Simon Gougnard et Marc Coudron au «Soir»: «Nous vivons les années où le hockey belge va tout rafler»

A peine champions d’Europe, les Red Lions ont déjà les yeux tournés vers les Jeux de Tokyo, à l’issue desquels il faudra certainement renouveler une partie de l’équipe. Pas de crainte à avoir, cependant, selon Marc Coudron, président de la Fédération belge de hockey, et Simon Gougnard, Red Lion, qui pensent les générations suivantes suffisamment talentueuses pour obtenir, elles aussi, des résultats probants. [scald=26833140:sdl_editor_representation] Comment fait-on pour être champion du monde et d’Europe ? Simon Gougnard On s’entraîne beaucoup. C’est vraiment ça la clé : l’investissement des joueurs, du staff, des gens de la fédé, etc. Ça fait plusieurs années qu’on travaille, et on récolte les fruits maintenant. Notre équipe est arrivée à maturité, et puis on sait qu’il y a les jeunes qui suivent derrière aussi. Ou qui arrivent, comme Victor Wegnez, qui a été élu homme du tournoi. Ce sont les années où on va un peu tout rafler. Notre heure est arrivée. [scald=26833488:sdl_editor_representation] Plein de sportifs travaillent beaucoup, sans arriver à vos résultats ? S.G. C’est vrai qu’il faut un groupe soudé. On n’est pas seulement une équipe, on est un groupe qui s’entraîne énormément ensemble, qui se retrouve ensemble, etc. On investit énormément ensemble. Il ne faut pas oublier que si on est champions du monde et d’Europe maintenant, on a connu des moments nettement plus difficiles dans le passé aussi. L’aspect mental est très important, et il faut un bon leader. Shane McLeod est arrivé au bon moment, dix mois avant notre participation aux Jeux de Rio. Il a installé une vraie symbiose dans le groupe. Marc, on a l’impression que la réussite des Red Lions, c’est un superbe plat dans lequel l’ensemble des ingrédients a été mis. C’est vous le chef coq ? Marc Coudron Oui, peut-être, mais ce qu’on a essayé de faire, c’est de construire sur le long terme. La chance que j’ai eue, c’est de pouvoir compter sur énormément de talent. Puis, il y a bien plus qu’une équipe qui s’est mise en place. Il y a eu des moments plus compliqués : l’Euro 2015 par exemple, que l’on a achevé à la 5e place. Pas un mauvais résultat dans l’absolu, mais pas un résultat qui pouvait rejoindre les ambitions légitime du groupe à ce moment-là. Après cela, il y a eu la réponse sur le terrain avec les joueurs et le staff. Et nous, au niveau de la fédération, on a toujours essayé de les soutenir au mieux. On essaie aussi d’anticiper les choses. Comme la réflexion qui a déjà été lancée pour remplacer Shane McLeod, qui a décidé de prendre une année sabbatique après les JO de Tokyo. On essaie toujours d’améliorer les choses. A tous les niveaux. Si un joueur ou un membre de la fédé pense qu’on ne peut pas s’améliorer, alors on ne fera plus jamais rien. Il faut continuellement se remettre en question. Champion olympique, c’est encore autre chose ? S.G. Les JO et la Coupe du monde sont les deux plus grosses compétitions pour nous. Après, les Jeux restent encore un cran au-dessus. Médiatiquement pour commencer. Et aussi le fait d’être dans le village avec tous les autres sports, c’est magique. Bien sûr, être champion du monde dans son sport, c’est incroyable, mais je pense que champion olympique, c’est encore un tout petit cran en plus. C’est clair qu’on a tous les yeux rivés sur Tokyo. Vous irez à Tokyo avec un sentiment de revanche après Rio ? S.G. Non, pour gagner des finales, il faut d’abord en jouer. Et je pense qu’on n’était peut-être pas assez matures. On était la meilleure équipe au niveau du jeu, mais pas les plus malins. On est montés sur le terrain en se disant qu’on avait déjà la médaille d’argent autour du cou. Mais je pense aussi que cette finale a certainement participé à notre construction. Ne pas avoir gagné à Rio vous a permis d’être champions du monde et d’Europe ? S.G. Oui, cela a fait partie du processus. Bien sûr, j’aurais préféré avoir l’or à Rio, mais en effet, cette médaille d’argent nous a peut-être donné une leçon qui nous aide aujourd’hui. C’est en tout cas ce qui nous a permis de jouer les grandes finales comme nous les avons jouées. Avant de monter sur le terrain samedi, on s’est tous dit : « Les gars, on sait tous l’erreur qu’on a faite, ne commettons pas la même cette fois-ci. » [scald=26833487:sdl_editor_representation] On ressent plus de pression au moment de jouer l’Euro quand on est champion du monde ? S.G. C’est clair que l’on est passé du statut d’outsider à celui de favori. On est beaucoup plus étudiés désormais, plus attendus. Ça va être la même chose aux JO. Il y aura les grosses nations comme les Pays-Bas, l’Allemagne et l’Australie, et puis nous. Donc on sera très attendus, et ça fait toujours plaisir aussi d’être attendus. Il faudra simplement qu’on le gère. Il y aura aussi une plus grande pression médiatique en Belgique. On va maintenant