Accord européen pour une protection des lanceurs d’alerte

Presque cinq ans après le scandale Luxleaks et la bataille judiciaire menée par celui qui l’a révélé au grand jour, Antoine Deltour, poursuivi pour avoir dérobé les documents du scandale à PwC, les Européens se sont accordés sur une protection transversale pour les lanceurs d’alerte. [scald=26188961:sdl_editor_representation] « Les débats ont été assez vifs pour savoir à quelles conditions cette protection sera accordable », a expliqué l’eurodéputée française Virginie Rozière, qui pilotait la négociation au nom du Parlement européen face au Conseil (aux Etats membres). La fin de la négociation, qui a duré une partie de la nuit, a en effet tourné autour des canaux vers lesquels une personne pouvait se tourner pour « siffler l’alerte ». Les Etats membres voulaient établir une hiérarchie obligatoire à suivre pour bénéficier de la protection : d’abord tenter une révélation en interne, au sein de l’entreprise, par exemple, puis aux autorités, puis seulement si ces canaux n’ont pas été efficaces, dans la presse. « On a réussi à ne pas avoir d’obligation stricte de signaler en interne pour bénéficier de la protection », a expliqué l’eurodéputée, ajoutant qu’il faudrait privilégier une révélation « in-house » « à chaque fois que c’est possible et quand c’est une voie envisageable », mais cela ne conditionnera pas l’accès à la protection. La divulgation publique sera possible « dans les cas exceptionnels et en cas de périls imminents ou de dysfonctionnement manifeste du canal interne », a-t-elle dit. Il faudra que le lanceur d’alerte fasse valoir qu’il croyait « de bonne foi » à ce dysfonctionnement. Minorité de blocage rétrécie Le compromis a été possible après que la minorité de blocage au sein du Conseil a commencé à se rétrécir autour de la France et de l’Allemagne. Une discussion politique entre ministres de la justice vendredi dernier avait en effet vu l’Italie, les Pays-Bas et l’Allemagne adoucir leur position. « A partir du moment où la minorité de blocage n’était plus là, la dynamique de négociation était plutôt dans notre sens », a expliqué Virginie Rozière. Par contre, pour encourager à procéder en premier lieu à un signalement en interne, les entreprises dès 50 employés sont appelées à mettre en place ce type de canaux. Le Parlement voulait fixer ce seuil plus haut pour encourager les potentiels lanceurs d’alerte à se tourner vers l’extérieur. Une personne obtiendra la protection qu’elle soit stagiaire, consultante, salariée, ou encore sous-traitante d’une organisation. Si les Etats, poussés par les juristes du Conseil, avaient tergiversé sur la place des révélations sur l’optimisation fiscale (pas illégale en soi), la mouture finale précise bien que seront couverts « les arrangements dont le but est d’obtenir un avantage fiscal qui va à l’encontre de l’objectif de la loi sur l’impôt des sociétés ». Ce qui signifie que les révélations d’Antoine Deltour seraient tombées dans ce champ. Les révélations sur les marchés publics, la protection des données, la sécurité alimentaire… Les documents classifiés, la violation du secret professionnel des médecins ou encore du secret judiciaire ne seront pas couverts. Une exception à la protection est aussi prévue pour les révélations liées à des questions de sécurité nationale. [scald=26188962:sdl_editor_representation] Les lanceurs d’alerte seront protégés des représailles au travail et ne « devront pas être considérés en violation de la règle de restriction de divulgation d’informations imposée dans le contrat (de travail) ou par des dispositions législatives ou administratives », dit le texte.

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