Joëlle Milquet: «Chacun doit-il avoir son joujou?»

La ministre de la Culture de la Fédération Wallonie-Bruxelles, Joëlle Milquet, s’était montrée jusqu’ici très discrète dans le bras de fer opposant le Botanique à la Ville de Bruxelles sur la gestion du Cirque royal. Elle a choisi de s’exprimer pour la première fois sur le fond du dossier dans Le Soir. Dans une lettre de soutien adressée au conseil d’administration du Botanique, vous déplorez le choix de la Ville de Bruxelles de reprendre la gestion du Cirque royal. Vous écrivez que cela porte un « préjudice important » à la Fédération Wallonie-Bruxelles. Concrètement, qu’avez-vous fait pour tenter d’infléchir cette décision ? Je tiens d’abord à préciser qu’il n’y a pas de polémique politique dans ce dossier, même si je siège dans l’opposition à la Ville de Bruxelles. Je trouve simplement dommage qu’une institution de la Fédération Wallonie-Bruxelles comme le Botanique, qui représente l’ensemble des francophones et a gagné une reconnaissance internationale, fasse les frais d’un choix de gestion arrêté unilatéralement par la Ville. Bien sûr, la Ville a le droit pour elle. Elle est propriétaire du Cirque. Mais chacun doit-il avoir son joujou ? J’aurais souhaité que l’on discute d’un modus vivendi permettant à la Fédération et au Botanique de continuer à faire vivre le Cirque. Le Botanique seul n’a pas de capacité suffisante pour faire face à l’offre de l’AB, gérée par la Communauté flamande, et dont le succès est enviable. Quand je parle de préjudice, il se pose en termes de cohérence de la politique culturelle francophone à Bruxelles. En retirant au Botanique la gestion du Cirque, on affaiblit le rayonnement de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Est-ce vraiment la mission de la Ville de jouer les acteurs culturels à la place des acteurs culturels ? Quelle solution voyez-vous pour sortir de cet affrontement stérile ? La Ville assure vouloir reprendre la gestion du Cirque royal pour assurer la diversité de l’offre culturelle à travers des salles de capacité différentes (ndlr : le Palais 12, la Madeleine, le Magasin 4, le Cirque royal). Le Botanique se veut de son côté une vitrine pour les jeunes artistes. Mettons-nous autour de la table et sortons des logiques manichéennes. Je verrais bien, par exemple, une forme de cogestion des salles à travers un partenariat entre la Fédération et la Ville. Ce serait très cohérent et cela permettrait de promouvoir au mieux nos jeunes artistes francophones à Bruxelles. Pour établir cette relation constructive, ne faudrait-il pas commencer par renoncer aux recours juridiques ? C’est ce que je pense depuis le début : il faut se mettre à table en toute transparence. A la Ville, certains montrent du doigt l’absence de transparence au conseil d‘administration du Botanique, dont les membres sont « nommés à vie ». Vous trouvez cette situation normale ? Personnellement, j’aime les systèmes qui fonctionnent sur base des compétences. Le fonctionnement du conseil d’administration du Botanique peut être amélioré bien évidemment mais il ne faudrait pas se servir de ça pour discréditer l’extraordinaire travail effectué. Simplement le monde change, tout évolue, et je crois que nous devons aller vers encore plus de transparence dans les équipes. La Ville vous reproche aussi de revendiquer la gestion du Cirque, alors que la Fédération laisserait à l’abandon le Pathé Palace et les Variétés… Ne mélangeons pas tous les dossiers. Je répondrai juste que pour le Pathé Palace, la Fédération est en attente de plusieurs décisions dans le chef de la Région bruxelloise. Je suis prête à céder les lieux en échange d’une emphytéose qui permettrait d’achever les travaux. Et je suis convaincue qu’on va y arriver. J’ai fait toutes les ouvertures nécessaires pour débloquer les choses. Pour pallier à la perte du Cirque, on parle d’une collaboration avec les Halles de Schaerbeek, toutes proches du Botanique : une piste crédible ? Il est évident qu’il faut en parler. Il y a là un espace ouvert à la discussion en vue d’une collaboration en bonne intelligence mais tout est encore à imaginer. C’est le moment de saisir les opportunités de part et d’autre mais je n’en ai pas encore parlé avec les intéressés.

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