1er mai: le travail n’est pas à la fête, et c’est un problème
Les motifs d’inquiétude ne manquent pas pour les salariés, en ce 1er mai.


Lidl, bpost, la fonction publique, après Deliveroo et Uber. Ce 1er mai, on ne peut pas dire que l’emploi soit à la fête. Pression sur les salariés au nom de la productivité (par une enseigne propriété d’une des plus grandes fortunes d’Allemagne), lassitude face aux économies à répétition, intentions nébuleuses sur les fins de carrière, statuts de plus en plus précaires, numérisation croissante… Les motifs d’inquiétude ne manquent pas pour les salariés. Si l’on ajoute le durcissement des régimes permettant de s’échapper de l’emploi (congés thématiques, maladies et invalidité), la carrière s’assimile de plus en plus à une longue marche sans perspective.
Certes, le tableau n’est pas complètement sombre. Les chiffres de l’emploi repartent à la hausse. Mais il ne suffit plus désormais de chanter « Job, job, job ». Il semble urgent de s’inquiéter de la qualité des postes créés. Car cette demande monte à présent de la société civile. Celle-là même qui constitue cette « armée » de travailleurs autant que le contingent de chômeurs qui signalent, par leur présence, le caractère interchangeable de la main-d’œuvre. Mieux concilier vie privée et vie professionnelle, ne plus perdre sa vie à la gagner, voilà autant de slogans qui s’ancrent maintenant dans l’opinion collective.
Et le politique aurait tort de faire la sourde oreille. Car le malaise du monde du travail est le même qui gagne la société civile. Celle-là même qui votera cette année et la suivante. Or si l’entreprise s’assimile à une vaste aventure collective quand les relations sociales y sont bien gérées, elle devient vite le théâtre de rapports de forces dès lors que la conflictualité prend le dessus. Et si la classe politique se meut en bras armé d’un camp au détriment de l’autre, elle perd cette crédibilité gagnée à se placer au-dessus de la mêlée.
Enfin et surtout, la question de la valeur travail reste essentielle. Elle est de celles qui permettent à une collectivité de « faire société ». Si le labeur quotidien redevient cette forme d’aliénation qu’il fut au XIXe et au début du XXe siècle, il risque de nourrir les pires ressentiments de ceux sans qui l’économie ne peut fonctionner : les travailleurs.
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S'identifier Créer un compteQuelques règles de bonne conduite avant de réagir5 Commentaires
Pascal Lorent, très bonne analyse et ô combien vraie et merci pour ce morceau de vérité, qui contraste merveilleusement avec les mensonges habituels de ce gouvernement de fantoches aux ordres de la Voka .
Je perçois dans votre éditorial beaucoup de sincérité, d'empathie pour le monde du travail. Mais cela ne suffit pas. Vous devez oser poser la question fondamentale : qu'est-ce que le travail dans nos sociétés capitalistes ? Dans nos économies capitaliste n'est reconnu comme travail que l'activité économique qui génère du profit pour les détenteurs des moyens de production, les capitalistes. Or, entre parenthèses, tout le monde reconnaît que la mère au foyer, le pensionné, le bénévole travaillent eux aussi, mais sans le statut ni les revenus des "vrais" travailleurs. Ceci dit, si vous adhérez au système capitaliste et si vous aspirez, malgré tout, à ce que "la valeur travail (...) soit de celles qui permettent de faire société", vous vous trouvez devant une impasse absolue, car les forces ne sont pas sur un pied d'égalité : d'un côté l'investissement capitaliste, en vue du profit, duquel dépend totalement le travailleur et sa force de travail. Nous sommes dans un rapport de forces inégal dans lequel le premier a "droit de vie ou de mort" -au sens propre et au sens figuré -sur le second. Les exemples foisonnent de restructurations, de délocalisations, de robotisations qui tuent les emplois et laissent les travailleurs sur le bord du chemin. Les exemples foisonnent de conditions de travail inhumaines que ce soit pour des cadres qui doivent être disponibles jour et nuit, qui sont pressés comme des citrons, qui doivent atteindre des objectifs d'excellence qui deviennent la norme une fois atteints dans une spirale infernale qui débouche sur ... le burn-out et le dégoût même du travail. Que ce soit pour tous les autres travailleurs qui oeuvrent dans l'entreprise, qui doivent respecter des cadences calculées au mètre ou à la seconde près (Lidl), qui ne perçoivent plus le sens de leur travail si ce n'est des intérêts financiers qui sont devenus l'unique préoccupation des capitalistes. Alors, pour en revenir à votre éditorial, qu'attendez-vous des responsables politiques ? S'ils adhèrent au système capitaliste, comme la plupart dans nos sociétés, ou bien ils sont du côté du profit capitaliste et mènent une politique qui le favorise en premier -c'est la situation actuelle en Belgique et en Europe- ou bien ils sont sensibles aux conditions des travailleurs -comme vous le suggérez dans votre éditorial- et assurent quelques aménagements sociaux dans une utopie sociale-démocrate. Utopie parce que la capitalisme a dépassé leur champ d'action. La mondialisation a ouvert un champ de bataille dans lequel nos petits soldats n'existent pas. Ils existent d'autant moins qu'ils se rallient, dans les faits, à des structures néo-libérales capitalistes qui dirigent l'Europe. Alors merci pour votre éditorial, il est humain ... et aveugle parce qu'il ne voit pas, il ne pose pas la question du capitaliste et de la subordination existentielle des travailleurs à sa recherche du profit.
Si demain un entrepreneur peut faire fonctionner son entreprise qu'avec des robots, Il le fera. Le but d'un entrepreneur n'est pas de mettre des gens au travail, mais de faire du profit.
Si demain un entrepreneur peut faire fonctionner son entreprise qu'avec des robots, Il le fera. Le but d'un entrepreneur n'est pas de mettre des gens au travail, mais de faire du profit.
En provenance directe de la cellule de propagande du PS. Comme d'habitude. A propos: "la question de la valeur travail reste essentielle". Le travail n'est pas une valeur. Lire ou relire Comte-Sponville à ce sujet.