Eddy Caekelberghs face à la polémique

Les auditeurs d’« Au bout du jour » (anciennement « Face à l’info ») sur La Première vont devoir se passer de la voix grave d’Eddy Caekelberghs pendant quelque temps. Combien ? Impossible à dire à ce stade, au moins jusqu’à la fin de la semaine, nous revient-il. Pour rappel, nos confrères de SudPresse ont dévoilé mercredi un mail polémique envoyé par le journaliste depuis son adresse professionnelle. Il y écrit à ses amis du Centre d’action laïque (CAL), dont il est membre, qu’il dispose d’un extrait vidéo où Louis Michel parle des réfugiés. « N’hésitons pas ! Viralisons avec un texte bien senti et court […] genre : “Qui a le droit de faire ça ?” dit Louis Michel en 2009 ! “Théo et Moi”, répond son fils en 2018 ! » Avertie, la RTBF a décidé de sa mise à l’écart de l’antenne. Une mesure qui s’inscrit dans le cadre d’une procédure prévue par le code déontologique propre au service public. Il prévoit à son article 11 que « les membres du personnel qui se seront engagés publiquement et de manière partisane dans un débat divisant l’opinion publique devront pendant le temps de la controverse – s’abstenir de traiter cette question sensible sur les services audiovisuels de la RTBF. » La direction de la RTBF ne souhaite pas s’exprimer avant la fin de la procédure. On apprend tout de même qu’Eddy Caekelberghs présentera son émission littéraire « Majuscules », dimanche après-midi sur La Première, puisqu’elle n’a aucun rapport avec les sujets qui ont créé la polémique. Une manière pour le service public de démontrer qu’il ne faut pas lire la suspension de l’antenne comme une « sanction ». Du moins, pas à ce stade. 1 Que reproche-t-on à Eddy Caekelberghs ? D’avoir pris une posture militante dans un mail envoyé depuis son adresse professionnelle. Jusqu’à preuve du contraire, c’est tout. Aucune plainte n’a été déposée au Conseil de déontologie journalistique (CDJ) l’accusant de faire de la propagande à l’antenne pour ses idées. 2 Est-ce une faute déontologique ? Le débat fait rage et l’enquête interne à la RTBF doit encore le démontrer. Pour le secrétaire général adjoint de l’Association des journalistes professionnels (AJP), Jean-François Dumont, il n’y a pas de faute. « Il s’agit d’un mail privé qui s’est retrouvé sur la place publique. Cette affaire n’en est devenue une que parce que le mail a été dévoilé dans la presse. Tout journaliste doit être jugé sur ses activités professionnelles. Que je sache, il n’a jamais été pris en défaut sur le choix de ses invités ou la manière dont il mène les débats. C’est sur les actes qu’il faut juger le comportement des journalistes. » Jean-Jacques Jespers, ancien présentateur du JT de la RTBF, professeur de déontologie à l’ULB et nouveau directeur du CDJ, est plus nuancé. Il rappelle qu’un journaliste ne doit pas mettre en péril la crédibilité et l’impartialité du média pour lequel il travaille. « Prendre position autour d’un thème controversé fait que l’on court un risque. Mais, il faut aussi rappeler que les journalistes sont aussi des citoyens qui ont le droit à la liberté d’expression. » Un argument sur lequel s’appuie Ricardo Gutiérrez, le Secrétaire général de la fédération des journalistes européens. « Ce qui me gêne, c’est qu’il soit suspendu de l’antenne directement et sans preuve. C’est une mesure qui me semble disproportionnée. Si on était sûr qu’il avait abusé de sa position à l’antenne pour mener une enquête militante, on pourrait le comprendre. On en est loin. C’est un mail à des contacts privés, dans le cadre de son adhésion à un courant philosophique. On sait qu’il a des convictions fortes, ce n’est pas nouveau. Il a le droit de les exprimer dans la sphère privée. » Pour Jean-Jacques Jespers, la faute déontologique n’est peut-être pas là où on le croit. « SudPresse a publié une communication privée, ce que la loi interdit. C’est peut-être ça, l’infraction dans cette affaire… » 3 Que va-t-il se passer ? L’enquête interne se poursuit à la RTBF. Eddy Caekelberghs devait avoir l’occasion de s’expliquer avec la direction. Il pourrait reprendre son émission quotidienne dès lundi, si l’affaire se tasse. Selon nos informations, son avocate, Carine Doutrelepont, aurait déjà adressé des courriers en vue de lever sa suspension de l’antenne. Elle n’a pas souhaité réagir à ce stade.

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