#sofagate: Charles Michel se justifie face aux nombreuses critiques
Le président du Conseil européen a livré sa version de l’incident, regrettant une « situation désolante ».

Un affront infligé à la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, placée mardi par le protocole en retrait sur un divan lors de la réunion des présidents des institutions de l’UE avec le président turc Recep Tayyip Erdogan à Ankara, a provoqué une polémique et beaucoup de ressentiment à Bruxelles.
« La présidente von der Leyen a été surprise. Elle a décidé de passer outre et de donner la priorité à la substance. Mais cela n’implique pas qu’elle n’accorde pas d’importance à l’incident », a expliqué mercredi son porte-parole Eric Mamer.
La scène a été filmée et largement diffusée sur les réseaux sociaux. Sous le hashtag #Sofagate, elle a suscité de nombreux commentaires sur l’inégalité de traitement entre les deux chefs des institutions européennes, et son caractère sexiste.
Une situation « désolante », selon Charles Michel
« Aucune disposition n’a été prise en dehors de celles demandées par une délégation de l’UE qui a préparé la visite », a assuré en fin de journée à l’AFP un responsable turc. La visite a été préparée par l’ambassadeur de l’UE à Ankara.
Charles Michel a confirmé cette version de l’incident : « L’interprétation stricte par les services turcs des règles protocolaires a produit une situation désolante : le traitement différencié, voire diminué, de la présidente de la Commission européenne », a-t-il expliqué dans un message sur son compte Facebook. « Sur le moment, tout en percevant le caractère regrettable de la situation, nous avons choisi de ne pas l’aggraver par un incident public », a-t-il soutenu.
Dans sa réponse à « des réactions et interprétations parfois rudes », l’ancien Premier ministre belge, s’est dit en fin de compte « peiné à double titre » : « D’abord par l’impression donnée que j’aurais été indifférent à la maladresse protocolaire vis-à-vis d’Ursula. Cela d’autant plus, que je suis honoré de participer à ce projet européen dont deux institutions majeures sur quatre sont dirigées par des femmes, Ursula von der Leyen et Christine Lagarde. Et fier aussi qu’une femme, la première de l’histoire, m’ait succédé comme Première ministre de Belgique. Enfin je suis peiné, parce que cette situation a occulté le travail géopolitique majeur et bénéfique que nous avons réalisé ensemble à Ankara, et dont j’espère que l’Europe récoltera les fruits ».
Les droits des femmes au centre des discussions
Les Européens ne cachent pas leurs inquiétudes face aux violations des droits fondamentaux en Turquie et la décision du président Erdogan de quitter la convention d’Istanbul sur la prévention de la violence contre les femmes et les enfants.
À l’issue de la rencontre, Mme von der Leyen n’a pas mâché ses mots lors de la conférence de presse. « Je suis profondément inquiète du fait que la Turquie se soit retirée de la Convention d’Istanbul », a-t-elle lancé. « C’est clairement le mauvais signal en ce moment », a-t-elle ajouté.
« La question des droits de l’homme est hautement prioritaire dans la relation entre l’UE et la Turquie. Elle sera prise en compte dans l’analyse générale qui sera soumise aux dirigeants européens lors de leur sommet en juin », a averti mercredi son porte-parole.
Des images qui suscitent colère et indignation
L’affront fait à la première femme à occuper l’un des deux plus hauts postes de l’UE a suscité la colère de plusieurs élus européens à Bruxelles. « D’abord, ils se retirent de la Convention d’Istanbul et maintenant ils laissent la présidente de la Commission européenne sans siège lors d’une visite officielle. C’est honteux. #WomensRights », s’est insurgée la présidente du groupe socialiste au Parlement européen, l’Espagnole Iratxe Garcia Perez, dans un message sur son compte Twitter, avant de demander que l’incident soit débattu en séance plénière.
Charles Michel n’a pas été épargné par les critiques. L’eurodéputée libérale néerlandaise Sophie in ’t Veld s’est demandé pourquoi le président du Conseil était resté « silencieux » alors que sa collègue se retrouvait sans siège.
Charles Michel s’est défendu d’avoir été « insensible » à cette situation : « Rien n’est plus éloigné ni de la réalité, ni de mes sentiments profonds », a-t-il assuré.
Mais le mal est fait. « En termes d’images, le résultat est abominable pour Charles Michel », a reconnu un responsable européen.
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S'abonnerQuelques règles de bonne conduite avant de réagir106 Commentaires
Il est vrai que chez nous, le féminisme livre de grrrrands combats comme celui de l'écriture inclusive ou de la féminisation à outrance du vocabulaire français. A la RTBf, on a eu récemment droit à "chercheure" et, bien sûr, à l'inénarrable infirmière "en cheffe". Par contre, en ce qui concerne les vrais combats féministes, comme la prise en compte systématique des violences physiques et/ou psychologiques faites aux femmes, la saisie sur salaire des ex-maris qui ne paient pas la pension alimentaire à laquelle ils sont astreints ou les écarts de langage dans nos rue, nos écoles et nos métros dès qu'une jeune fille a une jupe un peu trop courte ou des talons un peu trop hauts, on préfère regarder ailleurs et jouer l'indifférence. Alors, jouons les puceaux effarouchés et les vierges candides, tapons très fort sur les "machos" style Erdogan ou les "moules" bien de chez nous (je ne citerai personne), cela est sans risques et donne bonne conscience pour pas cher. Pour le reste, après Trump, Johnson, Xi Jin Ping, Poutine ou Bolsonaro, on voit bien ce qu'est devenue l'Europe aux yeux du monde entier : un paillasson, non pas parce qu'elle est faible, loin de là, mais parce qu'elle a perdu toute forme de fierté d'elle-même à force de se repentir et de ne pas assumer, en même temps que ses errements passés, ce qui a fait sa grandeur d'hier, d'aujourd'hui et, espérons-le, de demain.
En cédant sa place à Ursula, Charles aurait créé le buzz. J’imagine la tête du turc.
Michel : Démission à vie de tout mandat politique et sans indemnités.
La galanterie se perd! Le droit de préséance est bafoué! Erdogan doit rire sous cape!!
@ MAESEN Jean-Luc Excellente analyse ! Je n'avais pas perçu jusqu'ici l'ampleur du pouvoir de nuisance de ce sinistre personnage. Mais il est vrai que l'accumulation de faits avérés que vous décrivez a de quoi donner froid dans le dos. Et ajoutons-y le pouvoir d'influence qu'il garde en Europe occidentale à travers les communautés turques ainsi que le chantage qu'il mène sur l'UE via les réfugiés syriens résidant sur son territoire. Cela fait quand même beaucoup...