attendre de nous qu’on fasse un résultat dans chacun des tournois auxquels on prend part. Cette pression, comment l’avez-vous gérée à Anvers ? S.G. Shane nous a demandé de ne pas passer des heures sur les réseaux sociaux. C’est très plaisant de se sentir soutenus et de recevoir tous ces messages, mais on préférait rester dans notre bulle. Le départ prochain de Shane ne va-t-il pas bousculer cette belle unité ? S.G. Je suis d’autant moins inquiet pour la suite que je pense qu’il n’est pas mauvais de changer de coach afin d’éviter les répétitions. Ce n‘est vraiment pas le cas maintenant, mais je pense que c’est bien de l’anticiper. Quand vous dites que les filles arrivent, cela veut-il dire que la gestion de l’équipe, c’est juste un concept et qu’il faut se conformer à une sorte de cahier des charges pour réussir ? M.C. D’abord je ne suis absolument pas donneur de leçons, vis-à-vis des autres fédérations. Comme vous, je reste surpris de la réussite de cette équipe au si haut niveau. Je savais que les choses se présentaient bien, eu égard aux résultats conquis en équipes d’âge, mais je ne pensais quand même pas aux titres mondial et européen. En fait, les résultats sont là grâce aux joyaux qui ont rejoint cette équipe. S’ils n’avaient pas réussi, j’aurais été le plus mauvais des présidents, avec le plus mauvais des CA. Ce que nous avons fait, c’est simplement soutenir l’éclosion de ces talents purs. Cela reste à eux que l’on doit cette belle réussite. Et vous voyez donc cette même qualité chez les filles ? M.C. Oui, car les résultats des catégories d’âge sont là aussi impressionnants. Et on sait déjà que les U21 étaient moins fortes au même âge que nos U18 actuelles, alors que celles-ci sont également moins fortes que nos U16 au même âge. Donc oui, nous assistons à la même montée en puissance. Alors c’est vrai, nos Panthères doivent actuellement cravacher pour aller aux Jeux, mais on sait déjà que les générations qui suivent sont meilleures. On a par exemple gagné il y a deux ans trois fois sur quatre contre les Pays-Bas, ce qui n’était jamais arrivé auparavant ! Si les filles actuelles n’y sont pas encore, c’est tout simplement parce que ce n’est pas quelque chose qui s’improvise. C’est quelque chose qui se travaille. Et si elles ratent leur qualification pour Tokyo ? M.C. Ce serait une énorme déception et une grande frustration, mais certainement pas un coup d’arrêt. Je ne le conçois en tout cas pas comme ça, et puis de toute façon, elles vont se qualifier. La seule chose que je ne supporte pas, c’est qu’on dise que la Belgique est un petit pays. Allez dire aux All Blacks qu’ils appartiennent à un petit pays : vous avez intérêt à courir vite après. En Nouvelle-Zélande, il n’y a pourtant que 6 millions d’habitants. Mais on ne va jamais dire que c’est un petit pays. Pourquoi le dit-on chez nous ? Si l’aventure de Tokyo se déroule aussi bien que les deux précédents tournois, n’avez-vous pas peur de voir une partie de cette génération quitter l’équipe nationale ? M.C. Non, grâce aux générations dorées qui s’annoncent. Les Dohmen et autres avaient déjà gagné des choses, la génération de Simon (Gougnard) a aussi remporté des tournois. La nouvelle génération actuelle est vice-championne du monde. La génération qui arrive après en U16 et U18 est toujours dans le top 3 européen. Donc, la relève est là. Ce que l’on essaye de faire, c’est de faire percoler ce qui se passe chez les A dans les catégories de jeunes. L’idée est de vraiment préparer la future génération. On a eu cet exemple lors de la dernière Coupe du monde, lorsque Dohmen et Stockbroekx ont dû renoncer. Ils ont été remplacés par des jeunes (Kina et Meurmans) et on ne voyait pas la différence sur le terrain. Les deux jeunes ont participé à ce titre de champion du monde. On voit bien que les jeunes sont là pour progressivement prendre la relève et c’est vraiment ce que l’on veut construire sur le long terme. Est-ce que le président de la Fédération à un message à faire passer au grand public ? M.C. Il n’y a pas longtemps, j’ai vu un reportage sur Mohamed Ali. Et il y avait une petite citation qui me faisait penser au hockey belge : « Impossible is temporary. » Impossible est temporaire. Et c’est vraiment cela. Il y a 100 ans, on n’imaginait pas qu’un homme allait marcher sur la Lune. Eh bien moi, il y a 15 ans, je n’aurais jamais imaginé voir notre équipe nationale à ce niveau. L’appétit est venu en mangeant. Ce qui me frustre, c’est de temps en temps une sorte de paresse intellectuelle ou physique. Quand on a du talent, et on a tous un talent quelque part, il faut savoir le mettre au bénéfice de la société ou d’une équipe. Pour moi chacun peut le faire. On a tous la possibilité, même de manière bénévole, d’aider les gens. On peut être top dans le sport. Par exemple Simon, il a d’autres qualités que « juste » être un superbe joueur de hockey.

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