Quand échouer devient une aubaine
Âgé d’un an, le programme ReStart permet à des faillis de relancer une activité. Le support apporté est avant tout moral, mais aussi technique.


On a rarement autant lancé d’entreprises à Bruxelles. Si personne n’osera dire qu’il ne s’agit pas d’une bonne nouvelle, la hausse exceptionnelle du nombre de faillites que l’on observe actuellement au sein de la Région met en lumière un enjeu parallèle : celui de la pérennité des sociétés qui s’y créent. Actuellement, environ une nouvelle affaire sur deux ne vivra pas son 5e printemps, selon le 1819, le service de soutien aux entrepreneurs.
Échec un jour, échec toujours, pour les déçus ? Pas dit. La mentalité anglo-saxonne, selon laquelle un naufrage entrepreneurial peut être valorisé positivement, tente de se faire une place chez nous. Depuis un an, une structure a même été mise sur pied pour aider les entrepreneurs en faillite à rebondir. Fondateur de ce programme régional appelé « ReStart », Eric Vanden Bemden a lui-même connu une déconvenue professionnelle avant de se lancer dans l’accompagnement de projets. « Je viens du monde du fitness. J’ai tenu jusqu’à 3 centres de fitness par le passé et malheureusement, ce monde a été fortement touché par l’arrivée des centres low cost ». Aujourd’hui, la plateforme propose des modules d’accompagnement de 5 mois entièrement gratuits pour faillis en reconversion. « Il faut qu’au terme, chaque “restarter”, comme je les appelle, ait un projet professionnel à soumettre » explique le coordinateur. « Et ensuite, ils sont redirigés vers d’autres organismes d’aide à l’entrepreneuriat à Bruxelles. »
« Un soulagement »
Myriam Coutelier, qui a suivi le programme, accepte de revenir sur son parcours en dents de scie. Après avoir ouvert en 2013 un commerce de loisirs créatifs à Uccle avec une amie, elle a vu son affaire prendre l’eau rapidement suite à des travaux imprévus. « On a dû financer cela par les fonds propres de la société. Ça a plombé nos budgets de communication et de marketing, ce qui a fait qu’on a eu du mal à se faire connaître assez rapidement. » Après 3 ans de bataille pour maintenir la société à flot, c’est la banqueroute. « Quand on a déposé le bilan mon associée et moi, c’était un peu comme un soulagement ». Restait encore à régler l’épineuse question de la suite. « Mon associée a décidé de retourner travailler comme employée. Mais moi, je ne me voyais pas retourner dans une entreprise et j’avais déjà dans le coin de ma tête ce projet de consultance en organisation. » Deux ans après son échec, elle lance MyGO, sa boîte hébergée pour l’instant au sein d’une coopérative d’activité. « C’est bien d’avoir pu parler avec des personnes qui ont vécu la même chose que moi », dit-elle à propos de son passage par ReStart.
Fatima Tandja, également passé par la formation, acquiesce. Abandonnée par son associé qui a disparu dans la nature, elle a dû se résoudre à dissoudre son commerce de meubles de seconde main. « Dans une faillite, c’est surtout au niveau psychologique que tout se joue. On est tout le temps en train de culpabiliser, de se remettre en question, de chercher ou on a fauté. » Aujourd’hui, elle entend se reconvertir dans la vente de bijoux de luxe à prix abordable, en travaillant avec des créateurs basés au Nigeria, son pays natal.
La remise en confiance, c’est en effet la clé du programme, explique Eric Vanden Bemden. Il insiste néanmoins : les formations ne sont pas que basées sur la psychologie. « Vous avez des formations sur la gestion du stress ou la confiance en soi, mais aussi des formations plus techniques, par exemple, sur comment analyser un plan financier, réaliser des tableaux de bord, ou sur tout ce qui concerne les problèmes juridiques qui peuvent suivre une faillite… »
Même si une certaine prise de risque est encouragée, cela ne veut pas dire que tous les projets reçoivent la bénédiction des formateurs. « J’ai pour mémoire une fille qui, malheureusement, a fait faillite il y a près de deux ans et qui avait une agence de voyages. Et elle voulait absolument redémarrer une agence de voyages. Donc on a essayé de la dissuader, en lui suggérant, avec son expérience et son réseau, de se lancer plutôt comme indépendante et de travailler dans une agence déjà existante. »
Sur le plan des résultats, il faudra sans doute encore un peu de temps avant d’évaluer si le dispositif est capable de porter durablement ses fruits. Sur la cinquantaine de participants passés par ReStart depuis son lancement, dix personnes ont, selon Eric Van Bemden, relancé un business à ce jour.
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