«La Belgique est un lieu extraordinaire et rare dans le monde»

La Monnaie, Bozar, Kanal, Cinematek : on ne va voir que vous pour cette rentrée culturelle à Bruxelles ? J’ai effectivement un peu peur, on verra ce qui se passe. On commence avec la Flûte Enchantée à la Monnaie. C’est un défi énorme car c’est un opéra plein de dangers. Mais cela vaut justement la peine de le faire car c’est du danger. Vous n’en ferez pas un opéra politique ? Chacun de nous peut trouver des résonances avec notre époque mais ce n’est pas mon travail « d’actualiser », comme on dit. Simplement c’est un travail pour trouver un autre point de vue sur le même objet, pour révéler d’autres aspects. J’ai découvert qu’au-delà du conte de fée, de la maçonnerie, de la symbolique et de l’Égypte, il y a vraiment une implantation idéologique, qui est le « hardcore » de cet opéra, liée à l’illuminisme mais pas seulement. Le noyau de la Flûte est une idéologie rare, liée avec un sentiment que peut-être personne ne reconnaîtra. C’est aussi un travail sur la structure, notamment la symétrie, qui joue un rôle fondamental dans cet opéra. La forme est le contenu, et donc il faut vraiment montrer qu’on est devant un prisme géométrique parfait. Le futur musée d’art contemporain Kanal vous a séduit ? J’ai déjà fait quelques visites, c’est un espace avec des vitres magnifiques. Il y a une « géomantica » comme on dit, dans ce lieu, c’est-à-dire que le signifié du lieu est déjà présent dès le départ, avec le canal, un quartier, Molenbeek, et ce lieu de voitures Citroën. Il faut travailler avec l’espace comme s’il s’agissait d’un personnage. Le titre de l’exposition est « La vita nuova ». Il y aura un grand discours, mais c’est mieux de ne pas dévoiler ce que j’imagine, car l’effet de surprise sera important. A Bozar enfin, vous allez dialoguer avec Théodoor Van Loon, le caravagiste ? Je l’ai découvert grâce à Sabine Van Sprang des Musées Royaux des Beaux-Arts, une experte raffinée de la peinture de la Renaissance. Mais je ne vais pas faire un travail sur Van Loon. Paul Dujardin m’a suggéré de combiner mon travail avec celui de ce peintre qui se réfère toujours à l’Italie et au baroque. Avec le baroque, né dans la période de la peste, il y a toujours un rapport avec la fleur de la maladie et donc avec le réel, ce qui permet de faire une connexion. Vous êtes un peu belge, finalement ? Oui (il rit). La Belgique est un lieu extraordinaire, vraiment. Contradictoire, mystérieux pour la richesse d’expression humaine, l’attention à la connaissance, la finesse qu’on y peut trouver. C’est un lieu rare dans le monde. Je ne le dis pas pour séduire mais parce que c’est la réalité qui me concerne. J’ai un rapport très fort à ce pays, à Bruxelles, avec des liens d’amitiés très intenses avec Myriam De Clopper du Singel (Anvers), qui est une vraie amie et confidente, au Kunstenfestivaldesarts avec Frye Leysen autrefois – j’ai commencé avec elle mon rapport avec la Belgique et partagé des moments les plus importants – et ensuite avec Christophe Slagmuylder, et puis évidemment avec la Monnaie et Peter de Caluwe avec qui j’ai commencé mon travail dans le champ de l’opéra. Nombre d’artistes que j’estime, vivent ici. J’ai un rapport d’une vraie « affinita elletiva » avec ce pays.

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