La comédie musicale «Cats», toujours aussi mythique

Pour la première fois depuis sa création, en 1981, la version originale de Cats, comédie musicale mythique de la scène londonienne, débarquera à Bruxelles en mars, pour huit représentations. Elle avait déjà été vue à Ostende en 2013 et Anvers en 2017. « Une success story » Il y a trente-huit ans, personne ou presque ne croyait en ce projet jugé trop loufoque, reposant sur des poèmes de T.S. Eliot qui mettaient en scène une communauté de chats. Andrew Lloyd Webber, le compositeur, dut même mettre sa maison en hypothèque. On connaît la suite : le spectacle tiendral’affiche près de 9.000 fois à Londres, 7.485 fois à Broadway (New York). Le spectacle aura tourné, depuis, dans plus de 350 villes, vingt pays, et aura été vu par plus de 80 millions de spectateurs. Nous étions à Rotterdam, fin janvier, pour assister depuis les coulisses aux préparatifs de ce classique, qui emploie aujourd’hui 57 personnes, dont vingt-deux artistes sur scène, de nombreuses doublures et cinq « swings » (NDLR : le swing est un artiste connaissant de nombreux rôles du spectacle et capable de remplacer au pied-levé un collègue souffrant). Veerle Hoppenbrouwers, qui assure la production de la tournée de Cats dans le Benelux, insiste sur le risque financier d’une telle entreprise.« L’obligation de rentabilité est très grande, c’est un spectacle extrêmement coûteux. Du coup, c’est très risqué en termes de production. Mais l’enthousiasme ne s’est jamais démenti . » Derrière la chatière Quelques heures avant la représentation du soir, nous retrouvons Dane Quixhall, “resident director”. C’est lui qui gère le spectacle en tournée, au jour le jour, après la première. Lui qui, donc, intègre, les changements de dernière minute. Qui décide chaque jour vers 16h qui fera partie de la distribution. S’il y a des malades, des absents, il fera appel aux « swings ». L’homme nous fait la visite des lieux. Costumes, perruques, maquillage, le studio de l’orchestre, « backstage », les loges des artistes, le décor… Particularité de ce show, nous dit-il : les artistes se maquillent eux-mêmes. Travail de précision, assez fastidieux, qui prend une petite heure. Nous assistons à la métamorphose d’une des danseuses du spectacle, Ella Nonini, qui sous nos yeux se transforme lentement, comme à pas de velours, en chat. Le make-up a lieu généralement autour de 17h30. Après quoi les artistes, qui vont être confrontés à un éprouvant effort physique, partent s’échauffer, avant d’aller manger. [scald=26109346:sdl_editor_representation] Certains artistes de Cats ont des profils de danseurs, comme Ella. D’autres sont avant tout des chanteurs. C’est le cas de John Ellis, trente-huit ans, né en même temps que Cats. Le seul Australien de la bande, c’est lui. Il campe l’un des personnages principaux, Old Deuteronomy, le patriarche de la communauté des chats. Ellis, qui a fait carrière dans le chant classique, est un ténor naturel mais a, sur Cats, une voix de baryton. Il porte durant tout le spectacle un costume aussi lourd que chaud. Son outil le plus précieux : sa voix, qu’il doit entretenir sans cesse. « Une telle tournée est très fatigante pour la voix. Surtout là, en hiver, en Europe. Autant dire que je préfère l’été, en Asie… » John Ellis connaît la relativité de son destin. « Avant, on ne savait pas quoi faire de moi. Je suis très grand, avec une voix assez haute. J’ai passé ma vie à essuyer des refus à travers des auditions. Et ici, pour Cats, après trois minutes d’audition, j’ai eu le rôle . » [scald=26109345:sdl_editor_representation] Dans le rôle de Grizabella, centrale dans l’histoire de Cats, Jenna Lee. Qui se définit, elle, d’abord comme une actrice « qui s’efforce de chanter », dit-elle modestement. Ses interventions vocales, sur le célèbre « Memory », qui firent jadis la gloire de Barbra Streisand, filent le frisson. « Chaque soir, je ressens une émotion dingue sur scène », particulièrement au moment de son chant final, qu’elle finit régulièrement en larmes. « Cats est un monument national, à Londres », dit-elle. Seul le costume de Grizabella a été retouché, depuis 1981. Grizabella est une jolie femelle sur le retour, qui a vécu, souffert, roulé sa bosse aux quatre coins du monde, et qui tente vainement un come-back, dans une société frileuse. Jenna Lee et John Ellis voient dans la fable de Cats une parabole politique. Pour eux, Grizabella symbolise aujourd’hui l’altérité qui fait peur et que l’on rejette. « Ca pourrait être une femme ostracisée dans un camp de réfugiés. » Si on a du mal à se passionner pour le livret, un peu tarabiscoté, on est ravi par l’originalité du spectacle, qui mêlerait sur fond de baroque kitsch (le décor ressemble à un garage préhistorique) un zeste de glam, une pincée de Bowie (années 70), un chouia de l’esprit des Muppet Show et une cuillerée de sentimentalisme. On est aussi conquis par la qualité exceptionnelle des artistes, danseurs, et chanteurs – les Anglais sont des maîtres en la matière. On est enfin séduit par la partition musicale, aussi insolite que disparate, faisant place à du jazz (le divin « Macavity »), à du classique et même à une touche de mélo. Du 19 au 24 mars, Palais 12, Avenue de Miramar, Bruxelles. Infos : www.catsmusical.be et www.ticketmaster.be Ticketmaster : 0900-40850.

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