Diegem Sport en justice pour le transfert de Carrasco en Chine

Le 8 septembre, Yannick Carrasco (27 ans) signait un contrat de quatre ans à l’Atletico. Un club qu’il connaît parfaitement puisqu’il y était loué depuis le mois de janvier et qu’il y avait évolué durant deux ans et demi entre 2015 et début 2018 avant un exil en Chine, à Dalian. Somme du transfert : 27 millions d’euros. Pour le Diable rouge aux 41 sélections, il s’agissait en quelque sorte d’un retour à la maison, lui qui semblait se languir dans sa prison dorée chinoise. Ce n’est pourtant pas son départ de Chine mais son arrivée fin février 2018 qui a fait l’objet d’une plainte de ses deux clubs formateurs, Genk et Diegem Sport en février 2020 et un recours de Diegem Sport, cette fois-ci seul, au TAS en septembre 2020. Diegem vs Wanda Group ou David contre Goliath En février 2018, le montant du transfert n’avait pas été dévoilé, certains médias ayant évoqué le chiffre de 30 millions d’euros. Pourtant, quelle ne fut pas la surprise du club formateur de Yannick Carrasco, Diegem Sport, intéressé par les indemnités de formation, de voir que le transfert de l’international belge avait été valorisé à seulement 10,5 millions d’euros, bien loin des sommes évoquées par les médias espagnols mais aussi de la valorisation du joueur sur les sites spécialisés Transfermarkt ou du CIES qui estimaient la valeur du Diable rouge entre 70 et 88 millions d’euros. Un document des Football Leaks, révélé le 6 décembre 2018, dévoilait même une conversation entre l’Atlético et l’agent du joueur, Christophe Henrotay, datant de novembre 2016, soit un peu plus d’un an avant le transfert de Carrasco en Chine, et dans laquelle le club espérait toucher entre 85 et 100 millions d’euros pour le joueur belge. Le latéral belge aurait-il perdu 90 % de sa valeur en un an ? Son prix d’arrivée pose davantage question à la lecture de son prix de départ (27 millions) : comment expliquer qu’après deux saisons dans le championnat chinois, sa valeur ait augmenté (de 10 à 27 millions) alors qu’un séjour prolongé dans un championnat de moindre importance a tendance à vous faire perdre de la valeur ? Comme il était impossible pour le club brabançon d’obtenir, ni du club espagnol, ni du club chinois (ni des ligues respectives) le contrat de transfert, il a décidé, conjointement avec Genk, de porter plainte à la FIFA, le 25 février 2020, estimant que le prix du transfert de Carrasco en Chine avait été sous-évalué. Et ce d’autant plus que ce transfert se déroulait au moment même où le sponsor principal chinois de l’Atletico Madrid, Wanda Group, revendait la totalité de ses parts dans le club espagnol (soit 17 %), pour racheter ensuite le club chinois de… Dalian, celui-là même que Carrasco venait de rejoindre. Au moment de la vente de ses parts, Wanda décidait de verser un sponsoring de 54 millions à l’Atletico. Pour Diegem, cette somme extraordinaire a compensé le faible montant de transfert de Carrasco. Avantage pour les deux clubs de minorer le prix du transfert : l’Atletico ne devait plus payer les 25,38 % de la plus-value à Monaco, et Dalian avait moins de taxe à payer au gouvernement chinois. En effet, depuis 2017, chaque club chinois transférant un joueur étranger devait payer une taxe de 100 % (soit le prix du transfert) pour tout deal supérieur à 5,9 millions d’euros. En transférant Carrasco pour 10 millions d’euros, Dalian a donc dû payer 10 millions supplémentaires au gouvernement chinois, qui aurait touché bien davantage (entre 60 et 78 millions de plus) si le prix de Carrasco avait correspondu à sa valeur estimée. La FIFA en plein conflit d’intérêts avec Wanda Group En juin 2020, la FIFA a rendu son verdict, bottant en touche face à la revendication de Diegem Sport, estimant que « toute allégation devait être accompagnée de preuves » tout en refusant au club évoluant aujourd’hui en D2 VFV l’accès au système FIFA TMS où tous les contrats de transfert sont avalisés. Mais était-ce à la FIFA de se pencher sur le problème étant donné qu’elle était, dans cette affaire, en plein conflit d’intérêts ? Le groupe Wanda, principal sponsor de l’Atletico et propriétaire de Dalian, est en effet également un « head sponsor » de la fédération internationale depuis 2016, la FIFA lui octroyant notamment les droits pour les Coupes du monde 2018 à 2030. Le vice-président du Wanda Group se nomme d’ailleurs Philippe Blatter, neveu de l’ancien président de la FIFA, Sepp Blatter. Philippe Blatter était auparavant à la tête de la société suisse Infront Sports et Media, rachetée par le Wanda Group en 2015. Face à ce faisceau de présomptions, une question se pose donc : comment une fédération pouvait-elle se montrer impartiale dans une affaire qui la confronte à l’un de ses principaux pourvoyeurs financiers ? C’est sans doute pour cette raison que Diegem, sans Genk cette fois-ci, a décidé de porter l’affaire devant le Tribunal Arbitral du Sport (TAS). Si le club brabançon a bien voulu nous confirmer l’existence d’une plainte et d’un recours au TAS, son avocat, Renaud Duchêne, n’a pas voulu s’épancher sur l’affaire, tant qu’elle était en cours. Si Diegem Sport obtient gain de cause, il pourrait récupérer près de 500.000 euros.

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