Coronavirus: les soins intensifs n’excluent pas de bientôt devoir choisir entre les patients plus jeunes et les personnes âgées
Selon le Standaard, le SPF Santé publique a demandé à la société belge de médecine intensive d’élaborer un texte de conseil d’éthique dans ce but.

A la demande du SPF Santé publique, la société belge de médecine intensive a, selon nos confrères du Standaard, élaboré un texte de conseil éthique à destination des hôpitaux, avec l’éthicien Ignaas Devisch. Le but : réguler l’afflux de patients vers les soins intensifs. L’âge, seul, ne peut pas être le facteur décisif, explique Geert Meyfroidt, actif au laboratoire des soins intensifs de la KU Leuven. « Cela a été fait dans le nord de l’Italie, car le système de santé était surchargé. Il y a beaucoup de critiques, et à juste titre, car une personne âgée de plus de 90 ans peut être en situation favorable, tandis qu’une personne âgée de 75 ans peut être en très mauvaise posture. »
« Nous avons toujours l’intention d’éviter les soins disproportionnés. Nous entendons par là : des soins qui ne sont pas proportionnels au résultat attendu. Nous essayons également d’éviter de telles situations en temps normal, car les soins intensifs sont très drastiques. Vous ne voulez pas avoir à refuser quelqu’un qui a de grandes chances de guérison parce que le département est plein de gens qui ne s’en sortiront probablement pas. Faire cette sélection fait partie de notre travail quotidien. La crise actuelle va bientôt aggraver ce problème. »
« Premier arrivé, premier servi »
S’il reste un lit dans l’unité de soins intensifs et que deux personnes ou plus ayant un profil similaire frappent à la porte pour obtenir de l’aide, le texte du conseil éthique stipule que la sélection peut être faite selon le principe du « premier arrivé, premier servi », ou même de façon aléatoire.
Cependant, les membres du comité d’éthique de l’UZ Leuven ont un avis différent, rapportent nos confrères du Standaard. Au sein de leurs conseils éthiques, qui viennent également de s’achever, ils disent que la priorité peut être donnée aux plus jeunes, à condition que leur condition ne soit pas pire que celle du patient plus âgé qui pourrait prétendre au même lit. « Bien sûr, nous espérons que cela ne sera pas nécessaire », a déclaré Martin Hielen, président du comité d’éthique. Le texte de l’UZ Leuven est également approuvé par les autres hôpitaux universitaires.
L’Association belge des urgentistes demande à pouvoir parler aux personnes âgées et vulnérables, en particulier dans les centres de soins, de ce qu’elles veulent et ne veulent pas si elles tombent gravement malades : veulent-elles toujours aller à l’hôpital ? Souhaitent-ils être réanimées ? « C’est en fait le cours normal des choses, mais c’est à présent d’autant plus important », explique Meyfroidt.
Selon les urgentistes, un âge avancé combiné à une condition médicale antérieure peut être « pris en compte » : les personnes âgées qui sont « fragiles » – physiquement très vulnérables – ou qui présentent un net déclin cognitif – démence avancée – pourraient ne pas être acheminées vers l’hôpital si le coronavirus était diagnostiqué. Meyfroidt : « S’il y a une forte probabilité qu’ils meurent malgré tous les soins prodigués, il est préférable qu’ils décèdent dans un cercle intime plutôt que dans une salle d’isolement où aucun proche ne peut être présent. »
L’association belge des urgentistes déconseille également la réanimation des patients à l’extérieur de l’hôpital, par exemple dans un centre de soins. « Cela comporte trop de risques de contamination pour le personnel qui effectuerait la réanimation dans ces circonstances. »
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S'abonnerQuelques règles de bonne conduite avant de réagir14 Commentaires
Est-ce vraiment le titre de ce papier qui pose problème ??? ...ou le stade de déshumanisation auquel il indique que nous allons sans doute arriver ? Rappelons-nous que les médecins italiens étaient confrontés à cette question dès fin février, à un moment où on se demandait déjà pourquoi nos autorités politiques avaient gaspillé deux mois sans agir, laissant les vacanciers passer les congés dans les zones rouges sans avertissement, et en revenir sans contrôles... Était-ce pour nous éviter "la panique", ou beaucoup plus simplement parce que, quand on s'est consacré pendant des années à démanteler les services publics et qu'on ne rêve que d'assainissement budgétaire, on ne se préoccupe évidemment pas de stock de masques, ni de réactifs pour l'unique robot d'analyse rapide, ni de respirateurs..., et qu'on ne prête aucune attention aux mises en garde du corps médical. Mais qui va aujourd'hui devoir colmater les brèches à coup de dévouement, de stress, puis d'épuisement, et enfin de triages "éthiques"... sinon ces blouses blanches qui manifestaient leur désarrois depuis des mois (au même titre que les autres services de l'état...). Facile aujourd'hui de les décréter héros du jour ; mais qui sera appelé à solder le décompte des morts inutiles que l'aveuglement politique pourrait bien nous forcer à constater ? Non pas ces morts qui seront la conséquence naturelle du refus justifié de l'acharnement thérapeutique, mais ceux qui, en plus, résulteraient des carences qu'implique nécessairement un sous-financement chronique. Car hier, il n'y avait pas de moyens pour équiper la Justice, l'Enseignement, la Police, ni bien sûr la Santé ; mais aujourd'hui, les milliards sont trouvés "pour défendre l'Euro" et "soutenir les marchés financiers"... Soyons donc rassurés : tout le monde ne sera pas perdant !
Je propose suggère que le Soir revienne à des critères éthiques de base et s'abstienne de titres raccoleurs-nuisibles tels que celui-ci.
La priorisation des patients arrivant aux urgences ne date pas d’hier et se justifie d’un point de vue médical et éthique. Des critères de sélection ont été établis à cette fin dans tous les services d’urgence. Il n’y a cependant pas de cadre juridique bien défini permettant au personnel infirmier de refuser à des patients l’accès aux urgences. Or c’est ce personnel qui procède au tri des patients. Je peux imaginer que la Santé publique cherche à uniformiser les critères de sélection et à affermir la légalité de leur mise en application. Il faut aussi probablement voir dans cette "fuite" à destination de la presse l’intention de préparer les gens à ce qu’ils pourraient éventuellement être touchés par ces procédures de sélection et créer un phénomène de "ritualisation" propre à faciliter l’acceptation de cette éventualité. Cela dit, il est un fait que le Soir a un sérieux problème avec ses titres d'article.
@Biot Philippe. "... ne date pas d'aujourd'hui"... ni d'hier.
Il convient d'ajouter que la décision d'arrêter les soins à certains patients en fin de vie ou en danger de mort est toujours prise en équipe. Le département "soins palliatifs" ne date pas d'aujourd'hui.