Didier Gosuin «implore» la capitale de réduire le piétonnier

J ’implore la Ville de Bruxelles de changer le piétonnier. Il faut au plus vite trouver des solutions ». La sortie, signée Didier Gosuin (Défi), ministre bruxellois de l’Économie, n’est pas passée inaperçue sur les plateaux des débats dominicaux. D’autant qu’au même moment ou presque, l’échevin bruxellois Alain Courtois (MR) y allait, lui aussi, d’un couplet en forme de mea culpa : « On a commis des erreurs de mobilité et de communication. La situation est grave ». Grave ? Les commerçants, restaurateurs et hôteliers concernés au cœur de la ville n’en finissent pas d’aligner les pertes de chiffre d’affaires, les faillites, les licenciements de personnel… Le piétonnier est devenu l’exutoire, la face visible de cette collection de désastres qui se sont abattus sur la capitale ces derniers mois. Dans cette affaire, le bourgmestre Yvan Mayeur – adepte jusqu’ici de la confrontation rude plutôt que des accommodements raisonnables – fait à son tour office de victime expiatoire. [scald=951400:sdl_editor_representation] 1 Le mea culpa de Courtois Après une fin de semaine épouvantable – pétition, refus de table dans un restaurant, campagne d’affichage anti-Mayeur – le bourgmestre s’est tu ce week-end. Son échevin Alain Courtois (MR) a donné le change, soutenant son bourgmestre d’une phrase, s’en distanciant de l’autre. « Il est dommage qu’un projet de ville devienne un débat sur un homme, explique-t-il au Soir. Ce dossier est celui de la majorité bruxelloise (NDLR : PS, SPa, MR et Open-VLD). Je rappelle que le principe même du piétonnier avait été adopté à l’unanimité par le conseil communal ». L’homme, au nom de la même majorité, fait un mea culpa : « sur la mise en place, deux choses n’ont pas fonctionné. Un : fermer un axe routier pour cause de travaux alors que ces travaux n’arrivent pas. Deux : se contenter de dire “le centre-ville est piéton” équivaut à faire croire aux gens qu’il n’est pas accessible. En fait, nous avons mal communiqué sur l’accessibilité à Bruxelles pour les voitures venant du Brabant wallon, du Brabant flamand et même des 18 autres communes. Il faut dire la vérité : sur ces points, nous avons fait des conneries ! 2 Il n’y aura « pas de tabou » À ces « conneries » originelles, s’est ajoutée la série noire : fermeture des tunnels, Bruxelles lockdown, attentats, réouverture laborieuse des métro et aéroport… « Depuis la création du piétonnier, les circonstances ont profondément changé, déplore Alain Courtois. Raison pour laquelle, il faut réinstaurer un dialogue avec les commerçants, écouter, parler… Il faut travailler sans symbolique, sans bashing mais aussi sans tabou ». Sans tabou vraiment, y compris sur la réouverture partielle de la zone ? « J’ai dit sans tabou, cela veut dire qu’on peut avancer en fonction de la remise en service des tunnels ou du phasage des travaux. Il faut déposer tous les scénarios possibles à condition que l’on ne cherche pas à avoir un vainqueur et un vaincu. Nous avons déjà examiné l’un ou l’autre axe où le retour au double sens de circulation serait utile. Il faut se remettre à table, ce sera fait dès cette semaine ». Un risque de divergence de vue au sein de la majorité ? « Le MR continuera à développer un piétonnier, il ne sera ni déloyal, ni infidèle, assure Courtois. Il faut juste voir désormais, si compte tenu des éléments neufs, on ne doit pas changer notre fusil d’épaule pour telle ou telle partie. Rien n’est tabou, il faut savoir oser ». [scald=951398:sdl_editor_representation] 3 L’alternative Gosuin On l’a dit, Courtois n’est pas le seul à être monté au créneau ce week-end. Didier Gosuin, ministre régional bruxellois, va un pas plus loin, « implore » littéralement la Ville de réviser son projet. Sur les motivations, le discours ne diffère guère de celui l’ancien partenaire politique (aujourd’hui le MR est en majorité à la Ville mais dans l’opposition à la Région alors que Défi gouverne à la Région mais occupe les bancs de la minorité à la Ville). « Dans les circonstances actuelles, il faut savoir faire un geste, il faut écouter la population et singulièrement les commerçants », dit le ministre bruxellois de l’économie. « L’idée de piétonnier est intéressante, Yvan Mayeur l’a porté, je ne ferai pas de bashing contre lui. Cependant, aujourd’hui, il faut bien comprendre que ce projet souffre d’éléments extérieurs qui ont cristallisé des critiques. Raison pour laquelle il doit y avoir des rééquilibrages. De plus tout est bloqué en raison des recours. C’est donc le bon moment de reprendre le dialogue. » Et Didier Gosuin de peaufiner sa sortie : « ramener le piétonnier à un espace compris entre la rue du Fossé aux Loups et la Bourse serait de nature à décrisper la situation. On doit pouvoir travailler prioritairement sur cette partie avec un vrai retour au dialogue et un accompagnement des commerçants. Quand on voit les indicateurs économiques, il est aisé de comprendre qu’il s’agit là de la partie la plus cohérente pour un piétonnier à Bruxelles ». Le reste ? « De la Bourse à la place Fontainas, c’est un désert, un piétonnier n’y a aucun sens. Autour de la place de Brouckère c’est déjà une autre architecture, on peut très bien y imaginer un autre traitement » [scald=949780:sdl_editor_representation] Reste une question : la proposition est-elle celle d’un ministre régional ou d’un leader de parti d’opposition à Bruxelles ? « C’est le ministre de l’Économie qui parle, exclusivement. Ne craignez rien, il n’y aura pas de crispation au sein du gouvernement régional. Il faut arrêter de jouer dans le bac à sable politique, l’essentiel aujourd’hui c’est de sortir Bruxelles de l’ornière. Je pense, à l’issue des débats dominicaux, avoir déjà été entendu par le partenaire libéral. J’estime, raisonnablement, que ma proposition est la voie de la sagesse.

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