Gonzague Vandooren (ex-Standard): «Mogi Bayat emmerdait beaucoup de gens»

Gonzague Vandooren, c’est 106 matches joués pour l’Excel et 107 disputés sous la vareuse du Standard. Également passé par Genk, le solide attaquant de formation reconverti par la suite en défenseur a mis un terme à sa carrière en 2012, au Lierse. Désormais âgé de 39 ans, il est depuis devenu papa au foyer. Gonzague, la signature de votre premier contrat professionnel vous a directement fait découvrir certaines facettes néfastes du football. C’était le début des problèmes. À 17 ans, on vous offre un contrat professionnel, vous êtes content. Intégré dans le noyau d’Hugo Broos, je ne voulais pas être lésé, en étant payé 20 fois moins que mes coéquipiers. Je jouais et donc j’estimais pouvoir obtenir la même chose. Mon frère, six ans plus âgé que moi et totalement étranger au monde du football, a négocié avec Jean-Pierre Detremmerie et la direction. Mais on m’a alors dit que je pouvais faire mes affaires et rejoindre le noyau B… Bon, au final, je n’y suis jamais allé. Alors que j’étais encore en rhéto, on m’avait conseillé d’appeler un avocat, Maître Misson en l’occurrence. J’étais chez lui dans l’heure et le problème était réglé. Mais cela démontre bien comment des relations peuvent s’envenimer du jour au lendemain. Dans les heures qui ont suivi, je signais mon contrat avant de le prolonger de quelques années. Vous avez eu cette particularité de fonctionner sans agent. C’était mon frère qui s’occupait de mes intérêts. Après avoir signé mon premier contrat professionnel, je me voyais rester à Mouscron. Mais quelques mois plus tard, le club me vendait au Lierse. En tant que jeune joueur, je ne savais pas trop ce qui se passait. Vous êtes poussé vers la sortie. Je me rappelle, c’était Mortelmans qui avait fait l’affaire. Lors de mon passage du Standard vers Genk, j’ai encore fonctionné sans agent. Comme Maître Misson m’avait bien conseillé, je me suis retourné vers lui, il travaillait alors avec Maître Denis qui s’est penché sur mon cas. J’avais besoin de quelqu’un pour analyser les modalités exactes du contrat. Ça me permettait d’avoir une sécurité. Après coup, je me demande comment ça s’est finalement passé… Je préfère ne jamais savoir s’il y a des personnes qui se sont fait de l’argent sur mon dos. Pour ma part, je n’ai jamais été quelqu’un attiré par l’argent. Mortelmans, Denis, deux noms impliqués dans le Footbelgate. En effet. Personnellement, je n’ai pas eu de souci avec ces deux personnes. Quand Laurent Denis m’a aidé pour mon transfert, il avait déjà eu des ennuis avec La Louvière. Après, les gens évoluent, et pas toujours dans le sens que l’on aurait imaginé. C’est clair qu’à l’époque, je ne pensais pas qu’ils seraient impliqués dans de telles affaires. Pourquoi avez-vous finalement décidé de ne pas travailler avec des intermédiaires ? À partir du moment où tu fais tes matches, tu n’as besoin de personne. Je me suis donc reposé sur mes parents, sur l’avis de mon frère. Quand j’ai signé au Standard, je suis parti avec une personne issue de la presse. Le deal s’était bien passé avec Dominique D’Onofrio et Michel Preud’homme. Après, si un joueur a un problème avec un agent, c’est simple, il le dégage ! Ce qui est compliqué, c’est le fait que certains clubs ne travaillent qu’avec des agents bien spécifiques. Il y a du copinage. Mogi Bayat avait le monopole en Belgique. Il emmerdait beaucoup de gens. Certains se vengent. C’est un milieu pourri. Il faut mettre des normes pour les agents et les joueurs. J’ai des potes qui se sont lancés dans ce domaine. Je n’ai aucune crainte de les voir à Hasselt ! Quand vous êtes droits dans vos bottes, vous pouvez travailler dans le milieu, mais moi, ça ne m’intéresse pas. On me l’a pourtant proposé. Comment percevez-vous l’actualité récente, avec notamment les révélations concernant les commissions attribuées aux agents ? J’ai honte ! C’est scandaleux de voir de telles sommes, rien que pour le championnat de Belgique. Il faudrait plafonner les montants dans chaque pays. Je ne suis pas du tout surpris du système. Tous les clubs sont au courant que les agents veulent tirer un profit des transferts. Quand j’étais joueur, les salaires étaient moindres. Quand je vois que certains gagnent deux millions par an, c’est ridicule, d’autant plus que le niveau est exécrable. Au niveau des dérives dans le football, vous avez été servi