Factory 2016: un tremplin pour spectacles à découvrir

Alors qu’il quittera sa fonction de directeur du Théâtre national le 30 juin prochain (la désignation de son successeur est en cours), Jean-Louis Colinet n’a pas vraiment l’air d’un proche retraité. Loin de se reposer sur le succès rencontré durant ses douze ans à la tête de la première scène de la Fédération Wallonie-Bruxelles, il se lance dans de nouveaux projets. Parmi ceux-ci, Factory et Effect, lancés dans le cadre du Festival de Liège dont il est également le directeur, sont sans doute ceux qui lui tiennent le plus à cœur. « Factory, c’est là, c’est maintenant, explique-t-il. Au départ, c’est un projet au sein du Festival de Liège. L’idée était de mettre en avant la jeune création. Mais pas seulement en programmant ou en coproduisant des spectacles. L’idée, c’est aussi de soutenir, d’accompagner des artistes émergents belges francophones. Il y a donc un volet consacré à des spectacles en cours de création et un autre consacré à des reprises de spectacles qui n’ont pas été assez vus. C’est l’occasion d’inviter des programmateurs internationaux. Quand je vais à Santiago du Chili, à Moscou ou à Naples, ce qui m’intéresse, ce n’est pas de voir les grands spectacles internationaux que je peux voir un peu partout. C’est de découvrir ce qui se passe dans le pays et qui mérite notre attention. C’est un peu l’idée ici. Nous voulons permettre à des artistes émergents de chez nous de rayonner sur un plan international. » Factory 2016 Pour cela, une première version de Factory est mise sur pied lors du Festival de Liège 2015. Mais très vite, l’équipe se rend compte que le rythme biennal ne convient pas pour le projet Factory. « Dans le cadre du projet de nouveau contrat-programme du Festival, nous proposons d’avoir une version plus développée de Factory sur une dizaine de jours les années paires et une version réduite dans le cadre du festival les années impaires. En plus des spectacles eux-mêmes, il s’agit de proposer des résidences, de créer des lieux d’échanges et de rencontres pour les artistes, des workshops avec des artistes confirmés, etc. La première édition qui commence ce jeudi 25 février sera bien entendu plus légère. Nous proposons deux spectacles qui ont été produits par le Festival de Liège : « Discours à la Nation » et « Ha Tahfénéwai ! ». À destination du grand public mais aussi des programmateurs étrangers. Et par ailleurs, il y aura trois étapes de travail de spectacles qui seront créés par la suite : « Où est Alice » par la compagnie Paulette Godard, « Tabula Rasa » de Violette Pallaro et « Régimes amoureux », une création collective. » Un projet européen Pour ce projet particulier, le Festival de Liège travaille en étroite collaboration avec La Chaufferie, association de trois structures (Théâtre et Public, Esact et Groupov) afin d’accompagner des démarches artistiques émergentes. Avec dans leur travail, tout un volet consacré au développement régional. Mais Jean-Louis Colinet et le Festival de Liège veulent également aller plus loin. D’où la création du projet Effect pour European Factory For Emerging Creative Talents. « C’est un projet qui rassemble huit structures européennes : quatre festivals et quatre théâtres. Le Festival de Liège, porteur du projet, le Festival d’Avignon, Temporada Alta à Gijon en Espagne, la Biennale de Wiesbaden en Allemagne, le Teatro Stabile del Veneto Carlo Goldoni à Venise, le Folkteatern à Göteborg en Suède, le Teatro Nacional D. Maria II à Lisbonne et le Toneelhuis d’Anvers. A cela s’ajoute Technocité car une bonne partie du projet est liée au numérique. Et puis nous avons trois partenaires hors Europe, l’Usine C à Montréal, le Festival Santiago a Mil au Chili et le National Taichung Theater à Taïwan. Tous ces partenaires font le même constat : compte tenu de la raréfaction des aides publiques, on assiste à des programmations de plus en plus liées à des valeurs sûres. On sent une frilosité générale. Dès lors, sans l’aide d’institutions pour les coproduire, ils ont de moins en moins de moyens. Et de moins en moins de chance de faire circuler leurs créations. » Rendre les créateurs autonomes Face à cet état de fait, Effect veut réagir à partir de trois axes : la professionnalisation, la création et la circulation des spectacles, le développement des publics. « Pour la professionnalisation, nous voulons mettre en place des dispositifs de formation, de compagnonnage avec des artistes confirmés, des rencontres entre artistes émergents mais aussi des formations sur les différents métiers du théâtre (musique, lumière, sons, vidéo…). Pour la circulation des œuvres, il y aura un dispositif de coproduction pour des œuvres vouées à la circulation, que nous choisirons en commun et qui seront aidées par tous de la même manière. Enfin, pour le développement des publics, il s’agit notamment d’utiliser les outils numériques pour créer des rencontres entre publics de différentes villes mais aussi pour créer, avec des groupes de citoyens, des web docs sur les spectacles en train de se créer. » Autant de soutiens qui ont un but essentiel : « Nous ne voulons pas devenir les producteurs de ces artistes émergents. Nous voulons au contraire leur donner les armes pour s’autonomiser. Ce serait beaucoup plus sain qu’une éternelle dépendance vis-à-vis des institutions ». Les moyens financiers Le projet est sur la table. Ses promoteurs attendent une décision des autorités européennes pour le mois de mars. Du côté de Liège, on a aussi remis un nouveau projet de Contrat-programme pour le Festival, tenant compte de ces nouveaux objectifs. « C’est le Festival de Liège qui est à la base de ce projet européen. Il me semble important pour la Fédération Wallonie-Bruxelles que nous puissions en assumer le rôle de leader. Mais nous ne pourrons pas le faire avec notre subvention actuelle. Nous demandons un alignement sur l’aide que la Fédération apporte au Kunstenfestivaldesarts : 600.000 euros par an. » De quoi faire découvrir nos artistes dans toute l’Europe et au-delà ? Si la sauce prend, ce ne serait pas cher payer. Factory 2016, du 25 au 27 février, au Manège, au studio et à la salle B16 à Liège, 04-343.42.47, www.festivaldeliege.be.

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