Bonheur au travail : le « baby-foot » qui cache la forêt

À l’époque, les corporate qui frappaient à la porte des business school se paraient de leurs plus beaux packages pour attirer les futurs diplômés : voiture de société, ordinateur portable et GSM. Aujourd’hui, c’est le plaisir au travail qui joue ce rôle. Consoles de jeux, parcours de mini-golf, toboggans, apéros et autres siesta breaks, ont fleuri au sein des entreprises. La méthode Google a fait des émules et continuent d’inspirer nombre de CHO, le fameux Chief Happiness Officer. Mais cette culture « baby-foot » est de plus en plus pointée du doigt. Alors faut-il en finir avec le bonheur au travail ?
Un paradis artificiel
Ces initiatives sont souvent une façon d’éluder les vrais sujets. C’est le constat posé par Thibaut Bardon, professeur à l’Audencia Business School de Nantes, qui voit de « sérieux risques à confier le bonheur des individus aux entreprises ». D’abord, parce que cela revient à créer une image normée, simpliste et biaisée du bonheur. Et si vous n’aimez pas le « baby-foot » ? Vous vous retrouvez de facto exclu. Une mise à l’écart qui peut être perçue comme un déficit d’engagement par rapport aux collègues. Une approche du bonheur aliénante pour l’employé… Thierry Bardon souligne également que ces mesures servent surtout l’image de l’entreprise, aux dépens des questions de fond.
De la poudre aux yeux ?
Le coolwashing est malheureusement monnaie courante. Arriver au bureau et voir son boss, raquette à la main, occuper à taper la balle de ping-pong avec un collègue… ça le fait ! Quelques Fatboy, une PS4 et un distributeur de chips ? Cool ! Mais la réalité, c’est que vous n’aurez pas le temps de jouer. Pire, cela pourrait être mal perçu par la hiérarchie ! Un « baby-foot » dans une boîte au management archaïque, c’est un emplâtre sur une jambe de bois. C’est en substance la critique formulée par Nicolas Bouzou et Sophie de Funès, dans leur ouvrage « La Comédie (in)humaine », qui épingle ces entreprises, incapables de se réinventer, mais soucieuses de donner l'illusion d'innover.
Génération « en quête de sens »
Évidemment, des démarches sincères et cohérentes existent, mais les entreprises devront continuer à revoir leur copie pour séduire cette illustre génération Y. Des jeunes porteurs de valeurs et convictions fortes : la recherche d’autonomie, de flexibilité, la conscience des enjeux sociétaux et environnementaux. Ainsi qu’une profonde quête de sens ! Avides d’espace pour exprimer leur talent et leur passion dans le cadre professionnel, ils déchantent souvent une fois en selle… Si leur créneau peut être « be who you are », celui des entreprises devrait être « who are we ? ».
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