Standard: Renaud Emond, (trop) seul sur son île

Renaud Emond débutera-t-il le match de jeudi à Zulte Waregem ? Si on pose aussi ouvertement la question, c’est parce qu’on connaît la réponse, qui est affirmative. La situation était moins claire en début de saison, lorsque Michel Preud’homme avait tenté, à plusieurs reprises, de relancer Orlando Sa. À l’Ajax et à Séville sur la scène européenne, mais aussi à Lokeren en championnat et contre Knokke en Coupe de Belgique, allant même jusqu’à modifier son schéma tactique à Eupen, en associant Sa et Emond en pointe. Sans résultat tangible. Là où, au départ, il variait les coups, espérant provoquer chez son attaquant portugais le déclic dont il avait besoin après une expérience ratée en Chine, l’entraîneur liégeois semble aujourd’hui s’être fait une religion. C’est que les deux dernières montées au jeu d’Orlando Sa ont été tout simplement catastrophiques, à Mouscron où il n’avait rien apporté, et plus encore face à Genk, dimanche lorsque, pour s’être engagé trop mollement dans un duel, le Lusitanien avait perdu un ballon que Pozuelo avait adressé dans la profondeur à Samatta sur le but d’ouverture limbourgeois. Du coup, Renaud Emond a fait, faute de combattants, le vide autour de lui, s’érigeant comme un pion essentiel sur l’échiquier de MPH. Parce que Sa, sur lequel tout le monde comptait à Sclessin, est transparent et, pire, ne donne même plus l’impression de vouloir se révolter pour conjurer le sort, mais aussi parce qu’il faudra encore quelques semaines à Obbi Oulare pour revenir dans le parcours. « Si je suis sur le terrain, c’est que je mérite », lâche l’attaquant gaumais. « J’ai tellement travaillé, tellement bataillé, pour pouvoir bénéficier de ce statut… » Un joueur généreux mais pas pleinement satisfait Emond n’est pourtant pas pleinement satisfait de son début de saison. « Huit buts, ce n’est pas mal, mais je pouvais faire mieux sur certaines situations », dit-il. « Je devrais avoir un ratio buts plus important ». Ce qui aurait été le cas, à titre exemplatif, si, à la mi-septembre, lors du choc wallon face à Charleroi, il avait converti les trois belles occasions qu’il s’était créées. Sans que Preud’homme ne daigne jamais le lui reprocher, conscient que s’il avait ce soir-là tout raté, son buteur avait à chaque fois été à la bonne place, ce qui était déjà positif à ses yeux. C’est qu’entre les deux, le courant est rapidement passé, MPH n’hésitant pas à louer la mentalité d’un joueur généreux qui, quel que soit le contexte, effectue toujours ses courses et parcourt ses kilomètres. Au point d’avoir acquis une certaine polyvalence puisqu’après avoir évolué en pointe, à droite et derrière l’attaquant (Carcela), Emond a été invité, dimanche face à Genk, à terminer la rencontre sur le flanc gauche, après quelques mots rapidement échangés avec Preud’homme. « Il m’a demandé si, physiquement, j’étais encore capable de suivre le back droit limbourgeois (Maehle). J’ai répondu par l’affirmative. Je suis un numéro 9 et c’est donc devant que je préfère évoluer, mais s’il faut dépanner, je le fais chaque fois avec plaisir… » Seul sur son île, sans concurrence actuellement, Renaud Emond attend avec impatience le retour aux affaires d’Oulare.« Cela ne peut nous faire que du bien. Obbi a un profil différent de celui d’Orlando Sa et de moi-même. La concurrence ne me fait pas peur. Parce que tout enchaîner est éprouvant, mais aussi parce qu’Obbi et moi pouvons être complémentaires, comme on l’a déjà montré à l’entraînement, lui pour conserver le ballon devant, moi pour tourner autour de lui ». Intelligent, bosseur et terriblement à l’écoute, Renaud Emond a pour lui un atout majeur : parce qu’il se connaît parfaitement, il sait jouer sur ses qualités. Être tout le temps en mouvement, multiplier les appels et plonger dans les espaces, plutôt que dribbler et faire la différence sur la vitesse, ce qui est moins dans ses cordes. Et surtout, être au bon endroit. « L’année 2018 est la meilleure de ma carrière, parce que j’ai été assez régulier et que je ne suis jamais resté très longtemps sans marquer », explique le Gaumais qui, snobé jadis par Ferrera, Jankovic et, au début de son règne, Sa Pinto, a déjà inscrit 22 buts, en 42 matches toutes compétitions confondues, depuis le début de l’année. Cela le situe, sur les dix premiers mois de 2018, à la deuxième place du classement des meilleurs artificiers du championnat belge derrière Harbaoui, à la nuance près, et elle est importante, que l’avant tunisien de Zulte Waregem avait inscrit 13 buts lors des 10 matches de Playoffs… 2, mais devant les attaquants genkois Trossard et Samatta (21), ainsi que du Brugeois Vanaken (15). Mieux encore, Emond carbure, depuis le début de l’année 2018 qui l’a vu prendre son envol, à une moyenne d’une réalisation toutes les 150 minutes de jeu. « J’ai la chance d’enchaîner les matches, mais ne me demandez pas combien de buts j’espère inscrire », conclut le numéro 9 de Sclessin. « Je n’ai jamais aimé me fixer d’objectifs chiffrés. Tout ce que je sais, c’est qu’à 26 ans, je progresse encore… »

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