Les émissions des automobiles donnent des vapeurs aux Belges

Il se passe toujours quelque chose en Europe. Mardi à Luxembourg, les ministres européens de l’Environnement se sont accordés sur la position que l’Union défendra à l’occasion du prochain sommet mondial sur le climat, en décembre à Katowice (Le Soir du 09/10). Ils devaient aussi prendre attitude sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre des automobiles. Pour le Parlement européen, elles doivent être réduites de 20 % en 2020 et de 40 % en 2030. Un vote a eu lieu en ce sens en séance plénière la semaine dernière. Une ligne rouge flottante Mais s’il se passe des choses en Europe, c’est aussi le cas en Belgique. Alors que notre pays n’avait pas dépêché de ministre pour le représenter à Luxembourg – ni Carlo Di Antonio (CDH, Environnement), ni Jean-Luc Crucke (MR, Energie) n’ont fait le déplacement, alors que la Wallonie occupe le siège belge – le navire a tangué toute la journée de mercredi. Comme prévu (Le Soir 09/10), l’Allemagne a exercé une intense pression sur certains de ses partenaires, dont la Belgique dit-on, martelant sa position : l’objectif de réduction des rejets automobiles ne devait pas dépasser 30 % en 2030. L’Allemagne plaidait aussi pour un minimum de contraintes sur le développement des voitures électriques. En cours de journée, l’axe franco-allemand complété par l’Espagne et l’Italie s’est aligné sur une position de compromis à -35 %. Restait à convaincre les pays se disant les plus ambitieux, dont la Belgique. Notre pays avait en effet fait sienne la position du Parlement. En concertation intrabelge, vendredi dernier, toutes les entités du pays avaient qualifié cette position de « ligne rouge ». Mais même rouge, une ligne semble faite pour se déplacer. Mercredi matin, le cabinet du Premier ministre Charles Michel (MR) a fait savoir à notre représentant auprès de l’Union que si notre pays restait sur sa position de principe, il ne s’opposerait pas à l’adoption d’un compromis. Lors d’une première prise de parole, notre représentant s’est donc exprimé en défendant la position belge de départ. Mais il était convenu qu’il se taise ensuite… L’Allemagne aurait-elle pris argument du besoin belge de mégawatts cet hiver pour faire évoluer la position de notre pays, comme l’affirme un diplomate relayé par un cabinet fédéral ? Rien ne le confirme. Il est seulement avéré que Charles Michel et Angela Merkel ont échangé sur ce sujet dimanche dernier. La courbe rentrante a en tout cas fait s’étrangler les cabinets des ministres régionaux. « Le cabinet du Premier a pris la main sur le dossier, un contact avec les ministres-présidents n’aurait pas été du luxe », grinçait-on. Le Soir n’a obtenu d’éclaircissement du côté du cabinet de la ministre fédérale du climat Marie-Christine Marghem (MR). De source gouvernementale, on confirme : « La Belgique maintient son objectif. Néanmoins, elle ne bloquera pas un compromis ». On affirme que « la discussion est concertée avec les Régions comme pour tout sujet européen ». Ni les ministres régionaux de l’environnement, ni les ministres-présidents n’auraient pourtant eu vent du changement de position avant qu’il intervienne. Une gifle Entre Bruxelles, Namur et Luxembourg, le téléphone a chauffé, les Régions refusant d’abord un changement de dernière minute dans la position belge. « La flexibilité laissée à l’ambassadeur pour la négociation ne se conçoit pas à la baisse », dit-on dans un cabinet wallon. « Elle n’est pas prévue pour altérer une position que la Belgique défend depuis plusieurs mois », ajoute un autre. Bref, mécontentement à tous les étages, y compris en Flandre. Hier soir, le débat européen s’est clôturé sur un objectif de -35 % en 2030, avec l’accord de la Belgique. On avait longuement pinaillé sur de derniers affaiblissements de l’objectif afin d’arracher le vote de pays de l’Est hébergeant des usines de montage. « Une véritable gifle, au lendemain de la publication du rapport du Giec », commente Julia Poliscanova, experte pour l’ONG Transport & Environment ; 94 % des émissions de gaz à effet de serre du transport sont dues au transport routier et parmi elles 74 % proviennent des voitures et des camionnettes

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