été élue au Conseil des droits de l’homme, en 2016, et que, comme le dit Alice au pays des merveilles, “quand tout est bizarre, il n’y a plus rien d’impossible” ».

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