Remplacement des F-16: les entreprises belges espèrent gagner le jackpot

N ous avons la meilleure offre pour la Belgique. » Cette phrase, tant les représentants de Lockheed Martin que ceux de BAE Systems la claironnent depuis plusieurs mois afin de convaincre le gouvernement belge de les choisir pour remplacer les F-16 de l’armée belge. Outre les qualités de leur chasseur bombardier F-35 pour les premiers et du Typhoon Eurofighter pour les seconds, chacun se targue depuis des semaines d’offrir, à terme, la solution la plus rentable à la Belgique d’un point de vue économique. Aucun ne met en avant publiquement le prix de son avion. Par contre, Américains comme Britanniques annoncent à tour de bras avoir signé des protocoles d’accord avec des entreprises belges. Des actes qui se traduiraient en partenariats et en création d’emplois dans le cas où l’avionneur serait choisi par le gouvernement Michel. Plusieurs entreprises ont fait coup double et sont quasi certaines de rafler la mise puisqu’elles ont signé avec les deux candidats. Certaines ont même réellement assuré leurs arrières en se liant au troisième candidat, un peu hors-jeu : le français Dassault avec son Rafale. Plus de 20 entreprises belges ont conclu des accords avec BAE Systems en vue d’explorer les possibilités de collaboration éventuelles dans le cadre de la vaste proposition industrielle d’Eurofighter. La dernière à l’avoir fait, la semaine dernière, est Sabena Aerospace. Une semaine plus tôt, elle l’avait fait avec Lockheed Martin. Un jeu sur les deux tableaux Aux termes de l’accord signé avec Sabena Aerospace à Zaventem, BAE a annoncé que « les deux entreprises exploreront les possibilités de collaborer dans un certain nombre d’activités, dont certaines s’efforcent de servir les intérêts de sécurité essentiels de la Belgique. Les activités proposées comprennent une collaboration potentielle dans le développement de capacités de réparation, de maintenance et de support ainsi que le transfert de technologies, de savoir-faire et de propriété intellectuelle entre les deux entreprises. » Même son de cloche après la signature entre Sabena et Lockheed. Stéphane Burton, CEO de Sabena Aerospace, a en effet déclaré : « Nous sommes très enthousiastes à l’idée de renforcer notre collaboration avec Lockheed Martin. Nous croyons en effet que cela sera bénéfique pour la Belgique et son économie. Les propositions de Lockheed Martin pour répondre aux intérêts essentiels de sécurité assureront la continuité et le développement de nos opérations, ce qui est essentiel à la stratégie de croissance de Sabena Aerospace et au maintien de sa main-d’œuvre talentueuse. » Créée en 2017, par la Sonaca et Sabena Aerospace qui ont décidé d’unir leur expertise, la société Ignition ! offre des services innovants dans le domaine de l’aéronautique militaire. Elle aussi a opté pour un jeu sur les deux tableaux. L’accord passé entre Ignition ! et Lockheed Martin identifie des collaborations dans les aspects de la logistique, la maintenance des équipements et des avions et la formation des pilotes et des techniciens. Il est quasi le même avec BAE Systems. Des promesses Après la signature avec Lockheed Martin, Bernard Delvaux, cofondateur d’Ignition !, déclarait : « La signature de ce protocole d’accord est un pas en avant, qui démontre que Lockheed Martin considère Ignition ! comme un partenaire digne de confiance. Nous espérons que cela ouvrira la porte à d’autres engagements plus fermes avec Ignition ! mais aussi avec le groupe Sonaca, dans un avenir proche. » Après celui avec BAE Systems, son collègue Stéphane Burton estimait que « c’est un pas important en avant, qui démontre que BAE Systems considère Ignition ! comme un partenaire digne de confiance dans le domaine des entraînements et du soutien. Nous espérons avancer rapidement avec Ignition ! et BAE Systems dans le cadre de la collaboration européenne autour du programme Typhoon, qui est candidat au remplacement des F-16. » Au moins, pas de double langage. Implantée à Zaventem, l’entreprise Asco a également eu la même attitude. Lors de sa signature avec Asco, Lockheed Martin a promis à l’entreprise aéronautique belge du travail pour 400 personnes si la Belgique opte pour son chasseur F-35. C’était la première fois que le géant américain se montrait aussi précis dans les retours économiques qu’il pourrait offrir à une entreprise belge dans le cadre du remplacement des F-16. Jusqu’à présent, les Américains ne se focalisaient que sur la valeur militaire de leur chasseur bombardier. « Normal, réagit Sébastian Pirlot (PS), vice-président de la commission parlementaire en charge des achats militaires. Choisir le F-35 serait une catastrophe économique pour le pays. Son développement est terminé et il n’implique aucune entreprise belge. » Du côté des Britanniques de BAE, on se montre plus précis, allant jusqu’à « copier » les prévisions de retour avancées par les Français de Dassault (lire ci-dessous). « Nos propositions industrielles à la Belgique ont été analysées par Oxford Economics, cabinet de conseil mondial indépendant de premier plan, avancent-ils. En s’appuyant sur l’empreinte déjà bien établie du consortium Eurofighter en Belgique, les chiffres basés sur l’analyse montrent que nos propositions généreront une valeur économique supplémentaire estimée à 19,3 milliards d’euros d’ici à 2043, avec des effets multiplicateurs induits plus larges, tels que les avantages pour les économies localisées par le biais des salaires et traitements, créant 6,2 milliards d’euros supplémentaires. » « Grâce à un investissement important dans la recherche et le développement de technologies de fabrication et de matériaux de pointe, le choix de l’Eurofighter positionnera la Belgique en partenariat dans le cadre du lancement d’un programme de création d’un futur avion de combat européen, ponctuent les représentants de BAE. En outre, la création d’un réseau national Cyber Center en coopération avec le Royaume-Uni protégera des secteurs vitaux de l’économie belge et créera des cyber-spécialistes hautement qualifiés. » Un choix militaire et politique qui se veut donc aussi, et peut-être surtout, économique. Un choix est annoncé pour juillet Les experts ont deux mois pour analyser les offres qu’ils recevront ce mercredi. Un choix est annoncé pour juillet, à la veille d’un important sommet de l’Otan. Mais une autre voie est (peut-être) encore possible. Selon une analyse d’experts français, il est tout à fait loisible au gouvernement belge de suspendre son appel d’offres. Soit pour opter pour le Rafale ou pour choisir une voie alternative. De source gouvernementale, on n’exclut pas totalement cette option, même si ce n’est pas la plus probable : « C’est délicat, nous dit-on. Les Français ont décidé de ne pas participer à la procédure RFGP (sorte d’appel d’offres avec cahier des charges pour le remplacement des F-16, NDLR), en ne remettant pas d’offre . La question est donc de savoir ce qui est possible juridiquement. La Défense a demandé une étude et, pour le moment, la balance penche plutôt vers l’option que les Français se sont effectivement mis hors jeu. Mais eux nous adressent des notes juridiques disant l’inverse. Sachant que si on accepte l’offre française, il y a un risque majeur de recours des deux autres candidats, qui pourraient coûter cher. Donc, on doit aller au bout de l’analyse juridique avant l’appréciation politique. » Autrement dit : le Rafale n’est pas définitivement écarté, mais il n’est pas en bonne position… Une autre option encore n’est pas totalement exclue, sans avoir la cote : une solution transitoire, la reconfiguration de nos F-16 pour quelques années, avant un achat plus lointain. Mais ce scénario, « un plan B ou C qui circulait déjà voici un an », ne devrait se concrétiser que si « on est pris au piège du timing ou qu’un problème se pose ».

