A Bruxelles, tourisme et affaires font la paire
Bruxelles se plie en quatre pour accueillir les congressistes, réputés pour être plus dépensiers que les touristes « classiques ». Au plus grand congrès de médecine intensive du monde, les participants ne dérogent pas à la règle.


L es patients admis en urgence aux soins intensifs ne sont-ils pas trop nourris ? » ou « faut-il traiter les hémorragies cérébrales comme d’autres saignements actifs ? ». Autant de questions sur lesquelles les quelque 6.200 participants qui se bousculent actuellement dans les couloirs de l’Isicem vont avoir le plaisir de cogiter d’ici vendredi. Le plus grand symposium international des soins intensifs et la médecine d’urgence au monde se tient cette semaine entre les murs du Square, le palais des congrès de Bruxelles planté au beau milieu du Mont des Arts. Mais les participants de cette grand-messe médicale qui se tient sans relâche depuis 38 ans dans la capitale belge ne sont pas simplement là pour acheter les derniers bouquins des plus grands spécialistes mondiaux. Car, au-delà des soins, nos congressistes ont aussi la réputation de pratiquer des dépenses intensives.
Gros portefeuille
400 euros par jour. Un chiffre très fréquemment cité dans les milieux politiques et qui correspondrait à ce que dépense quotidiennement un touriste d’affaires, en comparaison aux 150 euros en moyenne que dépenserait le touriste de loisirs. Un chiffre qui témoignerait presque à lui seul de toute l’importance du secteur pour l’économie et l’emploi bruxellois, même s’il nécessite d’être pris avec des pincettes. Dans les couloirs de l’Isicem, les participants n’ont en tout cas pas trop de mal à parler ouvertement de leur porte-monnaie. Ni à confirmer qu’ils ne se coupent gère les cheveux en quatre quand il s’agit de dépenser de l’argent en voyage.
« Je viens ici tous les ans, et le prix des hôtels a grimpé de 300 % à cause du congrès. Donc ça rend la chose assez chère », constate John, jeune docteur australien, qui se considère déjà presque comme un habitué du congrès. Cela ne l’empêche néanmoins pas de dormir la nuit. « Je compte dépenser au moins 1.000 euros pour la semaine. On reçoit de l’argent de l’État australien pour couvrir cela, mais ce n’est pas le cas de la plupart des Européens. »
Les enchères peuvent encore monter. Le docteur saoudien Eyad Alsayed, spécialisé en anesthésie, pratique actuellement en Allemagne. « J’ai étendu mon séjour jusqu'à dimanche soir, au cas où je voudrais visiter quelqu’un ici » dit-il.« Je pense que la chose la plus chère pour moi a été l’hôtel, car j’ai choisi un endroit en plein centre de Bruxelles. Pour les 8 nuits de mon séjour ici, l’hôtel me coûte 1.500 euros. » Au total, coût de l’inscription compris (550 euros), le docteur prévoit de dépenser 2.500 euros sur sa semaine. On comprend également que les congrès sont particulièrement courtisés vu la régularité à laquelle leurs participants semblent revenir à Bruxelles. « Je viens ici tous les ans en mars » nous explique le docteur italien Sabino Scolleta. « Normalement, je viens deux jours en amont du congrès, car j’ai des relations à l’hôpital universitaire Erasme » poursuit-il. « Quand je viens ici, je dépense environ 2.500 euros. Peut-être 1.000 pour l’hôtel, 500 euros pour le congrès et un millier pour le reste, pour un total de 10 jours. »
Le temps révolu des visites à l’Hôtel de ville
Contrairement à ce que l’on aurait pu s’imaginer vu les moyens de la « cible », les efforts mis en place pour vendre Bruxelles sur les lieux du congrès restent assez modestes. Pas de stands de chocolat ou de programmes pour visiter les nombreux musées qui entourent le Mont des Arts, mais une discrète échoppe Visit.brussels. Pour Danaé et Sevgi, les deux étudiantes qui gardent les lieux, cette première matinée de congrès est assez calme. « Ce qui importe pour les gens, c’est de se procurer rapidement un guide ou un plan pour pouvoir se retrouver après le congrès. Après, des questions vraiment plus spécifiques, c’est surtout sur la restauration. Mais à part ça, c’est rare qu’on nous demande plus d’informations dans ce genre de congrès. »
En marge des allées du Square, on tombe sur le Baron Jean-Louis Vincent, grand maître de cérémonie de l’Isicem depuis 38 ans. Ce dernier semble un brin nostalgique d’une certaine époque où congrès rimait davantage avec détente en société, chose qui avait selon lui l’avantage de faire profiter davantage d’agents économiques locaux. « Avant, nous avions un petit programme social pour les participants, ce qui permettait effectivement de faire vivre l’une ou l’autre salle, des traiteurs etc. Mais maintenant, nous sommes sous une telle pression de la part du comité régulateur des congrès (NDLR : le MDEON, la plateforme déontologique de la santé) que l’on ne peut quasiment plus » raconte celui qui est aussi professeur de soins intensifs à l’ULB. «
Il y a deux ans, nous avions simplement mis en place une visite à l’Hôtel de ville de Bruxelles, en fin de journée. Ils nous ont dit “mais qu’est ce que c’est que cette histoire, vous ne pouvez plus faire ça ?” C’est moche quoi, on voudrait bien que les gens puissent un peu découvrir Bruxelles et qu’ils puissent apprécier la ville. Mais on a dû arrêter ça, car il faut, selon ces autorités, que l’on s’embête à un congrès. »
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