Toma Nikiforov: «Si je me focalise trop sur les Jeux, je ne me qualifierai pas»

Il ne reste que sept rendez-vous : les tournois de Tel-Aviv (à partir de ce jeudi), Tachkent, Tbilissi, Antalya et Paris et les championnats d’Europe de Lisbonne et les Mondiaux de Budapest. Sept épreuves majeures, réparties jusqu’à la mi-juin, au cours desquelles les candidats aux JO en besoin de points pour se hisser parmi les qualifiés au ranking mondial vont devoir se multiplier. Et ne pas (trop) se louper. Parmi les candidats belges « évidents » au voyage olympique, Toma Nikiforov, qui a perdu du temps en raison de trois opérations au genou et aux épaules en 2018 et 2019. Le double médaillé mondial et triple médaillé européen est redescendu à la 43e place au classement des moins de 100 kg avec un déficit de près de 900 points sur la première place qualificative. Autant dire qu’il joue gros… Toma, ressentez-vous un peu de nervosité à l’aube d’entamer ce qui peut s’assimiler pour vous à un vrai contre-la-montre ? J’en ressens chez les gens autour de moi qui ne m’ont plus vu depuis un petit temps, mais moi, je vais bien ! Je ne gamberge pas trop, je suis assez calme et serein. On parle moins de moi – ce dont je suis content –, beaucoup de gens m’ont enterré, mais je suis bien vivant. Je vais attaquer une année olympique avec un peu de retard au classement, mais j’ai été assez soulagé quand j’ai vu le calendrier et le nombre de compétitions qui me restent. On m’a inscrit partout, à moi de retrouver le rythme et de bien gérer les périodes entre les tournois. Vous avez fait vos calculs ? Non, ça c’est quelque chose que je laisse à mon entraîneur, Damiano Martinuzzi. J’ai pris le parti de ne pas penser aux points, au classement, aux Jeux mais uniquement au tournoi que je vais disputer. Si je me focalise trop sur Tokyo, je ne me qualifierai pas. Je bous, mais je ne veux pas exploser trop tôt ! Aujourd’hui, la seule compétition qui occupe mon esprit, c’est Tel-Aviv. Votre chute au ranking ne facilite pas les choses parce que vous ne serez pas tête de série au tirage lors des prochaines compétitions… Le ranking, ce n’est pas quelque chose de réel. Dans ma catégorie, tout le monde peut battre tout le monde. En octobre, pour ma rentrée à Budapest, où j’étais encore moins bien classé qu’aujourd’hui, j’ai battu l’Israélien Paltchik, qui allait décrocher le titre européen un mois plus tard. Tout cela avec les ligaments du coude déchirés ! Vous savez, ceux qui vont hériter de moi dans les premiers tours ne vont pas rigoler non plus… Ces blessures et ces opérations, cela ne commence pas à peser ? Oui, c’est indiscutable. La combinaison ligament croisé-épaule-épaule, je ne la souhaite à personne. Parfois, je me demande comment je suis encore là après 9 opérations. Je suis balafré de partout. Certains de mes adversaires se demandent comment je fais pour être encore là quand ils me voient torse nu ! Si vous êtes mal classé, c’est aussi parce que vous avez été éliminé au premier tour lors des championnats d’Europe en novembre et que vous n’avez pas pu vous classer en ordre utile pour aller au Masters… Les championnats d’Europe, cela été un jour sans. A l’échauffement, déjà, je sentais que ça n’irait pas. Si j’avais continué, je me serais même peut-être blessé. En fait, j’ai eu du mal à récupérer du tournoi de Budapest où j’avais fini 5e un mois plus tôt. Je sortais de 17 mois sans compétition et j’ai dû y disputer 5 combats, dont deux sont allés au golden score (NDLR : prolongation). J’étais dans le cirage… Après, ne pas aller au Masters m’a frustré, mais je n’entrais pas dans les critères. On voit, sur les réseaux sociaux, que la situation actuelle vous pèse énormément. Vous confirmez ? Oui, ça m’affecte nerveusement. Le monde du sport en général et du judo en particulier est terriblement pénalisé par cette crise. Elle nous ralentit, nous étouffe. J’ai l’impression de vivre dans une dictature, d’être manipulé. Les contraintes sont énormes, quand je dois signer 17 documents (sic) ou me faire piquer le nez quatre fois par jour (re-sic). Je dois avoir fait une quarantaine de tests, tous se sont révélés négatifs. Il faut arrêter le show… Et puis, pendant 9 mois, je n’ai pu m’entraîner qu’avec quatre partenaires à Wilrijk, tous plus légers que moi, parce que nous ne pouvions pas partir en stage… Heureusement que la naissance de ma fille, en août dernier, m’a apaisé ! Depuis votre passage à la Fédération flamande, en janvier 2020, vous côtoyez forcément Matthias Casse, le nouveau leader du judo belge. Vous en pensez quoi ? Ce mec est génial ! Il est hyper positif, motivé comme un fou, gérant magistralement son énergie. C’est un pro de A à Z. Il tire tout le monde vers le haut, y compris moi. Il n’y a aucune compétition entre nous. Je ne le copie pas, je prends ce qu’il y a de mieux chez lui. J’ai aussi beaucoup appris avec Mark van der Ham (NDLR : le coach en charge des hommes), qui m’a aidé à travailler la gestion de mes combats, la sécurité, le contrôle. Je suis également plus rapide dans le travail au sol. Vous pensez toujours à passer en lourds après les Jeux ? Je ne sais pas. Pour cela, il faudrait que je monte à 120 kilos et j’aurais encore plus de mal qu’aujourd’hui à trouver des sparring partners. Par contre, je sais que je prendrai 3 mois de repos après Tokyo. Sinon, en 2022, on m’enverra à l’asile ! [scald=27926499:sdl_editor_representation]

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