29 Juin 2020, la vente de VOO tombe à l’eau

[scald=27890263:sdl_editor_representation] Article paru dans Le Soir, le 29 juin 2020 Nethys enterre la vente de Voo à Providence Retour à la case départ. Après une année folle en rebondissements, un chapitre de « l’affaire Nethys » s’est clôturé ce lundi. Non, le groupe liégeois ne vendra pas la majorité des parts de l’opérateur télécoms Voo qu’il détient au fonds américain Providence. La finalisation de ce deal devait avoir lieu cette semaine, mais il n’en sera rien. Une décision du tribunal de l’entreprise de Liège vient d’enterrer la vente et de rebattre les cartes. Pour comprendre, il faut se replonger en mai 2019. A l’époque, Stéphane Moreau est toujours CEO de Nethys. Le 22 mai, au terme d’une procédure éclair, il fait acter par son conseil d’administration la vente de Voo à Providence. Tout ça dans le plus grand secret. Le Soir dévoilera ce deal à la mi-septembre, ce qui entraînera une escalade de révélations plus folles les unes que les autres : en négociant la vente de Voo, Stéphane Moreau s’était assuré d’avoir une part du gâteau (un intérêt), sans exercer de fonctions managériales dans la nouvelle société. Un modèle qu’il a reproduit en jouant les acheteurs/vendeurs d’autres filiales de Nethys (Win, Elicio), acquises pour une bouchée de pain. On découvre également que de colossales indemnités ont été versées aux dirigeants de Nethys. Ces faits d’armes conduiront au licenciement du manager liégeois, au renouvellement de l’ensemble du conseil d’administration et à la décision de la tutelle wallonne de casser les ventes litigieuses des bijoux de famille de cette société à capitaux exclusivement publics. Débarquent alors Renaud Witmeur, CEO ad interim, et Laurent Levaux, président de Nethys. Ces deux-là doivent se dépatouiller de la situation dont ils héritent. Notamment d’une convention signée qui vend 51 % de Voo à Providence. La tutelle a beau avoir cassé la décision de vente, le contrat reste signé. Pour sortir de cet imbroglio juridique, le tandem demande d’abord à Providence de résilier la convention. Les Américains refusent. Le risque de devoir leur verser des dommages et intérêts est réel, comme celui de paralyser Voo dans un long procès avec le candidat acquéreur. Pour éviter cela, le nouveau Nethys renégocie le deal avec Providence. En gommant les points problématiques de la première formule, dont l’intéressement de Stéphane Moreau. Une « fraude » en cascade Une nouvelle convention est signée entre Nethys et Providence le 24 décembre 2019. Un traditionnel audit financier est prévu et la date butoir pour clôturer la vente est fixée au 30 juin. Mais la concurrence s’en mêle. Orange, candidat évincé par l’ex-management, introduit un recours en référé (en urgence) auprès du tribunal de l’entreprise de Liège et réclame le gel de cette vente. Elle « a le goût, la couleur et l’odeur d’une vaste fraude », estime le CEO d’Orange. Telenet se joint au recours, comme une série de communes liégeoises. Ce 29 juin, la justice liégeoise a rendu son verdict. Orange gagne la partie sur (quasi) toute la ligne : le tribunal voit une « fraude » dans le processus initial de vente et une volonté de Stéphane Moreau de s’enrichir. Il ordonne dès lors la « suspension avec effet immédiat » de la vente. Dans l’attente d’un jugement de fond (sur l’annulation de la convention), Nethys n’a plus le droit de céder la moindre action à Providence, sous peine d’une astreinte de 150 millions. Un cas de figure qui était prévu dans la convention renégociée entre Providence et Nethys : si la justice empêche la vente de se faire, l’accord entre les deux parties tombe à l’eau, sans indemnités. « La situation était simple : tout le monde attendait ce jugement, que la juge s’était engagée à remettre avant la fin du mois. Soit il était favorable à Nethys et le deal avec Providence était bouclé dans les 72 heures, soit il ne l’était pas et la vente était annulée », entend-on chez Nethys. Les Liégeois ne s’obstineront pas : ils ne feront pas appel et n’attendront pas des mois une autre décision de justice sur l’annulation de la convention. Toujours bien décidée à vendre Voo, Nethys annonce « relancer une procédure de vente ouverte et transparente » à la rentrée. Bref, on efface tout et on recommence, d’une page blanche, en oubliant les casseroles des anciens managers. Reste à savoir si Providence – injoignable ce lundi – avalera la pilule si facilement. Telenet déjà candidat Résultat des courses : plus d’une année perdue, sans réelle stratégie pour Voo. Et il faudra sans doute compter au moins 12 mois de plus avant qu’un accord de vente soit signé, en bonne et due forme cette fois. Avec le contexte Covid, les sociétés télécoms ont également perdu un peu de valeur. La future offre devra pourtant pouvoir rivaliser avec le 1,2 milliard proposé par Providence, si Nethys ne veut pas perdre la face. Contactée, Orange n’a pas réagi. Quant à Telenet, elle promet déjà « d’examiner le dossier » et de « probablement remettre une offre si une nouvelle procédure transparente et correcte venait à être organisée ». Le carrousel va repartir pour un tour.

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