Tsipras, le Parlement européen et les leçons de la crise grecque

Depuis Strasbourg, Premier chef de gouvernement européen issu de la gauche radicale, le Grec Alexis Tsipras a vécu l’incroyable paradoxe d’avoir mis en œuvre, sous la pression implacable du reste de l’UE, le plus dur programme d’austérité et de réformes jamais appliqué à un État européen… [scald=23990874:sdl_editor_representation] L’exercice, en général très académique, du discours sur l’avenir de l’Europe était intéressant pour faire le bilan public et contradictoire de ce qui a été une épreuve pour la Grèce, mais aussi pour l’Union européenne. Celle-ci avait envisagé d’expulser le petit pays balkanique de la zone euro… [scald=23990871:sdl_editor_representation] « La sortie de la crise ne signifie pas que notre pays fait un retour vers le passé », a d’abord tenu à rassurer Alexis Tsipras, face à la crainte sourde des Européens que, leur souveraineté retrouvée, les dirigeants grecs n’en refassent à leur tête. Il faut se souvenir que la crise des dettes souveraines a démarré en 2010 lorsque la Grèce, dirigée par la droite, avait avoué avoir falsifié ses comptes publics pour participer au lancement de l’euro… « Notre intention est de ne pas répéter les erreurs ou les comportements qui ont mené à cette crise », a confirmé le leader de Syriza. Les travers européens Mais dans un speech inhabituellement sobre et bref, loin des logorrhées électorales habituelles des gauches radicales, Tsipras n’a pas manqué de tirer des conclusions dans lesquelles se reconnaîtront beaucoup de ceux qui s’interrogent sur le fonctionnement de l’UE. Notamment sur « l’échec de l’UE à trouver des solutions fonctionnelles et démocratiques, qui aurait pour effet le triomphe du chauvinisme et des conflits nationalistes. » [scald=23990872:sdl_editor_representation] La liste des travers de l’UE ? « Des décisions prises à huis clos par des organes informels qui éloignent l’UE des citoyens. Des dispositifs technocratiques comme la troïka qui détiennent les clés de la souveraineté et ne rendent compte à personne. » Quant au Parlement européen, temple théorique de la démocratie de l’UE, « il a joué un rôle secondaire derrière l’Eurogroupe ou les groupes technocrates comme la troïka ou la Banque centrale européenne. » Pour Alexis Tsipras, « (c’est) l’échec des économies néolibérales (qui) alimente les monstres du chauvinisme et du populisme d’extrême droite. » D’où l’importance des élections européennes de l’an prochain, qui seront « bien plus qu’une élection de plus : ce sera une bataille pour la défaite de valeurs du néolibéralisme qui menace l’Europe. Dans ce combat, toutes les forces démocratiques proeuroépennes doivent se retrouver du même côté de l’histoire, pour ne pas laisser l’Europe retourner dans son passé. » [scald=23990875:sdl_editor_representation] Premier à s’exprimer au nom d’un groupe politique – le PPE (droite traditionnelle) – l’Espagnol Esteban Gonzalez-Pons n’a pas fait dans la dentelle : il a attaqué Tsipras bille en tête, lui contestant le « courage » que le vice-président de la Commission européenne Dombrovskis (pourtant du PPE) venait de lui reconnaître. Les félicitations ne devraient, selon Gonzalez-Pons, être adressées qu’au peuple grec et « à l’Union européenne qui a sauvé votre pays ». L’eurodéputé espagnol tenait visiblement à profiter de l’occasion, en diminuant le mérite du Premier ministre grec, pour apporter un soutien du PPE à sa succursale hellénique, la Nouvelle démocratie, favorite des sondages. C’est oublier que la Nouvelle démocratie, qui a alterné au pouvoir avec les sociaux-démocrates, porte une grande responsabilité dans l’état de la Grèce, et que le dernier gouvernement, dirigé par Antonis Samaras, avait obstinément refusé de mener des réformes fondamentales. Notamment sur la perception de l’impôt, qui déplaisait à l’establishment grec habitué fervent de l’évasion fiscale… Discours de campagne Mais les conservateurs n’étaient pas les seuls à rebondir sur la Grèce pour lancer leurs premiers discours de campagne. Udo Bullman, chef du groupe S&D (sociaux-démocrates), qui a commencé par s’offusquer des attaques du PPE contre Tsipras, a recommandé à ce dernier d’aller « voir au Portugal » pour s’en inspirer. Explication : ce pays est gouverné par le social-démocrate Antonio Costa, appuyé par la gauche radicale, et est donné en exemple dans toute l’Europe pour avoir réussi à relancer l’économie de son pays, tout en préservant ses politiques sociales… Quant à Guy Verhofstadt, qui avait été extrêmement dur face à Alexis Tsipras lorsque celui-ci était venu à Strasbourg il y a trois ans lors d’un débat sur le sauvetage de la Grèce, il s’est excusé de l’être beaucoup moins, « car je dois me réserver pour Viktor Orban cet après-midi ». (La Hongrie fera l’objet d’un débat en présence de son Premier ministre, sur l’opportunité de lancer à son encontre une procédure de sanction pour violation de l’État de droit.) [scald=23990873:sdl_editor_representation] Cela n’a pas empêché le Belge, chef de file des libéraux européens, de reprocher au Grec que « l’ancien système est toujours en vigueur en Grèce », sans ouverture de marché, sans accès facilité aux professions protégées… « C’est comme la zone euro : l’ancienne zone euro est toujours en vigueur. Mais la Grèce, l’Italie et la zone euro seront menacées si nous ne profitons pas de la crise grecque pour réformer l’Union économique et monétaire. » Une Union « qui n’est pas prête à un nouveau choc financier », selon Verhofstadt. Tout le monde semble en fin de compte d’accord sur un seul constat : l’Europe n’a pas encore vraiment tiré toutes les leçons de la crise grecque et de la crise financière.

Votre compte

Tsipras, le Parlement européen et les leçons de la crise grecque

Découvrez la suite, 1€ pour 1 mois (sans engagement)

Avec cette offre, profitez de :

Le fil info

0 Commentaire

Aussi en Union Européenne

Volodymyr Zelensky à Bruxelles jeudi

Guerre en Ukraine: Zelensky se rendra à Bruxelles ce jeudi

Réforme des retraites, précarité étudiante… le récap’ européen de la semaine

De violentes tempêtes de neige sèment le chaos en Europe centrale

Qatargate: Niccolo Figa-Talamanca est libéré par le juge Claise

Allez au-delà de l'actualité

À la Une

Séismes en Turquie et Syrie: le bilan s’alourdit à plus de 5.000 morts

Le «big one», ce tremblement de terre hors norme qui va bientôt toucher Istanbul

Bruxelles: deux individus interpellés à la suite d’une opération dans le quartier européen

Comment l’inflation a réellement influencé notre consommation

Un jeune Belge sur cinq a déjà reçu une photo à caractère sexuel non désirée

Entretien Caroline Désir sur l’évaluation des profs: «On ne peut pas faire d’angélisme»

30 années au service d’une passion : le métier d’infirmière

Des soins intensifs polyvalents et à la pointe des technologies

L’indemnité vélo pour tous les travailleurs belges dès le mois de mai

Les sections du site

Les services

Groupe Rossel