Cavani, un pari bien engagé

Le moins que l’on puisse écrire est qu’Edinson Cavani n’a pas été traité à Paris, et jusqu’à mardi en Angleterre, avec la même générosité qu’il a toujours affichée sur un terrain et qui en fait un attaquant paradoxal : létal devant le but, mais altruiste dans toutes les autres zones de jeu. Buteur historique du Paris Saint-Germain, 200 buts en 301 rencontres, faute d’une prolongation, il avait refusé de prester au-delà de l’échéance naturelle de son contrat, soit juin 2020. Et le comble c’est que le PSG a atteint la finale de la dernière Ligue des champions sans lui. L’aurait-il remportée avec lui ? On ne le saura jamais. Comme Cavani ne saura jamais s’il avait fait le bon choix à l’été 2013 de rejoindre le PSG, plutôt que Barcelone, à l’instar de son concitoyen, Luis Suarez, ou le Bayern, à l’image de Robert Lewandowski ; deux joueurs cités à dessein avec lesquels il aurait pu lutter pour le titre de meilleur « 9 » de sa génération… Or il est resté un cran en dessous, notamment parce qu’à Paris, il n’a jamais été considéré comme le joueur central du projet tactique. Pendant 4 saisons, l’ancien joueur de Palerme et Naples a dû se pousser sur le côté pour laisser s’exprimer l’ego de Zlatan Ibrahimovic : il l’a fait bien volontiers sans pour autant perdre son affinité avec le but. À partir de 2017, les transferts exorbitants de Mbappé et Neymar l’ont rejeté dans l’ombre. Rejeté car à la faveur de la saison précédente, 2016-2017 sous Emery, débarrassé du Suédois, il avait pris toute la lumière avec 49 buts en 50 matches (8/8 en C1, 6/6 en coupes nationales) sauf que les résultats collectifs avaient mitigé la portée de son rendement personnel et, surtout, nourri la conviction qu’il n’était pas apte à porter, seul, l’ambition suprême du club. En effet, le PSG avait « réussi » à perdre le titre (au profit du Monaco de Falcao et Mbappé) et l’avantage d’un 4-0 à l’aller des 8es de finales de C1 (la « remontada » du Barça de Neymar)… Et l’an dernier, sa direction lui avait mis dans les pattes un « 9 » absolu, Mauro Icardi, dont le rayon d’action dépasse à peine le diamètre de son nombril. Le prêt de l’Argentin, transformé entre-temps en achat définitif, était déjà en soi un premier signal pour Cavani dont la condition avait par ailleurs trahi quelques fissures : entre août 2018 et janvier 2020, il avait manqué 38 rencontres pour blessure… « Quel professeur pour nos attaquants ! » C’est peut-être pour ces raisons-là et les 10 millions € à l’année (avec option pour une deuxième) que les observateurs de Premier League ont accueilli avec beaucoup de réticences son transfert à Manchester United. Ole Gunnar Solskjaer ne s’en est jamais ému. Cavani n’aurait su faire pire que son brelan d’attaquants : avec ses 3 buts en Premier League, il fait déjà mieux. À eux trois, Rashford (2), Martial et Greenwood n’en ont marqué que deux ! OGS n’avait du reste pas attendu sa leçon d’efficacité, son récital de Saint Mary pour le louer. « Cavani va amener son énergie, son envie, sa mentalité et… ses buts. Et quel professeur pour nos attaquants ! », l’avait-il défendu. Tout ce que… Ibrahimovic avait apporté à ce même club entre 2016 et 2018 – Zlatan avait près de 35 ans alors (17 buts en 28 matches à sa première saison) – et offre maintenant au Milan avec lequel il marque plus de buts qu’il n’a joué de matches cette saison. Ce n’est donc pas rien a priori. Leader par son exemplarité, Cavani partage aussi avec Ibra cette « détestation de la défaite ». Et, effectivement, jusqu’à preuve du contraire, il y a ses buts. Son rôle aussi, de vrai « 9 » aussi. Il faut remonter à 2012-2013 pour retrouver un centre-avant patenté à la pointe des « Red Devils », soit Robin van Persie. Le dernier mancunien d’ailleurs à avoir dépassé la barre des 20 (26) en une saison de Premier League.

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