Mostra de Venise: Joaquin Phoenix, l’étoile qui brille sur le Lido

Intense, flippant, touchant, grandiose : Joaquin Phoenix incarne Joker, ce personnage mythique de l’univers DC avec une force incroyable. Dès les premiers instants de Joke r, cette nouvelle version proposée par Todd Phillips, en compétition lors de cette 76e Mostra, l’acteur se transforme, s’immerge dans l’esprit nébuleux d’Arthur/Joker et transcende ce personnage pourtant si complexe. Si bien que ce week-end, son nom était sur toutes les lèvres. [scald=26851374:sdl_editor_representation] Dans la vie, l’homme est tout aussi entier. Célèbre pour ses sautes d’humeur, il répond aux questions des journalistes de manière tantôt grandiose, tantôt maladroite. Comme si ses rôles lui collaient à la peau, et que la seule chose qui importait vraiment était le cinéma, pas tout le cirque qu’on peut parfois faire autour. Depuis sa première apparition à l’écran à l’âge de 8 ans (notamment dans la série Arabesque), Joaquin Phoenix n’a cessé de se démarquer, cultivant ce paradoxe d’être à la fois discret, insaisissable et d’enchaîner les rôles iconiques. Né en octobre 1974 à Porto Rico, il grandit dans une famille d’acteurs hippies, adeptes de la secte des « enfants de Dieu », entouré de quatre frères et sœurs. Il passera ses premières années sur les routes d’Amérique du Nord, avant que la tribu ne s’établisse à Los Angeles. C’est alors que tout commence : ses parents font appel à un agent pour lancer sa carrière, mais aussi celle de son frère aîné, River. Un frère qui confirmera son envie de comédie, mais dont il restera aussi dans l’ombre jusqu’à la mort de ce dernier en 1993. Cette relation cruciale aura d’ailleurs des incidences sur sa carrière. Lorsque River meurt d’une overdose, alors qu’il était un talent en pleine ascension, beaucoup se tournent vers Joaquin pour « le remplacer ». C’est la goutte de trop : Joaquin, submergé, décide de faire un pas de côté, avant de faire son retour sur le devant de la scène en 1995 avec Prête à tout de Gus Van Sant, aux côtés de Nicole Kidman. Imprévisible et sans limite Tout s’enchaîne alors : il tourne dans U-Turn d’Oliver Stone (1997), décroche sa première nomination aux Oscars pour Gladiator (2000) et tourne pour la première fois sous la direction de James Gray dans The Yards (2000). Il deviendra d’ailleurs un des acteurs fétiches du réalisateur américain, qu’il retrouvera dans La nuit nous appartient, Two Lovers et The immigrant. Mais Joaquin Phoenix est tout sauf prévisible. En octobre 2008, alors qu’il est au sommet de sa carrière, il annonce vouloir se consacrer entièrement à la musique et arrêter sa carrière d’acteur. Commence alors une longue descente aux enfers, faite de concerts ratés et d’excès en tout genre. En fait, tout ça n’est qu’une façade. Plus dévoué que jamais, l’acteur tourne en fait en secret un faux documentaire : I’m still here (2010), sous la direction de Casey Affleck. Une performance totale dont lui seul a le secret… Si le film n’est pas franchement un succès, personne ne lui en tient rigueur. En 2012, il reçoit, conjointement avec Philip Seymour Hoffman, un prix d’interprétation à Venise pour The Master de Paul Thomas Anderson. L’année suivante, il est au centre de Her, de Jonze, puis retrouve Paul Thomas Anderson pour Inherent Vice. En 2014, il obtient le Prix d’interprétation masculine à Cannes pour You Were Never Really Here de Lynne Ramsay. Autant de rôles qui ont façonné sa carrière, et qui ont contribué à l’établir comme l’un des plus grands acteurs de sa génération, tant la justesse de ses prestations est sans limite. Maigrir jusqu’à devenir fou Ce rôle de Joker s’écrira sans doute lui aussi comme l’un des points culminants de sa carrière. Et Joaquin Phoenix l’a préparé avec ce dévouement et cet investissement qui le caractérisent. « La première chose avec ce rôle, c’était la perte de poids (23 kg, NDLR) », explique l’acteur devant un parterre de journalistes, avec un sourire toujours malicieux en coin. « Et en fait, ça a une influence sur votre psychologie : vous devenez fou lorsque vous perdez autant de poids en si peu de temps. C’est un personnage que j’ai exploré pendant huit mois. Mais je n’essaie pas de définir mes personnages de manière précise. Il est tellement de choses à la fois. Il évolue beaucoup à travers le temps. L’intérêt de ce projet, c’est qu’il permet d’avoir sa propre vision des choses. Je ne me suis donc pas inspiré des autres interprétations du Joker. Je voulais que mon personnage garde une part de mystère. » Pleinement investi, Phoenix a lui-même écrit le journal intime d’Arthur et se l’est peu à peu approprié. « Au départ, je demandais à Todd ce que je devais écrire. Puis les choses me sont venues naturellement. » [scald=26851375:sdl_editor_representation] C’est d’ailleurs cet engagement total, sans limite, qui permet au personnage de trouver toute sa justesse. « Nous avons passé six mois à parler du personnage, du scénario, de son rire, de son costume, puis nous avons seulement commencé à tourner », précise le réalisateur Todd Phillips. « Mais cette discussion ne s’est jamais terminée. Pendant le tournage, nous pensions constamment à de nouvelles choses pour le Joker et pour Arthur. » Un amour de la perfection qui explique au moins en partie pourquoi on devrait sans doute retrouver Joaquin Phoenix au palmarès de cette Mostra… et aux Oscars.

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