Allaitement: montrez ce sein…

C’est rond, c’est doux, c’est chaud. C’est des pommes ou des poires, des mandarines ou des melons. C’est sexy, maternel, nourricier, naissant, caché, deviné, exhibé, militant. C’est des nichons, des lolos, des nibards, des roploplos, des boobs, des seins, des roberts, des nénés. Et la marque – ne cherchons pas midi à quatorze heures – « Nénés » a choisi de les montrer, de les dessiner, de les porter en étendard fièrement – et logiquement – sur la poitrine des mamans allaitantes, des co-allaitants, des pro-allaitements, bref de tous ceux qui aiment et prônent le lait maternel. Sur les T-shirts aux dessins colorés et évidemment sans tabou, gribouillés par « Rafiki dessine », ces seins sont les nombreuses mamelles d’une chatte allongée. Se comptent par six sur le corps d’une femme allaitant deux chérubins rondouillets façon louve de Romulus et Remus, au-dessus du slogan « Human milk for human babies » (« lait humain pour bébés humains »). Font couler des gouttes d’« or blanc ». Ou interpellent le curieux : « T’as jamais vu un sein ? » [scald=27900017:sdl_editor_representation] C’est ce qu’aurait voulu balancer Rémi Van Damme, ce dimanche-là d’été au parc, aux passants qui lorgnaient sa compagne Marie en train d’allaiter Rose, leur petite fille de bientôt deux ans. « On a eu mille regards relous », regrette le jeune papa de 32 ans. « C’est frustrant comme papa de ne pas pouvoir montrer aux gens que, nous aussi, on soutient la mère dans son allaitement. » Le Bruxellois avait déjà cherché un T-shirt avec lequel afficher publiquement son soutien et sa fierté de papallaitant. En vain. « Quand on sort un sein… » Du coup, le couple a décidé de se lancer. En créant « des T-shirts qui envoient du jus » et une marque « miliallaitante ». Pour porter le message, prôner l’allaitement, inclure les co-allaitants, qui peuvent désormais arborer leur rôle de « dispositif d’aide à la lactation (DAL) » sur un T-shirt stylé et engagé. Parce que « c’est le rôle du co-allaitant de supporter la maman dans cette épreuve-là, de lui faire garder le moral quand les nuits sont difficiles ». Même si, souvent, tout est oublié lors de la tétée de retrouvailles à la fin de la journée, moment suspendu dans le temps entre la mère et l’enfant. Quand Rémi parle de l’allaitement de Rose, il parle en « on ». « Avant la naissance de Rose, on ne savait pas du tout qu’on allait allaiter aussi longtemps », raconte-t-il. « On a eu une conversation de dix minutes où Marie m’a dit qu’elle pensait allaiter. J’ai dit : “Ok, super.” Puis, elle a tenu trois mois, puis six, puis douze. Aujourd’hui, ni Marie ni Rose ne savent quand l’allaitement va s’arrêter. On pense qu’on va allaiter jusqu’au bout. » Cela s’appelle le sevrage naturel. Un sevrage décidé par l’enfant, qui arrive en général entre deux ans et demi et sept ans. Et pour le papa engagé, c’est ça qui coince, en général, dans le regard des gens. « Quand on allaite un bébé, jusqu’à six mois, c’est pas très grave, c’est mignon, c’est socialement acceptable d’allaiter en public », remarque Rémi. « Au-delà, à partir de six ou neuf mois, et puis quand ils voient un bébé qui court et qui parle, les gens se demandent si c’est pas limite de l’inceste. Alors qu’en Orient et en Amérique latine, c’est accepté, les gens trouvent ça beau. Ici, le gros problème pour moi, c’est la sexualisation du corps féminin. Parce qu’on sort un sein. Alors que pour nous, c’est un phénomène complètement naturel. » Née juste avant les fêtes, la marque a immédiatement eu son petit succès, en particulier au sein de la communauté pro-allaitement en Belgique et en France. Hé oui, allaitantes, co-allaitant.e.s, pro-allaitement, on aime tous les Nénés.

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