Pourquoi l’offre d’IPM pour le rachat de L’Avenir s’adresse surtout au monde politique

A quelques jours d’une séance au Parlement wallon sur le sort des Editions de l’Avenir (EDA) et une semaine après l’annonce d’une procédure Renault chez celles-ci, l’éditeur de La Libre et de la DH se positionne dans le débat en cours. L’administrateur-délégué d’IPM, François le Hodey, a déclaré lundi dans les colonnes de ses journaux qu’il était prêt à racheter L’Avenir à Nethys et à laisser tomber le plan de licenciement collectif annoncé (60 suppressions d’emploi sur 250). « En mettant ensemble IPM et L’Avenir, on générerait de telles synergies positives que l’on éviterait de devoir passer par un plan Renault », affirme-t-il. Pour lui, le plan de restructuration actuellement sur la table est la preuve qu’il n’y a pas de synergies suffisantes entre un opérateur télécom (Voo, filiale de Nethys) et un groupe de presse. Comment IPM pourrait-il financer ce rachat, alors que ses finances sont dans le rouge depuis plusieurs années ? François le Hodey affirme que c’est possible se référant à la bonne santé de sa société de paris sportifs (Sagevas), aujourd’hui numéro trois sur le marché belge. Il voit dans la décision de Nethys de confier à son grand concurrent, le groupe Rossel (Le Soir, Sudpresse), l’impression des journaux de L’Avenir « une stratégie d’encerclement progressif » de la part de ce dernier. Et ne veut « pas se résoudre à voir L’Avenir tomber » dans ses mains. Pour lui, un rachat de L’Avenir par IPM permettrait d’obtenir un paysage concurrentiel plus équilibré. Au niveau du pluralisme de la presse, le problème resterait néanmoins entier puisque dans les deux cas, on passerait de trois à deux acteurs sur le marché. François le Hodey prétend néanmoins que la complémentarité entre les titres de L’Avenir et ceux d’IPM est plus grande qu’avec Rossel car La Libre et la DH sont des « médias nationaux », contrairement à Rossel qui détient un groupe de presse régionale (Sudpresse). Chez Rossel, on ne partage pas cette analyse, estimant que dans bien des endroits du pays, les éditions régionales de la DH sont en concurrence directe avec L’Avenir (Brabant wallon, Namur…) alors que les titres de Sudpresse (La Meuse, La Nouvelle gazette…) ne concurrencent L’Avenir qu’à Tournai et Verviers. La question ne se pose de toute façon pas pour l’instant puisque Nethys n’a, à ce stade, pas l’intention de vendre comme en témoigne le plan de transformation présenté aux syndicats en même temps que le plan de restructuration. Son patron, Stéphane Moreau, n’a sans doute pas intérêt à lâcher Voo ou L’Avenir avant d’être fixé sur le futur projet industriel de Nethys et sur le rôle qu’il pourra lui-même encore jouer… Toutes ces discussions entre la Région et la province de Liège (principal actionnaire de Nethys) ont peu de chance d’aboutir avant les élections régionales de mai 2019. En sortant publiquement, François le Hodey s’adresse donc surtout au monde politique. Ce faisant, il s’inscrit dans la même stratégie de communication que celle adoptée par Orange et Telenet. Eux aussi ont déclaré leur flamme à Voo par presse interposée. Le président de la société des rédacteurs (SDR) des EDA, Emmanuel Wilputte, s'est montré ouvert à la proposition du patron d’IPM. « On prend bonne note de cette offre. C'est la preuve qu'il y a des possibilités multiples de réorganisation de la presse belge », a-t-il déclaré à Belga. La SDR estime toutefois qu'une « temporisation » est nécessaire afin que« toutes les pistes soient analysées dans la sérénité ». Rossel n’a pas souhaité faire de commentaires. Nethys, de son côté, a affirmé que « L’Avenir n’est pas à vendre ».

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