L’Union européenne prête à riposter dans le conflit Airbus/Boeing

C’est un conflit entre les Européens et les Américains vieux de 15 ans qui frôle à nouveau l’escalade, intensifiant davantage les tensions commerciales qui opposent les deux côtés de l’Atlantique. L’Union européenne a soumis à consultation, ce mercredi, une liste de produits américains (qui représentent 20 milliards de dollars d’importations US en Europe) qu’elle se réserve le droit de taxer en riposte aux subventions américaines au géant Boeing. La semaine dernière, les États-Unis avaient fait de même, dénonçant les aides publiques accordées par les Européens à Airbus. [scald=26272754:sdl_editor_representation] [scald=26272707:sdl_editor_representation] S’ils mettent leurs menaces à exécution, chaque côté de l’Atlantique appuiera où cela fait mal. C’est-à-dire principalement l’agriculture. Ainsi, l’UE entend imposer des taxes punitives sur le poisson surgelé, le ketchup, le cheddar, les oignons frits, le vin, à tout un tas de sortes de noix, sur le café, cacao, jus d’orange congelé, sacs à main, valises, tracteurs, hélicoptères, tables de casino, consoles de jeux vidéos, importés en Europe depuis les États-Unis. Les Américains, eux, prévoient les taxes punitives sur les yaourts, l’huile d’olive, les maillots de bain, les céramiques, les moules, les confitures, les combinaisons de ski, les balances électriques ou encore les horloges murales d’Europe. [scald=26272705:sdl_editor_representation] Dans la liste américaine, qui représente à peu près 11 milliards d’importations européennes, sept concernent les vins et les spiritueux, un milliard le fromage et 1,2 milliard l’huile d’olive, expliquait ce mercredi, une source européenne. Le chiffre de 11 milliards, défini par les Américains, correspond aux dommages qu’ils estiment que leur industrie aéronautique a subi en raison des aides européennes à Airbus. [scald=26272706:sdl_editor_representation] Une dizaine d’années de conflit Tout commence en 2004. A l’époque, les Américains ont contesté, devant l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) des aides publiques européennes, particulièrement les « avances récupérables » octroyées par les Européens à Airbus. Comme l’explique notre source européenne, ces aides étaient destinées à financier partiellement les projets risqués d’Airbus et ne devaient pas être remboursées si ces projets échouaient. En 2011, l’OMC a conclu que l’UE avait fourni à Airbus des subsides à hauteur de 18 milliards de dollars entre 1968 et 2006. Selon les Américains, ces avances récupérables ont été déterminantes dans le lancement des avions civils d’Airbus. Toujours selon eux, en conséquence, les ventes de plus de 300 avions sont passées sous le nez de Boeing. En mai 2018, l’OMC a conclu que les aides au lancement de l’A350 XWB et de l’A380 d’Airbus ont causé des pertes pour les ventes du Boeing 787 et 747. Les Américains ont donc demandé à l’OMC de pouvoir imposer des mesures punitives à hauteur de 11,2 milliards par an aux produits européens et attendent sa réponse sur le montant. Ce que l’UE a dit trouver « exagéré ». [scald=26272704:sdl_editor_representation] Pas une vengeance L’UE estime de son côté que les aides américaines octroyées à Boeing ont causé quasiment le même montant de dommages à l’industrie européenne. Le 11 avril dernier, l’OMC a confirmé que les États-Unis n’avaient pas pris les mesures adéquates pour se conformer aux précédentes décisions au sujet des aides en question. Au centre des plaintes européennes, le régime fiscal avantageux de l’État de Washington. Celui-ci est d’application jusqu’à 2040. Il est estimé que de « 2006 à 2040, Boeing recevra au total six milliards de dollars sous forme d’économies d’impôts », explique la Commission européenne. « Soyons clairs, il ne s’agit pas de rendre coup pour coup. Même si nous devons préparer des contre-mesures dans l’éventualité où il n’y aurait pas d’autre issue, je continue de penser que le dialogue est la solution qui devrait s’imposer entre des partenaires importants comme l’UE et les États-Unis, y compris pour mettre un terme à ce long différend. L’UE reste ouverte à des discussions avec les États-Unis, pour autant qu’aucun préalable ne soit posé et qu’une issue équitable soit recherchée », a déclaré la commissaire européenne au commerce, la Suédoise Cecilia Malmström. Notre source a par ailleurs indiqué que les taxes américaines sur les éléments d’avion allaient faire mal à l’usine d’Airbus en Alabama et menacer l’emploi local. Contexte tendu Ces nouvelles menaces mutuelles interviennent quasiment un an après que l’administration Trump a décidé de taxer l’acier et l’aluminium. L’UE a riposté en imposant des taxes punitives sur les Harley Davidson, le Bourbon, le beurre de cacahuète ou encore les jeans. Deux jours plus tôt, l’UE avait approuvé l’ouverture de négociations commerciales au mandat limité avec les États-Unis. « Nous sommes contre les guerres commerciales », a simplement répondu la même source européenne, interrogée sur la cohérence de la position européenne, qui accepte de négocier avec un partenaire qui ne lésine pas sur les menaces.

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