Brexit: Dominic Raab, l’avocat du «no deal», sort de son ambiguïté en démissionnant

Depuis Londres, Musclé. L’adjectif sied à Dominic Raab à plus d’un titre. Solides épaules, large buste, les cheveux courts bien dégagés autour des oreilles : l’ex-ministre du Brexit de Theresa May, ceinture noire de karaté, est d’une apparence vigoureuse. Le successeur de David Davis est aussi adepte des déclarations coups de poing. La lettre de démission que le député de 44 ans a adressée jeudi matin à Theresa May ne déroge pas à la règle. Pour justifier sa décision de quitter le gouvernement, à un peu plus de quatre mois de la sortie programmée du pays de l’Union européenne, Dominic Raab évoque « le régime réglementaire proposé à l’Irlande du Nord » qui représente une « véritable menace pour l’intégrité du Royaume-Uni », selon lui. Mais le ministre démissionnaire ne s’est pas contenté de dénoncer le contenu du projet d’accord du Brexit. Il s’est attaqué directement à la Première ministre. Charge violente Entre les lignes, Dominic Raab a en effet accusé Theresa May d’avoir trahi la volonté des Britanniques et failli à ses responsabilités de leader de la majorité conservatrice. « Par dessus tout, je ne peux pas m’accommoder des conditions contenues dans le projet d’accord car elles sont inconciliables avec les promesses que nous avons faites au pays lors des dernières élections », a affirmé l’élu conservateur dans sa lettre coup de poing. La charge contre Theresa May est très violente. Elle a d’ailleurs suscité une réaction toute aussi agressive de la part du ministre chargé des Affaires écossaises. Interviewé sur ITV News sur la démission, David Mundell a affirmé qu’il n’avait « pas de leçon à recevoir d’un opportuniste ». Opportuniste, Raab l’est sans aucun doute. Pendant les premiers jours qui avaient suivi sa nomination à la tête du ministère du Brexit en juillet dernier, cet avocat de formation s’était montré ferme envers les membres les plus radicaux de son propre camp. Devant la Chambre des Communes, le 12 juillet dernier, l’ex-ministre du Brexit avait défendu le très controversé accord de Chequers, déclarant que celui-ci permettrait aux Britanniques d’« obtenir le Brexit qu’ils souhaitent ». Dans un même élan, à peine nommé, l’impétueux quadragénaire avait également menacé Bruxelles de ne pas régler la facture du divorce si les deux parties ne trouvent pas d’accord commercial d’ici le 29 mars prochain alors que, sept mois plus tôt, Theresa May avait accepté un accord financier d’un montant de 39 à 44 millions d’euros. « Un sandwich bacon/laitue » Dominic Raab a-t-il jamais été déterminé à obtenir un accord de la part de Bruxelles ? Ses défenseurs diront qu’il n’en a pas eu l’opportunité. La place de négociateur du Royaume-Uni était déjà occupée depuis longtemps par le haut fonctionnaire britannique Olly Robbins. D’ailleurs, peu de temps après sa nomination et ses propos musclés à l’égard de Bruxelles, M.Raab avait même été rétrogradé par Theresa May au rôle de préparateur en chef du « no deal ». Rétrogradé ou promu ? On ne saurait dire étant donné la décontraction, voire la zénitude, avec laquelle le « Brexiter » semble envisager l’impact d’une sortie sans accord du Royaume-Uni de l’Union européenne sur la vie quotidienne des Britanniques après le 29 mars prochain. « Contrairement aux affirmations les plus farfelues, vous pourrez toujours vous régaler d’un sandwich au bacon et à la laitue après le Brexit », avait déclaré, goguenard, Dominic Raab en août dernier en dévoilant les premières fiches techniques du gouvernement consacrées au « no deal ». « Nous n’avons pas l’intention de déployer l’armée pour distribuer de la nourriture », avait promis le (désormais ex-) ministre de Theresa May.

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