Budget wallon: «Le gouvernement organise l’opacité»

Le parlement wallon entame ce lundi son marathon budgétaire. On connaît depuis le mois d’octobre les grandes lignes de l’exercice imposé au gouvernement PS-CDH : un déficit pour 2016 de l’ordre de 375 millions (il était encore de 555 millions au budget ajusté de 2015), mais « un périmètre flou » selon l’exécutif. Des incertitudes pèsent par exemple sur l’impact du « tax shift » fédéral sur les finances régionales ou sur le règlement du passif et du passé en matière d’infrastructures hospitalières, sur fond bien sûr de prévisions macroéconomiques fluctuantes. L’objectif du retour à l’équilibre en 2018, comme initialement prévu, semble de plus en plus difficile à atteindre. L’opposition tire à boulets rouges Mais une polémique va naître en ouverture des débats. Un détour s’impose par les observations de la Cour des Comptes à l’égard de ce projet de budget 2016. Sur la forme, ils sont assassins : l’institution se plaint de ne pas avoir reçu toutes les pièces utiles à la réalisation de l’analyse dont elle a la charge. Ce lundi, le MR tirera d’emblée à boulets rouges : « La Cour adresse une carte jaune très claire au gouvernement, commente Pierre-Yves Jeholet, le chef de groupe. L’attitude de l’exécutif va à l’encontre de toutes les promesses de transparence entendues jusqu’ici, notamment dans le chef de Christophe Lacroix, le ministre du Budget. » La Cour des Comptes se plaint de ne pas avoir reçu copie des propositions budgétaires formulées en début de processus par les administrations, comme elle l’avait demandé par courrier en février. « La plupart des directeurs généraux du service public de Wallonie ont refusé de communiquer ces éléments, arguant qu’il s’agissait de documents de travail n’ayant aucune valeur, déplore la Cour qui rappelle qu’elle est « habilitée à se faire communiquer tous documents et renseignements, de quelque nature que ce soit, relatifs à la gestion des entités qu’elle contrôle. » Cette fois, ce n’est pas le cas. L’institution de la rue Royale considère dans ces conditions « ne pas disposer de l’ensemble des informations nécessaires pour préparer ses analyses budgétaires en temps utile et exercer correctement sa mission d’examen des projets de budget au bénéfice du Parlement. » Pierre-Yves Jeholet ne mâche pas ses mots : « Ce gouvernement empêche la Cour de faire son travail. Il organise l’opacité. Nous lui laissions jusqu’à présent le bénéfice du doute, mais la situation est pire que sous l’exécutif précédent. L’équipe PS-CDH se signale plus que jamais par ses non-dits, ses secrets : la réalité de la dette, le cadastre des APE, les mandats publics et maintenant le budget. » « Poudre aux yeux » Cette brèche ouverte dans la méthode de travail du gouvernement permettra à coup sûr au MR de s’engouffrer dans les documents fournis par l’exécutif. « Il est déjà clair que de nombreuses divergences existent entre les notes de politique générale déposées récemment par les ministres et les budgets qu’ils vont défendre, poursuit Pierre-Yves Jeholet. La traduction chiffrée des ambitions affichées est décevante. On peut parler de poudre aux yeux. Les moyens ne suivent pas. On joue les riches mais on n’a pas le sou… C’est la valse à mille plans ! » Pour les libéraux, « les masques tombent par rapport aux promesses de 2015. » Le MR veut pousser un crime d’alarme : « La Wallonie vit au-dessus de ses moyens avec un endettement de vingt milliards de plus en plus inquiétant, enchaîne encore le chef de groupe. Le déficit annoncé pour 2016 est de 375 millions, mais il tient compte de mécanismes de solidarité qui sont transitoires et qui pèsent plus d’un milliard. Ces coups de pouce ne sont pas éternels. Que se passera-t-il ensuite ? » Plus classiquement, l’opposition libérale s’apprête encore à dénoncer l’absence d’avancées sur la rationalisation des innombrables outils régionaux ou les mesures qui entament le pouvoir d’achat (dont la future assurance autonomie rebaptisée taxe pour le financement des prestations sociales) : « Ces prélèvements ne sont plus à la marge », dit le MR.

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