Ron Jans revient sur le choc wallon de 2012 (succès 2-6 au Mambourg) qui avait marqué son passage chez les Rouches: «Je n’imaginais pas l’impact d’un Charleroi-Standard»

Le Néerlandais Ron Jans a tenu 11 matches à la tête des Rouches avant d’être « coupé » par Roland Duchâtelet au lendemain d’une défaite à Mons. Son court règne a été marqué par un Clasico « fumant » contre Anderlecht et le 2-6 sur le terrain du Sporting de Charleroi, la pire défaite de l’histoire des Zèbres à domicile (à égalité avec un 0-4 en 74-75 et en 87-88). Pour revenir sur ce match du 19 août 2012, il nous a ouvert les portes de son domicile de Tynaarlo, petite bourgade campagnarde à quelques kilomètres de Groningue dans le nord des Pays-Bas. « Peu de journalistes ont droit à ce privilège », sourit-il au moment de se replonger dans le contexte du Standard, qu’il suit de loin. « La lutte reste passionnante pour cette fameuse 6e place, non ? Je reconnais cependant que je ne suis plus le championnat belge de près. Bien sûr, je vois passer les résultats et je tombe parfois sur l’un ou l’autre résumé de rencontre. Mais je ne connais pas les joueurs actuels. » Ce dimanche, le Standard se déplace à Charleroi, où vous aviez obtenu un résultat retentissant en 2012. Pouviez-vous imaginer l’importance de ce match ? C’est un de mes meilleurs moments au Standard et vous savez qu’ils n’ont pas été nombreux. Au moment de signer, je n’avais pas saisi l’impact d’un Charleroi-Standard. Je l’ai compris par la suite parce que je me suis plongé dans la culture footballistique belge. C’est peut-être aussi un bon souvenir parce que c’était un arbitre néerlandais (Bas Nijhuis) qui sifflait ce jour-là (rires). Aux Pays-Bas, personne ne réalise que c’est un derby encore plus électrique que Go Ahead-PEC Zwolle ou NEC-Vitesse Sportivement, ce n’est pas un Ajax-Feyenoord mais cela s’en rapproche sur le plan de l’agressivité. Quand je suis arrivé en Belgique, je pensais tout connaître du pays, qu’il y avait juste des problèmes existant entre les Wallons et les Flamands. C’est pourtant un match entre deux clubs wallons, je pensais que les relations étaient bonnes mais ce n’est pas le cas… Et vous ramenez un 2-6 qui plus est ! J’étais le meilleur entraîneur du monde à ce moment-là (rires). Aux réactions des supporters, j’ai vraiment pris conscience de ce que ça représentait. Au Standard, j’ai aussi connu Anderlecht, certainement le match le plus spécial qu’il m’a été donné de coacher. Et il y a cette victoire en déplacement à Charleroi. Je n’aurais pas voulu passer à côté de ces moments-là. J’ai été seulement limogé une fois, au Standard. Mais quand j’y repense, le plaisir revient à la surface malgré les résultats. Mon premier et mon dernier limogeage j’espère. Vous restez très positif sur vos quelques mois à la tête des Rouches. Mon agent m’avait averti quand est arrivée la proposition : le Standard était un club fantastique avec un énorme risque. J’ai relevé le défi et je n’en ai aucun regret. Aurais-je dû agir autrement là-bas ? Certains m’ont conseillé de réclamer des joueurs mais j’ai horreur des entraîneurs qui agissent comme cela. Le club m’avait dit qu’il allait recruter un défenseur central et deux attaquants. J’ai eu Biton, trop court pour le top, et Ogunjimi qui n’était pas fit. Ah si j’avais pu disposer de Kanu tout de suite et si j’avais fait confiance tout de suite à Ezekiel et Batshuayi… Avec le recul, j’aurais dû prendre un assistant supplémentaire. Travailler avec Peter Balette était formidable mais c’était aussi un homme de terrain. J’aurais eu besoin d’un analyste qui connaissait les joueurs du championnat de Belgique sur le bout des doigts. Aux Pays-Bas, je connais tout le monde. En Belgique, j’arrivais juste. Je suis sûr qu’il y avait moyen de faire quelque chose. C’est aussi facile de parler après-coup. C’est le passé, seul le présent m’intéresse. Revenons encore un peu à Charleroi-Standard et l’incident du drapeau planté par Pocognoli. J’en ai discuté avec lui après la rencontre. Ça, ce n’est pas ma façon d’agir. Remettre de l’huile sur le feu, je n’aime pas… mais je sais que les supporters liégeois ont trouvé ça fantastique ! Je lui ai dit : « OK Sébastien, tu as fait ce que tu as fait. En public, je ne vais pas te descendre en flammes mais sache que ça ne doit pas se reproduire. » Tu ne sais jamais ce que cela peut engendrer comme réactions par la suite. Depuis votre départ, pas moins de neuf entraîneurs ont occupé le poste de T1 à Sclessin. Si tu veux construire une équipe, tu as besoin de continuité. Le Standard est un beau club mais tout commence par la direction, qui doit développer une vision claire. En dépit du bon sens, les supporters liégeois veulent croire au titre et cela ne se réalise pas. Mais ce ne sera possible qu’avec un coach et des joueurs qui restent en place pendant un certain temps. Et voilà Charleroi 2e alors que le Standard devrait toujours être devant Charleroi. Le Sporting est le challenger le plus régulier de Bruges cette saison. Le club flambe-t-il ou est-il capable de s’installer dans la durée : les moyens n’étaient pas là à mon époque. Mais si vous me dites que Mazzù est en poste depuis 2013, on en revient à cette fameuse stabilité, largement absente avec cette valse des entraîneurs en Belgique. Le Standard a été plus patient avec Sa Pinto qu’avec vous. Aucune jalousie de ma part. J’ai aussi vu les images lors du match Anderlecht-Standard. Je sais ce que ce match peut engendrer comme émotions. C’était fou, cela ne devrait pas arriver. Aux Pays-Bas, nous avons aussi le Belge Stijn Vreven, un mec charmant au demeurant. Tu dois toujours garder la maîtrise mais je ne veux pas juger Sa Pinto : je ne le connais pas. Mais un entraîneur qui reste stoïque sur son banc tel un sphinx, sans la moindre émotion palpable, ne convient pas au Standard. Paul-José Mpoku et Sébastien Pocognoli sont revenus à Sclessin. C’est toujours bien d’avoir un noyau dur de joueurs qui ont un lien avec le club, qui peuvent véhiculer cette culture à l’entraînement, dans le vestiaire et pendant les matches, qui exigent le maximum d’eux-mêmes et des autres dans leur sillage. Regardez Goreux : il n’est pas le meilleur mais il était très bon dans ce rôle. J’ai apprécié de travailler aussi bien avec Mpoku qu’avec Pocognoli. Polo a dû toujours se battre énormément pour être considéré comme un indiscutable au sein du onze de base. Un bon joueur à qui il manque juste un peu d’explosivité. Mpoku est un motivateur, une personnalité mais il ne va pas faire la différence à chaque match. Quant à Poco, il a cette mentalité de vainqueur mais partout où il est allé à l’étranger, il n’a pas réussi hormis un peu à l’AZ. Sébastien est aussi un joueur qui se juge meilleur qu’il n’est en réalité. Vous avez recroisé la route du Standard il y a un an. Après un stage en Espagne avec Zwolle, nous retournions aux Pays-Bas et le Standard avait débarqué la veille. Piero Rossi et le docteur Jean Vervier étaient repassés le lendemain à l’aéroport pour moi. Fantastique.

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