Climat: l’Arctique sans banquise en été, c’est inéluctable

L’océan Arctique sans banquise, c’est très probablement avant 2050 et c’est inéluctable. C’est la conclusion d’une étude coordonnée par l’université de Hambourg et à laquelle ont participé 21 instituts de recherche du monde entier, dont le centre de recherches sur la Terre et le climat de l’UCLouvain. [scald=27518932:sdl_editor_representation] Les chercheurs qui publient dans la revue scientifique « Geophysical Research Letters » ont utilisé les deniers modèles climatiques disponibles, les fameux CMIP6, plus précis géographiquement et intégrant davantage de données liées aux cycles biogéochimiques. Alors que la diminution de la banquise arctique est avérée depuis des décennies, ils ont modélisé son évolution future en fonction des émissions humaines de CO2 à l’échelle mondiale. Conclusion : pour des rejets cumulés de 200 à 1.100 gigatonnes (milliards de tonnes) de dioxyde de carbone à partir de 2019, la majorité des modèles prédisent un océan Arctique libre de glace (moins d’un million de km2 de banquise) avant 2050. « Cela veut dire, indique François Massonnet, 34 ans, un des auteurs de l’étude, que je connaîtrai cela de mon vivant. Précédemment, certains scénarios concluaient qu’il était possible d’éviter la disparition de la banquise en été si les émissions mondiales diminuaient fortement. Mais en 10 ans, la concentration en CO2 a continué à augmenter ». Les nouveaux modèles sont plus précis, les scénarios plus optimistes ne sont plus plausibles, explique le chercheur qualifié FNRS à l’école de physique de l’UCLouvain. [scald=27518933:sdl_editor_representation] L’inertie du système climatique et la course de nos rejets de CO2 qui proviennent essentiellement des énergies fossiles (charbon, pétrole, gaz naturel), ne permettront pas d’enrayer le phénomène. La différence entre 200 et 1.100 gigatonnes ? « Elle dictera la fréquence des étés sans banquise », dit Massonnet. Exceptionnels ou réguliers ? C’est l’homme qui en décidera. Et après 2050, « tout dépendra de la trajectoire des émissions de gaz à effet de serre », poursuit le chercheur. Pas d’impact corona Et en tout état de cause, le recul des émissions causé par la crise mondiale du coronavirus n’infléchira pas la tendance. En 2019, le monde a émis 37 Gt de CO2 , en hausse de 0,6 % par rapport à 2018. Avant la crise, les prévisions évoquaient une hausse de 1 à 2 %. Le coup de frein à l’économie causé par le coronavirus devrait entraîner une baisse de 5 à 6 % en base annuelle, estiment les Nations unies. Mais on ne sait pas encore quelle sera la vigueur du rebond de l’économie – et des émissions de gaz à effet de serre – après la crise. « Il se pourrait qu’avec un gros rebond, les émissions mondiales ne diminuent que de 1 à 2 % en 2020. Or, si l’on veut limiter la hausse de la température mondiale à 1,5ºC, elles devraient diminuer de 7 à 8 % chaque année », rappelle Massonnet. Le fléchissement dû au coronavirus n’aura aucun impact sur les concentrations de CO2 dans l’atmosphère qui dépendent de beaucoup d’autres facteurs. [scald=27518931:sdl_editor_representation] On estime que la banquise arctique a perdu 50 % de son épaisseur et 50 % de sa superficie par rapport à la moyenne de 1970-2020 ; soit trois quarts de son volume en moins. En cette fin d’hiver, selon les données de l’Agence d’exploration aérospatiale japonaise, l’extension de la glace de mer est la troisième la plus faible jamais enregistrée. En septembre 2012, année-record, sa superficie était passée sous 3,4 millions de km2. La fonte de la banquise arctique a de multiples conséquences dont la plupart ne sont pas encore évaluées. Les calottes et la banquise forment un élément stabilisateur du climat mondial ; leur diminution pourrait avoir des conséquences sur les courants océaniques et sur le climat chez nous. La banquise est aussi un élément essentiel pour la biodiversité locale.

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