Un Brexit plus ou moins reporté

Les divergences ne portent pas tant sur le fond, mais plutôt sur la tactique et l’interprétation politique des événements », expliquait un diplomate européen quelques heures avant le début du sommet européen extraordinaire sur le Brexit convoqué ce mercredi soir à Bruxelles. Dès leurs arrivées respectives, il avait suffi d’entendre successivement le président français Macron et la chancelière allemande Merkel, pour capter que même s’il ne s’agit que « d’appréciation », la différence est tout de même notable. [scald=26255380:sdl_editor_representation] « Je viens avec beaucoup d’impatience, et rien n’est acquis pour moi, surtout quand j’entends parler d’extension longue », avait mis en garde Emmanuel Macron. La question : faut-il accorder à Theresa May seulement un report du Brexit de deux ou trois mois – elle demande l’échéance du 30 juin –, le temps dont elle dit avoir besoin pour faire ratifier l’accord de retrait ou trouver des solutions alternatives ? Ou mieux vaut-il, comme l’a proposé le président du Conseil Donald Tusk, accorder ou imposer d’emblée à Londres un report d’un an ou presque ? Angela Merkel s’est quant à elle montrée beaucoup plus compréhensive vis-à-vis du Royaume-Uni, insistant sur le fait que « la priorité est d’assurer une sortie ordonnée » de cet État membre sur le départ, et d’éviter aux 27 d’avoir à se réunir toutes les trois ou quatre semaines pour envisager de nouveaux reports. Et clairement, le nombre de dirigeants résignés à cette ligne souple apparaissait prédominant, à l’instar du Luxembourgeois Bettel assurant qu’il « n’en a pas marre », même s’il « attend Godot et espère le rencontrer un jour ». [scald=26255382:sdl_editor_representation] Les espoirs de Theresa May En introduction au Conseil européen formel, les 27 ont d’abord entendu la Première ministre britannique pendant un peu plus d’une heure, laquelle devait leur expliquer l’importance inédite du dialogue qu’elle a entamé avec le chef de l’opposition travailliste, et ses espoirs que ces pourparlers débouchent peut-être sur un accord qui lui assurerait une majorité en faveur de « son » accord de sortie qu’elle a négocié et conclu avec l’UE. Report court ou long ? « Aucun pays ne s’oppose à un report long », rapportaient plusieurs sources diplomatiques après la dernière réunion préparatoire qui s’était déroulée ce mardi soir, « même si un groupe de pays reste plus favorable à l’option brève ». [scald=26255381:sdl_editor_representation] La différence d’appréciation politique portait désormais sur ceci : la pression exercée sur les députés britanniques afin qu’ils ratifient l’accord sera-t-elle plus forte si on leur accorde une « extension » courte, comme on l’a généralement considéré jusqu’à une période récente, ou au contraire seront-ils plus motivés à le faire à brève échéance sous la menace d’une extension longue, synonyme d’enlisement et peut-être même, à terme, d’abandon du Brexit ? Toujours est-il que, alors que la discussion à 27 venait de commencer, plusieurs options de nouvelles dates butoirs restaient sur la table : le 30 juin, soit la veille de l’installation du parlement européen issu des urnes fin mai prochain ; le 31 décembre ; et le 31 mars 2020… Par ailleurs, le projet de conclusions soumis aux chefs d’État ou de gouvernement prévoyait des « garanties » devant assurer que, s’il reste membre de l’UE après avoir participé au scrutin européen, le Royaume-Uni ne pourra bloquer les décisions des 27. Un article de ce texte, qui devait encore être « boosté » en cours de réunion, prévoyait que « les 27 États membres et la Commission continueront à se rencontrer séparément pour débattre de la situation postérieure au retrait du Royaume-Uni ». Un autre passage du projet de conclusions rappelait au Royaume-Uni son obligation de « coopération sincère » fixée par les traités européens : « A cet effet, le Royaume-Uni facilitera la réalisation des tâches de l’Union et se retiendra de toute mesure qui pourrait mettre en danger l’atteinte des objectifs de l’UR. » Une façon feutrée de demander à Londres l’engagement le plus clair possible de ne pas entraver les travaux futurs de l’Union, tout en sachant parfaitement que les 27 ne disposent strictement d’aucun moyen légal pour réduire les pouvoirs d’un État qui, tant qu’il restera membre, disposera des mêmes droits et devoirs que tous les autres. Ce sujet-là promettait encore, au moment où cette édition était bouclée, de chaudes discussions nocturnes entre les 27. ►Retrouvez tous les articles sur le Brexit

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