avec votre deuxième passage au Lierse, un club marqué par l’affaire du Chinois… L’image du Lierse était d’ailleurs associée à tout jamais à cette histoire. Quand je suis retourné au club, Maged Samy avait pris la présidence. Il pensait alors que l’équipe tournerait en offrant des salaires monstrueux à des joueurs étrangers. C’était du grand n’importe quoi, de l’amateurisme complet. Nous étions 33 nationalités dans le vestiaire. Ce n’est pas en apportant de l’argent que vous constituez une bonne équipe. Il y avait pourtant des éléments talentueux : des Égyptiens, des Sud-Africains. Il faut une atmosphère, une ambiance dans un groupe. Les gars doivent s’habituer. Combien de fois ai-je vu des Africains ou d’autres qui galéraient et qui tiraient la tronche en période hivernale ? Même si le niveau n’est pas relevé, ce n’est pas si évident que ça de percer en Belgique. En 1998, le journaliste Stéphane Thirion déclarait dans Le Soir vous concernant que : « son profil physique, son discours et sa philosophie de la vie l’éloignent totalement des principes habituels décelés chez le footballeur professionnel. » Une philosophie que vous avez finalement su conserver durant l’ensemble de votre carrière. Je jouais au football car j’aimais me dépenser. Tout ce qui se trouve à côté, je m’en tape. J’y allais pour m’amuser, comme un jeune qui fait son truc. Entre 18 et 33 ans, je n’ai jamais eu de week-end. Je me trouvais toujours en décalage par rapport à la famille ou aux amis. Depuis que j’ai raccroché les crampons, je suis un homme au foyer. Comme ce mercredi, lors de votre visite, je m’occupe de mes enfants. Du temps, j’en ai, je pourrais le rentabiliser autrement aussi. On ne vous a jamais sollicité depuis que vous avez rangé les crampons, même à l’Excel ? Non, aucune sollicitation. J’irai pourtant aider Mouscron avec plaisir. En fait, ça me plairait même de retrouver l’ambiance d’un vestiaire et d’y remettre de l’ordre quand cela s’avère nécessaire. Je me suis proposé à Mouscron à un moment, lorsque le nom de Mbo Mpenza circulait, il y a un peu plus d’un an. J’avais alors sollicité Paul Allaerts, que j’ai rencontré. Je lui ai glissé que j’étais disponible. Pour travailler dans quel registre ? Peu importe. Mais je n’ai finalement pas eu de retour. Pourquoi la direction ne souhaite-t-elle pas faire revenir des anciens ? Ce serait top d’avoir un Alex Teklak comme directeur sportif et Adnan Custovic en tant que coach. Il y a encore moyen de faire un club sympa. Actuellement, l’organisation du club ne donne plus envie de le suivre. Mouscron reste notre ville. La situation est critique pour l’Excel. À quoi faut-il s’attendre désormais ? La situation est très compliquée… Cela fait trois ans que ça passe tout juste. Mais cette année, c’est tout de même la folie avec Zulte Waregem et Lokeren qui ne se trouvent qu’à un point, à ce moment-ci de la saison. Je ne veux pas cracher dans la soupe. J’espère de tout cœur que l’Excel se maintiendra. Mais là, ça risque d’être chaud. Il n’y a rien de positif. Et le changement d’entraîneur me laisse perplexe. De l’extérieur, est-ce que Bernd Storck, un coach allemand, peut véritablement faire quelque chose ? Apporter de la discipline, mais ce n’est pas le seul problème. Mes meilleures années mouscronnoises, c’est quand tu avais une bonne bande de potes. L’équipe était soudée. Nous avions tous la même vision. Si à l’Excel, ça ne marche pas, c’est suite à un manque de qualités ? Et alors, pour moi, ce n’est pas un problème si vous savez former un groupe. En revanche, au Standard, il y a une nouvelle ère qui s’ouvre avec le retour de Michel Preud’homme ? On en avait surtout parlé en équipe nationale dans un premier temps. Michel, c’est un top entraîneur. Il m’a véritablement marqué parce qu’il t’apportait la niaque tous les jours. Un coach pareil ne se trouve pas à tous les coins de la rue. Je n’en ai pas eu deux comme lui dans ma carrière. Il parvient à faire en sorte qu’un joueur se surpasse. Il s’inscrit parfaitement dans la fibre Standard. Si j’habitais plus près de Liège, je l’aurais déjà sollicité pour travailler sous ses ordres ! J’ai joué quatre ans à Sclessin, c’est plaisant d’y avoir joué. Mouscron, c’est mon jardin. Le Standard, la cerise sur le gâteau. J’avais le style de jeu qui faisait qu’on ne pouvait pas me reprocher un manque d’engagement.

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