La mission au Maroc encourage l’entrepreneuriat féminin

Pour une mission économique au Maroc qui avait décidé de mettre l’emphase sur les femmes, ces dernières étaient finalement peu représentées parmi les entreprises présentes. Seules environ cinquante des 200 d’entre elles venues prospecter à Casablanca avaient une femme ou plus dans leur délégation. Parmi elle, Hinde Boulbayem, CEO de l’entreprise Sumy, spécialisée en logistique écologique et transport durable. Elle explique la faible présence du sexe féminin au perchoir des entreprises par la difficulté à obtenir un crédit lorsque l’on est une femme. Une faiblesse nationale… « Dans les grandes banques, on pose trois questions : quel est votre âge ? Êtes-vous mariée ? Avez-vous des enfants ? », nous raconte-t-elle dans l’avion qui ramène la mission à Casablanca, après une brève escale à Tanger. Il y a cinq ans, quand elle a voulu lancer son entreprise, à 33 ans, ayant convolé un an plus tôt et sans enfant, elle n’a pas trouvé de financement bancaire. « Les banques ont conclu que je pourrais tomber enceinte sous peu ». Un véritable red flag. Fille d’immigrés marocains, son profil était encore plus fragile, puisqu’elle n’avait pas « pas de famille en Belgique avec de grands patrimoines » pour la soutenir en cas de pépin. Ses parents sont arrivés en France dans les années 60, puis ont déménagé à Bruxelles où elle est née vingt ans plus tard. Cinq ans plus tard, elle est à la tête d’une entreprise de 25 personnes, qui compte les Tartes de Françoise parmi ses clients. [scald=25900214:sdl_editor_representation] Dans ses contacts, on s’attend rarement d’emblée à ce qu’elle soit CEO de son entreprise. « Un jour, j’ai demandé à l’organisateur d’un événement auquel je participais ce qui justifiait son coût exorbitant. Il m’a répondu « où est le problème ? C’est votre patron qui paie ». C’est aussi le manque de considération qui lancera Thouria Louhmadi, CEO d’Astel Medica. Arrivée en Belgique pour ses études à l’université, elle finit par étudier la biologie, faute de place pour les étudiants étrangers en médecine. « Je ne comptais y rester qu’un an puis reprendre la médecine, mais le domaine m’a tellement plu que j’y suis restée », se souvient-elle depuis le 27e étage du Kenzi Tower Hotel, où l’Awex tenait une réception. Elle tombe ensuite enceinte à la fin de sa première année à Liège et voit dans la foulée ses parents lui couper les vivres. A la suite d’un cursus précaire où elle doit mener de front les petits boulots pour payer la crèche de sa fille et ses études, elle finit par obtenir un poste dans une firme pharmaceutique en Belgique. Ce n’est qu’au moment où ses supérieurs refusent de commercialiser la bactérie qu’elle a découverte à l’université, un « placebo » selon eux, qu’elle décide de prendre la porte. Elle emploie aujourd’hui une quarantaine de personnes et réalise un chiffre d’affaires annuel de plusieurs millions d’euros. Pendant la mission, elle a signé un accord de commercialisation avec un distributeur local, depuis le pays d’où elle partait, parfois à douze ans, en cargo pour suivre les produits alimentaires exportés par sa famille vers l’Europe. … un atout à l’international Parmi les rares femmes des entreprises de la mission, Yesmina Hantout, directrice de Yes4. Seule de sa famille à être née en Belgique, elle est à la tête d’une entreprise qui « fait la passerelle pour les entreprises qui souhaitent tenter leur chance à Tanger », parce que ses « anciens sont de là. J’ai pas mal de réseaux sur place ». Les réseaux, tout l’enjeu de ce type de missions. « Ceux qui se constituent sont des soutiens pour les femmes qui souhaitent s’internationaliser », explique Cécile Jodogne. C’est pourquoi la plateforme bruxelloise Women in business a signé un accord de partenariat avec une organisation locale. Une étude récente du cabinet Roland Berger estime que 25 % des femmes actives en Afrique créent leur propre entreprise. Et qu’elles produisent 65 % de la richesse du continent. Une raison de plus, s’il en faut, de miser sur elle.

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