Une femme à la présidence de la République, une première en Grèce

C’est une première dans l’histoire grecque. Ce 22 janvier, 261 des 300 députés du Parlement ont élu présidente de la République hellénique Ekaterini Sakellaropoulou, une magistrate de 63 ans. Prokopis Pavlopoulos, qui occupe ce poste essentiellement honorifique depuis 2015, aurait pu être reconduit pour cinq ans. Mais le Premier ministre Kyriakos Mitsotakis, leader du parti de droite Nouvelle Démocratie (ND), a donc proposé une personnalité considérée au centre alors que ses premiers pas sont jugés très à droite. Il cherche ainsi à se redonner une image de centriste… et à couper l’herbe sous le pied de son opposition. [scald=27379092:sdl_editor_representation] Originaire de Thessalonique, Ekaterini Sakellaropoulou incarne une Grèce plus moderne et plus progressiste que son prédécesseur. Selon le journaliste Yannis Androulidakis, fin analyste politique, « le gouvernement a évité de nommer comme président une figure provocante, ce qui aurait été le cas avec Evangelos Venizelos ou Antonis Samaras dont les noms circulaient. » Ces deux personnalités politiques, l’une de ND, l’autre du Pasok (social-démocrate) ont en effet ratifié les mémorandums, ces accords de prêts entre la Grèce et ses créanciers honnis par la population. Yannis Androulidakis ajoute : « Elle n’est pas liée, dans la tête des Grecs, aux politiques des mémorandums même si le Conseil d’Etat a systématiquement ratifié les décisions qui en ont découlé. » Tirer les leçons de 2014 Mitsotakis tire aussi les leçons de 2014. Dans le pays alors détenu par ND, aucun des candidats proposés ne put obtenir la majorité des deux tiers. Des élections anticipées avaient dû être convoquées qu’Alexis Tsipras, leader de Syriza, avait remportées. Il a alors promu Ekaterini Sakellaropoulou lorsqu’il était Premier ministre. En octobre 2018, il l’a nommée à la tête du Conseil d’Etat et déjà, elle fut la première femme du pays à occuper ce poste. [scald=27379091:sdl_editor_representation] Sans appartenance politique, elle est considérée comme féministe. Divorcée et mère d’un enfant, elle est reconnue, dans sa carrière, pour avoir traité avec succès plusieurs affaires de protection de l’environnement, notamment contre un barrage hydraulique qui aurait asséché une rivière en Thessalie. Dans ce pays où il n’y a pas de séparation entre l’Eglise orthodoxe et l’Etat, elle avait soutenu la suppression de la mention de la religion sur les cartes d’identité grecques au début des années 2000. Elle a également soutenu une loi proposée par le gouvernement d’Alexis Tsipras afin que les enfants nés de parents étrangers, mais ayant effectué la majorité de leur scolarité en Grèce, puissent acquérir la nationalité grecque. « Un esprit de consensus » Enfin, en 2018, elle s’est fait remarquer en tant que présidente du Conseil d’Etat, pour avoir décrété que l’insertion à l’école des enfants réfugiés était « légale et nécessaire » alors que des associations de parents d’élèves grecs se plaignaient de la présence d’écoliers immigrés dans les établissements. « Cette nomination est une réussite significative et stratégique qui ouvrira de nouvelles perspectives à l’avenir », écrit l’éditorialiste Elias Maglinis dans le quotidien conservateur Kathimerini. [scald=27379093:sdl_editor_representation] Pour lui, elle « apporte un esprit de consensus indispensable en ces temps difficiles en politique étrangère » alors que se multiplient les tensions avec la Turquie voisine sur les questions d’exploration énergétique, de frontières maritimes et de flux migratoires. Mais Yannis Androulidakis s’inquiète : « Je trouve que nommer un juge à la présidence de la république est une idée peu républicaine. Les juges ne sont pas élus : elle n’est jamais, dans son parcours, passée par le verdict des urnes. Les juges sont des représentants d’un pouvoir sur lequel il n’existe aucun contrôle populaire. Qu’une juge devienne présidente m’apparaît un triste symbole pour notre démocratie. »

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