Deux tiers des usagères des transports victimes d’attouchements

Dans les sondages, plus de deux Japonaises sur trois empruntant régulièrement les transports publics disent y avoir déjà subi des attouchements sexuels. Selon les statistiques de la police, la majorité des victimes (42 %) ont entre vingt et trente ans, mais les agresseurs s’en prennent également à des adolescents (28 %) ainsi qu’à des enfants âgés de moins de dix ans (1 %). Ils agissent parfois en loups solitaires, mais, fréquemment, ils échangent entre eux sur des listes de diffusion à accès restreint. La fréquentation de ces forums s’envole les jours où se tiennent les concours d’admission aux universités et aux grandes écoles. Ces matins-là, les jeunes filles candidates ne peuvent absolument pas se permettre d’arriver en retard à ces épreuves, sous peine de devoir attendre une année entière pour pouvoir se représenter. Dès lors, en cas d’attouchements dans les transports, très peu ont le temps de dénoncer leurs agresseurs, ce qui contraint à passer plusieurs heures au commissariat de police. Les agresseurs l’ont bien compris. Chaque année, la veille de ces concours, ils s’en donnent à cœur joie. S’échangent, fiévreux, des conseils sur les meilleures lignes, gares et heures pour passer à l’action. Etablissent des palmarès glauques des lieux de prédation idéaux en fonction notamment de la localisation des centres d’examen. Au Japon, les agressions sexuelles perpétrées dans les transports donnent lieu à environ 2.000 arrestations et mises en examen par an. Sans compter les quelque 300 cas annuels d’outrage aux bonnes mœurs (exhibition sexuelle, etc.) qui y sont commis. Il n’empêche, selon les enquêtes, tout comme seulement 5 % des Japonaises victimes de viol dénoncent leur agresseur, 90 % des usagères des transports ne portent pas plainte après avoir subi des attouchements. Les hommes invités à être « des super-héros » Aussi, depuis un an, pour lutter contre l’impunité dont jouissent nombre de harceleurs, des affiches, style manga, ont été placardées dans toutes les gares de Tokyo. Elles rappellent que les attouchements sexuels sont un crime et adjurent les usagers qui en sont témoins à ne pas fermer les yeux, comme c’est souvent le cas. Mais, au contraire, à se comporter comme « des super-héros » en se portant au secours des victimes. Plusieurs groupes ferroviaires commencent aussi à systématiser l’installation de caméras de vidéosurveillance dans les rames. C’est le cas par exemple, depuis le printemps, dans les 550 trains de la ligne tokyoïte Yamanote, la plus fréquentée de l’archipel. Ces dix dernières années, déjà, à l’échelle du pays tout entier, le nombre de caméras installées dans les gares et sur les quais a été multiplié par quatre. L’efficacité de telles mesures, toutefois, fait débat. Aux heures de pointe, les rames sont si bondées que même les meilleures caméras du monde peuvent difficilement repérer les mains s’égarant furtivement, les frottements un peu trop insistants. En outre, la capitale à elle seule compte pas moins de 760 gares. Les équiper toutes de caméras coûterait les yeux de la tête et exigerait des délais considérables. Aussi, la police a mis au point une application pour smartphone qui, grâce à un bouton d’alarme, permet aux femmes agressées de composer le numéro d’appel d’urgence et d’être assistées dans les plus brefs délais, leur téléphone étant géolocalisé. Plusieurs sociétés de transport envisagent aussi d’élargir les plages horaires pendant lesquelles certaines rames sont réservées aux femmes. Ce ne serait plus seulement le cas le matin et en fin d’après-midi, mais aussi à l’heure des derniers trains. Dans lesquels les agressions sexuelles sont fréquentes, perpétrées par des employés de bureau qui rentrent chez eux après des soirées entre collègues exagérément arrosées.

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