«Homo Sapiens» de et par Fabrizio Rongione: hilarant de bout en bout

Sur le grand écran, une photo en noir et blanc de personnages masqués. Masqué lui aussi, Fabrizio Rongione déboule sur le plateau, montre l’image : « 1918, la grippe espagnole ». Le ton est donné. Le comédien et son vieux complice Samuel Tilman (qui coécrit le spectacle et le met en scène), n’ont pas chômé ces derniers mois, adaptant le propos à la situation actuelle. Mais déjà, on bascule sur le sujet des Français à Bruxelles. À Ixelles surtout, là où notre homme habite et où d’innombrables commerces sont désormais tenus par des hexagonaux qui ne comprennent pas ce qu’est une couque ou un pistolet. « J’ose plus dire “peï”, fieu ! », s’étrangle-t-il. Mais les Français ne sont pas le seul problème : « Bruxelles, pour un raciste, c’est dur ! Y a trop d’offres ». Et il insiste, façon café du commerce, sur le trop grand nombre d’Arabes. Flottement dans la salle. « Même ma femme, elle est Marocaine ! » Filou, il distille le malaise pour mieux retomber sur ses pattes en secouant la salle de grandes vagues de rire. Pourtant, il ose tout, y compris se moquer des gosses, dont sa fille, Selma, à la base de ce spectacle. C’est à partir de la naissance de cette dernière que Fabrizio et Samuel ont construit ce spectacle qui entend explorer l’Histoire comme on ne nous l’a jamais racontée. Parce que l’Histoire officielle, c’est quoi ? « Des dates, des guerres, des mariages… du Stéphane Bern, quoi ». [scald=27748578:sdl_editor_representation] La guerre 14, Gengis Khan (« Ça s’est joué à rien qu’on soit Mongols »), Jules César balançant ses fake news dans la Guerre des Gaules, le petit Leonard de Vinci chez le psy, Jeff Bezos et ses milliards, Napoléon sur le champ de bataille avec son gosse dans un Maxi-Cosi, Moïse bien embêté devant la mer Rouge, Castro et son training (« la fin du communisme »)… tout le monde y passe. Mâle italien dans toute sa splendeur (il a toujours détesté Astérix qui mettait la pâtée aux Romains), son personnage entend s’amender et proposer d’autres lectures de l’Histoire. À travers les femmes, notamment. Sa démonstration est imparable, culminant, de manière culottée, avec la lecture de deux passages de la Bible, sidérants de machisme primaire. S’il veut remettre les femmes à l’honneur, Fabrizio Rongione n’oublie pas non plus les LGBT. « Vous avez vu Vercingétorix !? La guerre des Gaules, c’est une grande gay pride. Des mecs moustachus en costume bariolé, montés sur des chars qui défilent avec des types qui jouent de la trompette tout autour. » Mais s’il nous parle du passé, c’est aussi et surtout pour nous parler d’aujourd’hui. Là encore, tout le monde en prend pour son grade. Les climatosceptiques, les barquettes plastiques de Deliveroo, Trump… Et encore les enfants, dont sa fille, qu’il emmène à Pairi Daiza où elle ne s’intéresse qu’aux canards. Pairi Daiza où les félins se la coulent douce, dormant toute la journée, dos aux visiteurs. « Ils ont compris qu’ils sont en Wallonie. Ils peuvent pioncer tranquille. Alors qu’au zoo d’Anvers, paraît qu’il y en a qui sont en burn out. » Hilarant de bout en bout, cet Homo Sapiens met le doigt sur de nombreuses tares de notre époque et, mine de rien, démontre toute l’imbécillité du racisme, du sexisme et autres nationalismes. Avec l’élégance de l’humour. Les dates de la tournée.

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