La tragédie des réfugiés expliquée aux enfants

Le monde s’apprête à débarquer en Belgique. Géographiquement parlant – Cameroun, Lituanie, Serbie, Australie ou Géorgie sont invités au Festival de Liège – mais aussi philosophiquement puisque chaque spectacle vient triturer un petit bout de notre société, raviver des pans sensibles de notre présent, ou de notre passé. Comme l’histoire des « bébés volés » sous la dictature franquiste ( Ciné de la Tristura), l’identité transgenre ( MDLSK de Motus) ou encore les nationalismes et la guerre en ex-Yougoslavie ( Jami Distrikt ). Politique et engagé, le Festival de Liège se targue depuis toujours d’interroger notre époque. « En ces temps troubles que nous traversons, où l’impensable d’hier fait désormais partie du possible, ces temps de repli sur soi, de folies meurtrières, d’exclusions et d’anathèmes, d’affirmations identitaires barbares, il nous semble impérieux de transgresser nos propres frontières, d’aller à la rencontre de l’autre et des autres, de croiser des regards étrangers, de nous engager dans des chemins incertains et des territoires inconnus », s’enflamme Jean-Louis Colinet, directeur du Festival de Liège. [scald=26101142:sdl_editor_representation] Petite nouveauté de cette toute fraîche édition sur le point de débuter : s’adresser aussi aux enfants. Parce qu’il n’y a pas d’âge pour tenter de comprendre les soubresauts du monde, le Festival de Liège innove en accueillant un spectacle familial, pour un public dès 8 ans : Au-delà de la forêt, le monde de la compagnie portugaise Formiga Atómica, un intitulé que l’on pourrait traduire par Fourmi Atomique. De fait, leur spectacle fourmille de petites idées à la puissance nucléaire pour raconter le destin de Farid, jeune garçon afghan forcé à l’exil vers l’Europe. Présenté dans le In du dernier Festival d’Avignon, ce conte de 45 minutes résume avec une infinie douceur le sort de ces migrants qui alimentent le triste fil de l’actualité. Si Miguel Fragata et Inês Barahona se sont abondamment documentés en amont, leur pièce laisse finalement de côté les statistiques pour se concentrer sur le voyage d’un seul, Farid, depuis les adieux dans les bras de sa mère en Afghanistan, inquiète de la menace des Talibans, jusqu’aux rives hostiles de l’Angleterre, via Calais, en passant par les périls de la mer Méditerranée. [scald=26101143:sdl_editor_representation] Un large tapis oriental, une gigantesque carte du monde et une montagne de valises suffisent aux deux comédiennes pour nous propulser sur les talons de Farid, petite dizaine d’années, parti rejoindre son frère en Europe. Le déchirement quand il faut laisser derrière soi son pays, sa famille, ses repères. La résilience quand il faut résister à la faim, au froid, à la solitude. L’ébahissement au moment de découvrir d’autres cultures. La fatigue quand on a 6.000 kilomètres dans les pattes. Le sentiment de veine et d’arbitraire quand on échappe au naufrage en mer et aux extorsions de passeurs sans scrupule. Les camps de réfugiés, la jungle de Calais, le droit d’asile, les bureaux d’immigration : le spectacle désamorce une foule de thématiques que les enfants auront entendues au détour des JT, le tout avec pédagogie mais surtout avec un imaginaire volontiers bricolé. L’émotion ne peut que vous étreindre quand la comédienne renverse une valise à jouets pour raconter l’histoire d’un enfant grandi trop vite justement. Un autre coffre s’ouvrira sur un mini-bassin méditerranéen où un canot pneumatique miniature revisite des drames qui n’ont hélas rien de minuscule. Simple et poignante, la pièce sensibilisera les enfants au sort d’autres, du même âge, que la guerre ou la misère ont privé d’enfance. Les 8 et 9 février à la salle B5 / St-Luc (Liège).

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