«Les Zorties», spectacle jeune public jardiné en permaculture

Déjà bucolique en temps normal, le paysage autour de Thoricourt prend des teintes plus verdoyantes encore avec le festival Théâtre au Vert. Non seulement on y trouve des plantes vivaces comme Juke-Box Opéra (biopic musical de Julie Mossay) ou Selon que soyez puissant ou misérable (La Fontaine raconté par Dominique Rongvaux), qui ont déjà connu de belles floraisons les saisons passées, mais de nouvelles pousses, comme Les Zorties , y sèment aussi de passionnantes graines. Cultivé sans engrais chimiques mais, au contraire, avec des gestes patients, ce spectacle d’Alice Hubball et Isabelle Colassin a mis près de deux ans à sortir de terre. Il y a eu des étapes de recherche, des ateliers auprès d’enfants pour construire les personnages, et des résidences dans les écoles pour tisser ce spectacle qui aborde, justement, le système scolaire. Les Zorties , c’est l’histoire de Zoé Ortéri, petite fille à l’esprit vagabond. Elle n’est pas bête, non, mais quand il y a trop de bruit autour d’elle, son esprit s’échappe dans des mondes imaginaires. Forcément, à l’école, elle se sent à part. Parce qu’ils la trouvent « bizarre », les autres ont rebaptisé Zoé Ortéri, « Zortie ». Comme une mauvaise herbe qui pousse de travers, elle se cache souvent dans les coins plus sauvages de la cour de récré. Jusqu’au jour où elle rencontre M. Sylvestre, le concierge de l’école. En découvrant son jardin secret et en apprenant à prendre soin de la nature, toutes espèces confondues, Zoé comprend que, rose ou ortie, géranium ou pissenlit, toutes les plantes sont bonnes pour le jardin. Les unes protègent les autres. Celles-ci fournissent les insectes à celles-là. Et toutes construisent un écosystème tel que devrait être l’institution scolaire. Vive la biodiversité « Avec ce projet, nous ne voulons pas stigmatiser les enfants ou les enseignants, précise Isabelle Colassin. Nous ne voulons pas pointer les individus mais la réalité d’un système. » Si le spectacle reste encore un peu classique dans sa forme, et si l’histoire aurait gagné à être étoffée (un quart d’heure de plus ne serait pas superflu pour ciseler le caractère de Zoé, son bagage, sa « différence »), l’ensemble laisse néanmoins présager une belle créativité chez cette toute jeune compagnie. On se laisse embarquer par la minutie du décor, avec ses paysages défilant sur un tableau peint à la main, passant d’une campagne égayée de couleurs chaleureuses à une ville, et son école, dessinées dans des tons noirs et blancs. On se laisse séduire par des personnages devenus figurines de papier, crayonnées par des enfants. On sourit devant la maîtresse, symbolisée par un visage tracé à la craie sur un tableau noir, ou encore devant la directrice d’école, débordée, qui n’est plus qu’une pile de classeurs volumineux d’où émergent des yeux harassés. On reste ébahi devant le jardin luxuriant du concierge : un mur de carton d’où surgissent plantes grimpantes et tiges fleuries actionnées par des fils invisibles. Toutes sortes d’objets convoquent cette école somme toute ordinaire où la cruauté des enfants ne fait qu’une bouchée des plus faibles ; où les profs, malgré leur bonne volonté, ne peuvent pas grand-chose quand on leur colle 25 élèves par tête ; où l’on parque des élèves au milieu du béton au lieu de les entourer de nature apaisante ; où la différence, au lieu d’être une chance, devient un fardeau. Avec tout ça, Les Zorties devrait favoriser la biodiversité de Théâtre au Vert, aux côtés d’autres belles plantes comme Eux sur la photo , roman-photo géant qui vous fait déambuler dans la campagne. Plus vert que ça, tu meurs ! Du 21 au 25/8 à Thoricourt (Silly). www.theatreauvert.be.

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