Hockey: Aisling D’Hooghe, un bébé au-delà de la maladie

Ils n’en révéleront le sexe à leurs proches qu’en octobre, au moment de leur mariage civil, mais Aisling D’Hooghe, la gardienne des Red Panthers, l’équipe nationale de hockey, et échevine de Waterloo aux multiples casquettes (Petite enfance, Famille, Prévention, Santé et Accueil extrascolaire), et Guillaume François, footballeur pro à l’Union qu’il vient de rejoindre en provenance de Virton, ont décidé de révéler qu’ils accueilleront, au début du mois de février 2021,leur premier enfant. En soi, cette information « banale » devrait générer, chez eux, un bonheur identique à celui de la plupart des couples dans l’attente d’un heureux événement. Sauf que celui-ci est un peu plus particulier pour eux puisque, comme elle l’a annoncé il y a trois ans, D’Hooghe vit depuis son enfance avec la sclérose en plaques. Une maladie où le système immunitaire attaque la gaine de myéline qui protège les nerfs et qui nécessite, pour une femme, un surplus de précautions et de planification en cas d’envie de grossesse. Pas sur un coup de tête « Quand on souffre de sclérose en plaques, en raison des traitements que l’on suit, avoir un enfant n’est effectivement pas quelque chose que l’on peut décider sur un coup de tête », dit-elle. « Ca se prépare. En ce qui me concerne, je suis, depuis un peu plus de deux ans, traitée par intraveineuse avec de l’Ocrelizumab, un anticorps que l’on m’injecte deux fois par an. Il me permet d’être protégée pendant cette période de six mois… mais m’interdit aussi toute grossesse, parce qu’il y aurait des risques pour l’enfant. Si je voulais tomber enceinte, je devais donc arrêter le traitement mais sans excéder six mois, car c’est moi, alors, qui aurait pris des risques pour ma santé. Vous voyez comme cela est compliqué… » En octobre 2019, juste après l’élimination des Red Panthers dans la course à la qualification olympique pour les JO de Tokyo face à la Chine, Aisling D’Hooghe a pensé une première fois à la maternité. Avec cette grosse échéance sportive qui tombait à l’eau, qui plus est juste à la fin de sa période immunitaire de six mois, c’était le bon moment. « De toute façon, je ne me voyais pas repartir jusqu’au Jeux de Paris 2024, mon objectif ultime, sans faire une pause », précise-t-elle. « Je suis internationale depuis 2011 et, avec les échecs récurrents que nous avions eus ces derniers temps, je me posais pas mal de questions. Mais j’ai pensé à mon club, le Watducks, avec lequel on avait des objectifs de playoffs. Je me suis dit que j’allais terminer la saison normalement. Je ne voulais pas le laisser tomber. » Avec le soutien du sélectionneur et du directeur technique [scald=27673873:sdl_editor_representation] Quand la question s’est posée à nouveau en mars 2020, avec toutes les activités sportives à l’arrêt en raison de la crise du Covid-19, elle s’est dit que, cette fois, les planètes s’alignaient et qu’il fallait y aller. Elle a alors pris une décision improbable, en annonçant qu’elle renonçait à jouer en club tout en continuant à s’entraîner avec l’équipe nationale, parce qu’elle voulait rester à niveau, et à rester disponible pour celle-ci. « La logique aurait voulu que je fasse le choix inverse », reconnaît-elle. « Mais comme je risquais de tomber enceinte, je ne voulais pas mettre le Watducks dans la situation de se retrouver sans gardienne au début de la saison suivante et de devoir me trouver une remplaçante en dernière minute. Cela ne se fait pas. Je sais que certains n’ont pas compris à l’époque dans mon club, parce qu’il n’y avait pas de raison objective que j’arrête comme ça après seize ans, et je me doute qu’il y a pu y avoir des questions et des interrogations, peut-être de la part des autres gardiennes des Red Panthers, sur ce « privilège » qui m’était octroyé de rester internationale sans jouer en club ; si j’avais été à leur place, je me les serais posées aussi. Désormais, tout va s’éclaircir pour pas mal de gens !Tout cela s’est fait en accord avec Niels Thijssen, le coach fédéral, qui a toujours été au courant de ma situation au même titre qu’Adam Commens, le directeur technique. Dans cette aventure, la fédération m’a toujours soutenue. » Depuis le début de sa grossesse, il y a une quinzaine de semaines, Aisling D’Hooghe n’a jamais cessé de s’entraîner. Et même si sa transformation physique commence à se voir, elle ne compte pas s’arrêter là. « Petit à petit, je me limiterai à des séances individuelles, pour travailler mes réflexes, et à du travail physique. Je compte continuer le plus longtemps possible. Quand je ne pourrai plus courir, je sais qu’on me proposera un magnifique travail en piscine ! Ma gynécologue et mon neurologue, que je vois régulièrement, n’y voient pas de contre-indication. Je veux rester en forme parce que je compte bien revenir à mon poste pour la Coupe d’Europe, en juin 2021, quatre mois après l’accouchement ! » Le moment clé après l’accouchement. [scald=27673874:sdl_editor_representation] Après celui-ci, il lui faudra revenir à sa vie d’avant, reprendre son traitement par intraveineuse et passer des tests neurologiques et, surtout, une IRM, parce que c’est elle qui permet de voir l’avancée de la maladie. « D’habitude, j’en subis une tous les quatre mois mais là, ma dernière date d’octobre 2019. Des études ont démontré que le bébé « protège » la mère pendant toute la durée de la grossesse. Il est possible que cela se prolonge ensuite, mais je suis consciente qu’une rechute après l’accouchement est fort possible… » Aisling D’Hooghe a, de toute façon, entamé le chapitre le plus passionnant de sa vie en toute connaissance de cause. En sachant les risques qu’elle prend mais aussi, surtout, le bonheur qui l’attend. « Si je dois arrêter le hockey, j’assumerai », conclut-elle. « J’aurai dix ans de souvenirs en équipe nationale mais aussi un enfant qui arrivera à combler les manques éventuels à chaque moment de mes journées et de mes nuits ! Mais a priori, je compte bien être sur le terrain aux Jeux de Paris 2024. Avant d’avoir d’autres enfants. »

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