Votre compte

Remplacement des F-16: les entreprises belges espèrent gagner le jackpot

Découvrez la suite, 1€ pour 1 mois (sans engagement)

Avec cette offre, profitez de :

Le fil info

2 Commentaires

Aussi en Entreprises

Entretien Georges Gilkinet sur la hausse des prix des tickets de train: «Ce n’est pas un choix politique, mais l’application du contrat de gestion»

Liège Airport: le gouvernement wallon s’accorde sur le renouvellement du permis unique de l’aéroport

Renouvellement du permis de Liege Airport: pourquoi ça bloque

La Belgique va perdre une de ses bières trappistes: quelles conditions une trappiste doit-elle remplir?

skeyes franchit une étape cruciale pour le contrôle aérien des drones

Allez au-delà de l'actualité

À la Une

L’inflation en Belgique est en baisse à 8,05%

Manifestation: voici les perturbations attendues à Bruxelles ce mardi

Le train 9% plus cher, un mauvais signal?

Coronavirus: l’OMS maintient le niveau d’alerte maximal

Analyse Coupe du monde de hockey: une médaille d’argent au goût très amer pour les Red Lions

Aéroport de Liège: trois ours décèdent dans un avion cloué au sol par le froid

L’indemnité vélo pour tous les travailleurs belges dès le mois de mai

Quels sont les avantages du travail intérimaire ?

Température du bureau et pause sanitaire : vos droits en tant que travailleur

Les sections du site

Les services

Groupe Rossel