Les dieux du ciel turcs étaient avec Neuville

Thierry Neuville n’est pas du matin. Et ça commence à énerver le jeune père de famille ! « Cela fait déjà plusieurs rallyes que je démarre 2e ou 3e sur la route, sans pour autant rivaliser avec mes deux adversaires pour le titre – Tanak et Ogier – pourtant en théorie pénalisés par le balayage », s’emporte-t-il. « Ce doit être une question de réglages plus que de pilotage car on constate souvent que mes équipiers, plus rapides que moi le matin (mais alors favorisés par une route plus nettoyée, NDLR) ne le sont plus l’après-midi ! » Ce constat, le pilote Hyundai le faisait encore vendredi soir, au terme de la première étape du rallye de Turquie, chronos à l’appui. Plus rapide de la spéciale-show du jeudi soir à Marmaris (à égalité avec son équipier Mikkelsen), il avait, en une matinée, concédé une demi-minute à Esapekka Lappi, plus que jamais avantagé par sa position sur la route, mais surtout, il avait été précédé par ses deux éternels contradicteurs. À ce moment-là, tout y était passé : voiture imprévisible, beaucoup trop de temps perdu dans des glissades exagérées, sous-virage en entrée de courbe, survirage en sortie, une suspension à assouplir sans cesse, etc. Un refrain déjà entonné à plusieurs reprises cette année par notre compatriote. Et qui n’invitait guère à l’optimisme. Puis, tout le monde s’y est mis sur le temps de midi, semble-t-il, chez Hyundai. Le météorologue d’abord, qui en martelant qu’il se mettrait à pleuvoir au creux des montagnes environnantes traversées par le rallye, influença un choix de pneus qui s’avéra déjà nettement plus judicieux que celui du matin. Puis les ingénieurs affectés aux réglages de différentiels et de suspensions se mirent enfin à trouver des réglages tellement efficaces qu’on se demande à quoi servent les journées de tests – certes désormais limitées – ou la spéciale d’essai d’avant-course, tant la voiture semble à ce point éloignée de ce qu’elle devrait être au moment où la course démarre ! Et puis même le ciel turc s’y est mis, dans la foulée de ce qui s’est avéré être un petit coup de chance pour un homme qui martèle souvent en avoir si peu… « Sur le secteur routier qui précédait la longue spéciale de 38 km, une alarme nous a signalé une crevaison lente », conte Neuville. « Pris par le temps, nous avons décidé, Nicolas et moi, de changer la roue en montant un pneu plus tendre que le pneu dur défaillant. Nous avons alors attaqué comme des fous en voyant les gros nuages arriver, mais ce pneu s’est avéré beaucoup plus efficace à la fin de cette spéciale, soudain inondée par l’averse. » Un cadeau du ciel qui allait chambouler toute la course, car en plus d’affecter davantage encore un Tanak, déjà ralenti par une crevaison – il concéda 1mn20 d’un coup ! –, il pénalisa tous les autres pilotes qui suivaient et qui voyaient soudain leur avantage de passer sur une route nettoyée de sa poussière, avoir à affronter un véritable calvaire. Seules les Citroën d’Ogier et de l’étonnant Lappi évitèrent l’écueil, si bien qu’en une spéciale, Neuville repassait de la 7e à la 3e place tandis que la course à la victoire ne concernait en théorie plus que ces trois gars-là, tous les autres étant relégués à 44 secondes (Suninen), ou à une minute et parfois bien plus, à commencer par le malheureux Tanak, 8e à plus d’une minute et demie du leader ! Mais sans même présager de sa capacité à prendre le meilleur, ou pas, sur les pilotes Citroën, Neuville se voulait être le sage que l’on écoute : « Souvenez-vous que l’an dernier au même moment, j’étais en tête de l’épreuve devant Ogier, que Tanak n’était nulle part (5e à 32 secondes, NDLR), et que le lendemain matin (encore le matin !, NDLR), je devais abandonner ! » Une sagesse bienvenue, même si, vendredi à Marmaris, d’aucuns se remettaient à nourrir l’idée que ce rallye de Turquie allait à nouveau être un tournant du championnat. Mais cette fois avec une connotation plus favorable pour notre compatriote.

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