Etats-Unis: l’Alabama a voté une interdiction quasi totale de l’avortement

Après la Chambre, c’est le Sénat de l’Etat d’Alabama, dominé par les Républicains, qui a voté ce mercredi 15 mai un projet de loi hyper-restrictif sur l’avortement. Selon ce texte, l’IVG est interdite dans tous les cas, y compris en cas de viol ou d’inceste, sauf si la vie de la mère est en danger ou que le fœtus présente une malformation mortelle. Un médecin qui pratiquerait un avortement serait passible de 10 à 99 ans de prison. Quels furent les éléments du débat ? Des élus démocrates ont tenté en vain de faire passer des amendements. « Vous savez ce que c’est de se faire violer ? Pourquoi ne voulez-vous pas au moins faire une exception pour les femmes ayant subi ce type d’horreur ? », a plaidé la sénatrice démocrate Vivian Davis Figures. Avant de poursuivre : « Ce n’est pas vous qui allez porter cet enfant, Ce n’est pas vous qui allez l’élever, ni subvenir à ses besoins. Vous n’aurez rien à voir avec cet enfant mais vous voulez prendre la décision à la place de la femme ». [scald=26550073:sdl_editor_representation] « Quand Dieu crée la vie, ce miracle qu’est la vie dans l’utérus d’une femme, ce n’est pas à nous, humains, de mettre fin à cette vie. Voilà ce que je crois », lui a répondu le sénateur républicain Clyde Chambliss, résumant l’opinion dominante des 25 sénateurs, tous masculins, qui ont voté cette loi. Que va-t-il se passer maintenant ? La gouverneure de l’Alabama, la Républicaine Kay Ivy, doit décider si elle approuve ou non ce texte. « Les politiciens de l’Alabama vont pour toujours subir l’infamie pour avoir voté ce texte », a tonné Staci Fox, présidente de l’organisation pro-choix, Planned Parenthood Southeast Advocates. [scald=26550173:sdl_editor_representation] Si la gouverneure signe cette loi, le combat des défenseurs du droit à l’avortement continuera. L’American Civil Liberties Union a indiqué vouloir lancer « une action en justice pour arrêter cette interdiction anticonstitutionnelle et protéger le droit de chaque femme à poser ses propres choix à propos de sa santé, son corps et son avenir. Cette loi n’entrera pas en application, et l’avortement continuera à être pratiqué de façon légale et sûre dans toutes les cliniques d’Alabama ». [scald=26550074:sdl_editor_representation] Les anti-avortements savent que l’application de cette loi risque bien d’être interdite par la justice, mais leur but ultime est d’avoir recours à la Cour Suprême, pour tenter de la convaincre de revenir sur l’arrêt « Roe versus Wade » qui, en 1973, avait reconnu le droit des femmes à avorter tant que le fœtus n’était pas viable, soit jusqu’à 24 semaines. Que se passerait-il si la Cour Suprême devait se prononcer ? Jusqu’à l’année dernière, il y avait un certain équilibre entre les neuf juges qui siègent à la Cour Suprême : quatre d’entre eux sont plutôt libéraux, quatre plutôt conservateurs, et le 9e, Anthony Kennedy, se situait entre les deux. Mais le juge Kennedy a pris sa retraite l’an dernier, et a été remplacé par un conservateur catholique nommé par Donald Trump, Brett Kavanaugh. Il n’avait été confirmé à ce poste qu’après avoir assuré qu’il ne reviendrait pas sur le droit à l’avortement. Mais il a récemment voté en faveur d’une loi limitant drastiquement le nombre de centres pratiquant l’avortement en Louisiane. Cette loi n’avait finalement pas été adoptée grâce au vote d’un juge conservateur. Donc le nouvel équilibre est très fragile. Le droit des femmes à disposer de leur corps est-il en péril aux USA ? « Il y a actuellement une tendance incroyablement dangereuse pour les droits des femmes », analyse Tarah Demant, directrice des programmes genre, sexualité et identité chez Amnesty International USA. « Six autres Etats ont adopté des lois interdisant l’avortement au-delà de six semaines, à un moment où la plupart des femmes ignorent encore qu’elles sont enceintes », poursuit-elle. [scald=26550072:sdl_editor_representation] « Dans plusieurs Etats, le nombre de centres pratiquant l’avortement a été tellement réduit que les femmes qui veulent avorter doivent faire 800km pour y arriver. Comme des délais de réflexion ont été imposés, elles doivent y revenir trois fois. C’est impraticable. L’extrême droite ultra-religieuse veut imposer sa vision à toutes les femmes. Ces interdictions ne vont pas faire diminuer le nombre d’avortements mais criminaliser ceux qui les pratiquent ». conclut Tarah Demant. Le danger est immense de retourner à cette époque sombre où les femmes risquaient leur vie pour pouvoir exercer leurs droits sexuels et reproductifs ».

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