Marcel Habran, le dernier roi de la pègre belge

Marcel Habran est une figure de l’époque où les méchants n’étaient pas des barbus radicalisés. Lui, il a toujours porté beau : chemises, vestes pied-de-poule, chevelure soignée et tchatche à l’avenant – il n’a pas fait d’études mais il est cultivé et s’exprime avec aisance. Une façon, sans doute, de tenir son rang : Marcel Habran a été le dernier roi de la pègre belge. A tort (parfois) ou à raison (souvent), son nom – qu’il ne tient pas de son père qui fit désaveu de paternité – a été associé, un bon quart de siècle durant, à tous les coups fumants à une époque où les braquages pouvaient encore rapporter gros. « Innocent, sourd, muet et amnésique » Il a été condamné une bonne douzaine de fois. La première, c’est en 1952, pour un vol de métaux à l’époque où il marnait comme manœuvre dans les usines liégeoises – il deviendrait, par la suite, Julot casse-croûte avant de faire son trou dans le milieu de la prostitution. La deuxième, c’est en 1974 : les assises du Brabant le condamnent à 18 ans de réclusion – « Je suis innocent, sourd, muet et amnésique », clame-t-il – pour divers braquages dont celui qui, deux ans plus tôt, a coûté la vie à un convoyeur de fonds. Entre les deux, rien, même si son nom avait été cité dans diverses affaires retentissantes pour lesquelles il avait été innocenté. On le croyait rangé des voitures – il exploitait d’ailleurs un garage, rue Winston Churchill, à Liège – quand il est derechef arrêté, en juin 1991 : avec ses lieutenants, il préparait et dirigeait des braquages commis par des exécutants. On le soupçonne alors d’être derrière l’attaque sanglante d’un fourgon postal, le 12 juin 1989, à Arlon – un postier grièvement blessé, 40 millions d’anciens FB de butin –, derrière le braquage de la poste de Tirlemont, le 5 octobre 1990, derrière celui des postiers d’Evere, le 19 février 1991, et derrières d’autres vilains coups encore : on ne prête qu’aux riches. A 58 ans, il reprend le chemin de la prison où il aura passé, sous réserve d’un inventaire plus exhaustif, un bon tiers de sa vie. Deux procès barnumesques à Liège et à Nivelles Fin de parcours ? Non : durant l’automne 2002, Habran, 69 ans et des poussières, est à nouveau arrêté chez lui, à Woluwe-Saint-Pierre, en même temps que plusieurs de ses lieutenants. L’opération mobilise 350 policiers : « la bande à Habran » est au trou. Nombre d’attaques et de braquages paraissent, cette fois encore, porter la signature du vieux truand : à Nannine et Dilbeek en 1995, au shopping de Woluwe, en 1999, à l’aéroport luxembourgeois de Findel en 2000 – un butin de 73 millions d’anciens FB – et, surtout, sur l’autoroute E40 à Waremme, cette attaque d’un fourgon de la Brink’s Ziegler qui a coûté la vie aux deux convoyeurs, le 12 janvier 1998. Ces affaires-là ont donné lieu, en 2008 et en 2010, à deux procès d’assises barnumesques où Habran et une dizaine de coaccusés répondirent d’une dizaine de braquages – dont celui de Waremme – et de quatre règlements de compte dans le milieu liégeois. A Liège, le procès allait durer six mois. Pour rien : l’arrêt fut cassé au motif que le verdict des jurés n’avait pas été motivé. L’affaire fut renvoyée devant la cour d’assises de Bruxelles siégeant à Nivelles. Une requête toujours pendante à Strasbourg A Liège comme à Nivelles, Marcel Habran a farouchement nié toute espèce d’implication dans l’épouvantable braquage de Waremme. Il avait eu vent du projet et s’était, disait-il, sciemment forgé un alibi, craignant qu’on lui fît porter le chapeau : il s’était rendu à Florenville où il avait semé tous les petits cailloux qu’il avait pu – il avait fait le plein, il avait joué au Lotto, il avait retiré des sous dans un automate. Ni les jurés de Nivelles, ni ceux de Liège ne l’avaient cru : deux témoins « protégés » chargeaient Habran qui avait été reconnu coupable de l’attaque de Waremme, mais sans la circonstance aggravante de meurtre. Egalement reconnu coupable d’avoir dirigé une organisation criminelle, il avait été condamné, en septembre 2010, à une peine de 15 ans de prison assortie d’une mise à disposition du tribunal de l’application des peines durant 20 ans : une condamnation identique à celle prononcée à Liège au printemps 2009. Marcel Habran a toujours contesté ce jugement : il a fini par saisir la Cour européenne de Strasbourg où sa requête fait toujours antichambre.

Votre compte

Marcel Habran, le dernier roi de la pègre belge

Découvrez la suite, 1€ pour 1 mois (sans engagement)

Avec cette offre, profitez de :

Le fil info

0 Commentaire

Aussi en Société

Entretien L’épidémiologiste Julien Beauté (ECDC): «L’été est moins favorable au covid mais il faut garder BA.5 à l’œil»

Reportage Cyberattaque sur Vivalia: le réseau fonctionne au ralenti et tout est à réinventer

Villégiatures: les saisons estivales passent, les hébergements insolites restent

Orages: retards possibles à Brussels Airport, plusieurs vols annulés

SNCB: l’offre entre Anvers et Bruxelles va diminuer aux heures de pointe dès lundi 23 mai

Allez au-delà de l'actualité

À la Une

Orages: retards possibles à Brussels Airport, plusieurs vols annulés

Des orages en mai? Un phénomène courant à toujours prendre avec précaution

Guerre en Ukraine: la Russie cesse ses livraisons de gaz à la Finlande, quelles sont les conséquences?

Coronavirus: c’est maintenant qu’on doit préparer son retour

Masques, PLF, baromètre… voici ce qui est sur la table du Codeco de ce vendredi

Accusé d’agressions sexuelles, Elon Musk évoque un complot

« Nos collaborateurs sont des empereurs, les clients sont rois »

6 Belges sur 10 sont de plus en plus sensibles à la politique climatique de leur emploi

« Nous donnons de la valeur aux idées et encourageons à les transformer en projets concrets »

Les sections du site

Les services

Groupe Rossel