Comment se financer pour démarrer ? L’exemple de Kazidomi

Ils sont encore à l’université quand leur idée de webshop grandit. Le secteur de la distribution est en difficulté mais le projet correspond exactement aux attentes de la nouvelle génération : de l’e-commerce, du bio et du socialement responsable, le tout à un prix le plus réduit possible.
Rapidement, la demande est au rendez-vous mais pour croître, il faut du capital. Alain Etienne, cofondateur de Kazidomi avec Emna Everard, revient sur les différentes étapes de financement, qui ont permis à la société de recruter une vingtaine d’employés en à peine deux ans et demi.
Avec quoi avez-vous commencé en 2016 ?
Quand on s'est lancé, on était encore étudiants. On a utilisé du capital personnel. Il y a des moyens de lancer une start-up avec 1 € mais, vu que c’est du retail, il nous fallait un numéro de société pour acheter des produits, pour pouvoir déduire la TVA etc. On a donc créé une SPRL. Pour ça, le minimum c’est 6.200 euros.
On a acheté quelques produits en se disant qu’on verrait bien si on arriverait à les vendre. À la fin de l'été 2016, on avait créé un site fonctionnel avec les moyens du bord. Les premiers mois, c'est long. Il faut convaincre les clients. On pense que la page Facebook va suffire à faire exploser les ventes, mais ce n'est pas le cas. Une publicité en ligne qui coûte 50 euros, ça nous paraît très gros à la sortie des études. Alors on avance progressivement et quand ça commence à fonctionner, les budgets augmentent et tout prend plus d'ampleur.
Vous avez donc fait une première augmentation de capital de 50.000 euros auprès d’un Business Angel. Pourquoi ce type d’investisseur ?
On a fait des tests avec le crowdfunding mais c'était très peu concluant parce que les gens aiment bien avoir un produit. Une plateforme de ventes ne correspondait pas à ce qu’ils recherchaient. Tout ce qui était bancaire, c’était complètement impossible. Et puis, les subsides sont souvent des remboursements. Mais l'employé, il faut le payer donc il nous fallait vraiment du capital de base.
Le Business Angel croyait en notre projet et surtout en nous, les entrepreneurs. C'est une étape qui est basée surtout sur la personne parce que les chiffres ne veulent pas dire grand-chose. On parlait de dizaines de milliers de vente depuis le lancement, c'était très peu. Et, vu qu’il fallait payer les envois et la logistique, l’activité n'était pas rentable. Cette première augmentation de capital nous a permis d'embaucher nos premiers employés, ce qui nous a donné le temps de nous concentrer sur ce qu'on voulait faire au niveau stratégique, etc.
Quels ont été ces choix stratégiques justement ?
Courant 2017, on a mis en place une formule d'abonnement. Les clients se sont multipliés, et surtout, la fréquence d'achat et le panier moyen ont augmenté. Là, on a pu se tourner vers la SRIB (bras financier pour le soutien aux entreprises bruxelloises, ndlr) et le Crédal (coopérative qui propose du crédit alternatif, ndlr) pour un crédit de 100.000 euros. On n'aurait pas pu l’avoir auprès d'une banque parce que le projet était trop jeune, pas assez mature, et qu’on n'avait pas de garantie personnelle.
Six mois plus tard, on avait 4 employés et un site qui commençait à vraiment bien tourner. On s'est donc à nouveau orienté vers un Business Angel, parce que les montants recherchés n'étaient pas suffisants pour se tourner vers les fonds d'investissement. On a refait une levée de fonds de 450.000 euros. C'était le coup de pouce nécessaire pour accélérer le développement.
D’ailleurs, rapidement, vous avez eu besoin de plus d’argent...
Maintenant on veut élargir l'entrepôt, en passant de 250 à 2.000 m, on veut acheter plus de produits, on a envie de faire des tas de choses. Avant, il fallait investir pour développer le projet. Maintenant il faut investir pour suivre la croissance. Là, on vient de faire une levée de fond d'un peu moins d'un million d'euros qui va nous permettre de faire tous ces investissements et de grandir.
Ce sont les investisseurs historiques qui nous suivent, mais aussi la banque maintenant. On a réussi à les convaincre en leur montrant les chiffres. Maintenant, il y a aussi un fond de commerce sur lequel ils peuvent prendre des garanties. Et la confiance s'installe parce qu'on s'entoure d'investisseurs de qualité, ce qui nous permet d'être aiguillé, d'avoir de bons conseils.
Avez-vous, à un moment ou à un autre, éprouvé des difficultés à trouver du financement ?
Des solutions de financement, il y en a toujours. Il y a des communautés d'investisseurs comme Be Angels, il y a des fonds d'investissement, etc. La question c'est plus de savoir à quelles conditions on trouve ce financement. Les difficultés sont plus au niveau des valorisations, des clauses qui vont se cacher dans les contrats et qui vont faire que le jour où ça va moins bien, ces contrats se retournent contre nous. C'est là qu'on peut se faire piéger. Nous avons eu la chance de tomber sur des anciens entrepreneurs qui comprennent exactement les problèmes auxquels on fait face au jour le jour, qui nous soutiennent dans les bons moments et les moins bons.
En ce qui nous concerne, la difficulté a surtout été de mettre en place notre modèle d'abonnements. C’est assez peu courant dans le secteur du bio, où les marges sont plutôt hautes. Donc, quand nous avons décidé de réduire les marges sur les produits pour les offrir aux meilleurs tarifs, ça n'a pas plu à tout le monde. Il y a eu des plaintes auprès de nos fournisseurs et certains nous ont lâchés par peur de perdre leurs autres clients. C'était un passage difficile parce qu'on n’avait plus de stock.
Envisagez-vous d'autres levées de fonds aujourd’hui ?
On est déjà en contact avec plusieurs fonds d'investissement parce qu'il y a un vrai intérêt pour le projet. Beaucoup d'investisseurs se disent que ce qu'on fait dans trois pays (Belgique, France, Pays-Bas) peut être fait dans une dizaine de pays. La question est de savoir quand ce sera le bon moment. Aujourd'hui on se donne un petit peu de temps pour déménager l'entrepôt, avoir une bonne logistique, avoir un bon catalogue... Mais, d'ici à 2020, on a le projet de se tourner vers des investisseurs plus institutionnels.
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