«La chance d’adapter un auteur vivant»

Polar impressionniste, Nymphéas noirs sème la jalousie et la mort dans les rues de Giverny, le village du jardin d’eau de Claude Monet, le peintre de la lumière et des couleurs. Entre 1883 et 1926, l’artiste a créé dans son atelier de Giverny ses plus grands chefs-d’œuvre. Quand débute le roman, le maître s’en est allé. Une légende rapporte qu’il aurait peint une dernière toile avant de mourir, semée de nymphéas noirs… Le scénariste Fred Duval nous raconte comment il a adapté ce roman noir en bande dessinée avec la complicité de son auteur, Michel Bussi, et du dessinateur Didier Cassegrain. Qu’est-ce qui vous a décidé à tenter l’adaptation casse-gueule de ce best-seller ? Le défi m’intéressait et Michel Bussi habite la même ville que moi. Il rêvait de voir son livre adapté en bande dessinée. On lui avait dit que c’était mission impossible. Je pensais le contraire, parce que la bande dessinée pratique l’art de l’ellipse. J’étais certain que ça permettrait de rendre le récit fluide. Le village de Giverny, figé et hors du temps, était un décor parfait pour cette histoire où les gens s’aiment, se détestent, s’entre-tuent… La principale difficulté était de donner corps aux personnages dans cet univers impressionniste. Didier Cassegrain, qui sortait d’un épisode de Conan, a accepté de se lancer dans l’aventure après avoir lu et apprécié le roman. Plus que les nymphéas, ce sont les personnages qui habitent ce roman graphique haletant ? Dès que le lecteur est immergé dans l’atmosphère de Giverny, les cadrages se resserrent en effet sur les personnages. On joue du mystère dans les entre-cases. On donne l’impression de voyager à Giverny mais c’est pour vivre un rêve éveillé. Le plaisir est dans la couleur que la bande dessinée apporte au roman. Les jeux de regards sont aussi extrêmement importants… Pour pouvoir raconter cette histoire, il fallait commencer par se libérer du poids artistique de Claude Monet ? Didier Cassegrain a ouvert le récit par une immense case du bassin des nymphéas, de sorte que le lecteur était d’emblée plongé dedans pour pouvoir les oublier ensuite. L’album ne devait pas ressembler à une promenade au pays de Monet. On s’est beaucoup baladé à Giverny. On a pris énormément de photos pendant ces repérages. Le grand moulin habité par l’un de nos personnages, par exemple, existe toujours. C’est une chambre d’hôtes. On a rassemblé quantité d’indices très précis pour s’imprégner de l’ambiance du village mais c’était pour mieux s’en détacher ensuite. L’auteur du roman, Michel Bussi, vous a suivis pas à pas ? C’est un vrai fan de bande dessinée. Il voue une admiration profonde à Jean Van Hamme, l’auteur de XIII et de Thorgal. Il adore comme moi le Silence de Didier Comès et les Philémon de Fred. Il rêvait de lire son roman en bande dessinée. Je lui envoyais les découpages de la BD au fur et à mesure. Nous avons eu un véritable échange sur le travail d’adaptation. J’ai ratiboisé pas mal ses dialogues originaux mais tout en essayant de garder les petits bouts auxquels il tenait le plus. Le roman s’est vendu à plus de 700.000 exemplaires, un tirage qui donne le tournis ? Un de ses autres romans, Un avion sans elle, a même atteint le million et demi d’exemplaires vendus. On peut parler de ventes exceptionnelles. Je pense que seul Astérix fait mieux ! J’ai bien entendu senti ce poids sur mes épaules, d’autant que la réussite littéraire n’est pas forcément un gage de succès en bande dessinée. Précédemment, je m’étais déjà frotté à Molière avec Tartuffe, mais ici, j’ai la chance d’adapter un auteur vivant, de l’avoir à mes côtés pour m’aider à comprendre toutes les strates de l’histoire. Didier Cassegrain sera en dédicace à la Foire, samedi 16 et dimanche 17, de 12 à 14 heures sur le stand Dupuis (333). [scald=26116279:sdl_editor_representation]

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